Au siège du quotidien Echaab hier, Aboudjerra Soltani n'a pas dérogé à la règle. Tantôt critique, tantôt conciliant, il parcourt les dix raisons de l'échec de l'établissement de la démocratie en Algérie pour les confronter ensuite aux réalisations avec une touche finale de propositions en se gardant de s'y impliquer politiquement. Le MSP, qui a tenu à organiser ce débat à la veille de la date anniversaire de la première Constitution qui a consacré le pluralisme politique et l'alternance au pouvoir, propose de faire de cette date «une journée nationale des libertés». Sur deux listes distinctes, le bilan de l'expérience démocratique en Algérie avec ses points forts et points faibles était parcouru par le président du parti qui a tenté à travers la similitude du nombre de points sur chacune des listes de dire des choses, de juger aussi d'un bilan apparu plutôt critique dans la mesure où il est suggéré au fil des situations négatives énumérées une précarité de la démocratie en Algérie qui reste à son sens otage de l'improvisation politique, faisant traîner en longueur une transition ou plutôt une «simple mutation» comme souligné d'ailleurs par les cadres universitaires qui l'ont accompagné dans ce débat. Une appréciation qui n'a pas été du goût de son invité d'honneur, Abdelaziz Belkhadem, qui, après avoir pris connaissance des dix points faibles de Soltani, ne s'est pas encombré d'amabilités pour lui signifier son total désaccord sur huit des dix points énumérés. Il en fut ainsi de la notion de «multipartisme restreint» telle que suggérée par Soltani et que le SG du FLN a réfutée d'un revers de la main estimant que beaucoup de réalisations ont été faites consacrant le principe démocratique tant dans l'alternance au pouvoir que dans l'exercice politique. Il intima le même refus, pour les autres raisons de Soltani selon lesquelles le pouvoir a failli comme l'absence de professionnalisme dans l'exercice de la politique, l'absence d'alternative, l'absence d'opposition, de modèle, la prédominance de l'exécutif sur le législatif et le danger du discours aristocratique idéologique et truffé de démagogie. «Je ne suis pas d'accord», répliquait Belkhadem apparemment irrité par ce dernier argument qu'il trouva sans fondement. Il lui consentit par contre le droit de réserve sur la politisation du mouvement associatif. Une mise au point que le président du MSP a accusé difficilement qui pour se défendre s'est dit vouloir parler d'un bilan tel qu'appliqué sur «le terrain et non tel que conçu politiquement». Tant pis, Belkhadem était déjà sorti laissant Soltani face à la presse qui était invitée au débat. «Nous faisons partie de ce peuple», dira Soltani et nous avons souhaité que «les choses évoluent autrement» s'engageant par là même à lutter «politiquement», loin de la violence à concrétiser l'ambition d'instaurer la démocratie sur des bases solides et pérennes. Quant au rôle de son parti dans le bilan qu'il a présenté, Soltani s'est déclaré appartenir à un mouvement «qui a choisi la participation positive tout en restant autocritique et critiques vis-à-vis de l'autre». Ce débat initié à la veille d'une échéance électorale importante a été aussi une occasion pour le MSP de rappeler les réalisations enregistrées depuis l'entrée du multipartisme et dont la Constitution du 23 février de 1989 a consacré les fondements de cette démocratie, notamment à travers son article 178 qui préserve les libertés, la souveraineté nationale et le choix démocratique du pays en apposant l'interdiction d'y toucher. Le président du MSP avait aussi relevé lors de son exposé l'instauration de la culture démocratique marquée par le rejet de la violence, la décantation politique opérée depuis la fin du parti unique par l'émergence de partis alliés et une opposition et enfin l'arrivée d'une génération de politiques plus jeunes venant des différentes formations politiques qui sont nées à la faveur de cette Constitution qui a consacré le multipartisme bien que cette «mutation» soit faite «sans transition, dans la douleur et à la césarienne», ce qui a par la suite à provoqué la tragédie nationale, a-t-il soutenu. Il évoqua aussi au courant de son analyse un autre argument d'échec ayant concouru à la faillite de l'assise de la démocratie en Algérie et qui a trait, selon son optique, à l'environnement national marqué par «la gestion sécuritaire et le traitement de la tragédie nationale dans son ensemble».