Les faits semblent, malheureusement, confirmer les inquiétudes dont nous nous faisions l'écho lors des précédents articles concernant l'activisme en Israël de militants d'extrême-droite, dont l'impunité ne cesse d'étonner. Ils sont, ainsi, à nouveau passés aux actes le vendredi 11 décembre, à des actes que des antisémites n'auraient certainement pas désavoués. Ils ont profané la mosquée de Kfar Yassouf, en Cisjordanie, en mettant le feu aux livres et aux tapis de prière, et en taguant les murs de slogans nationalistes. Le président du conseil des localités juives de Cisjordanie s'est contenté de «condamner les actes de vandalisme» du bout des lèvres et a encouragé la police à retrouver les pyromanes et à les traduire en justice. C'était le minimum qu'il pouvait faire sans être pris à partie par les siens. Cette condamnation parait bien molle, au regard du symbole de ces crimes de haine, à l'encontre d'un lieu de prière. S'opposant au gel des constructions dans les territoires pendant dix mois, des extrémistes ont usé de représailles, inappropriées, qui n'atteignent pas directement le gouvernement mais uniquement des Palestiniens qui se trouvent impliqués, à leur insu, dans un conflit israélo-israélien. Tous les gouvernements de l'Etat juif, quelque soit leur tendance, ont toujours traité les habitants des implantations avec beaucoup d'égards, soit par opportunisme politique, pour les maitriser et les neutraliser, soit par obligation, pour faire perdurer une coalition gouvernementale fragile. Par ailleurs, ils avaient besoin du soutien des orthodoxes américains, qui financent et télécommandent, à distance, les habitants des colonies. Plus flagrante était l'impunité, et plus les libertés prises avec la démocratie se trouvaient bafouées. Quand l'armée avait décidé d'expulser des jeunes trublions des implantations sauvages, les rebelles n'avaient rien trouvé de mieux que de déraciner, ou de brûler, des oliveraies arabes. Ces terroristes juifs se sentent protégés par des leaders qui les encouragent à agir avec violence. Les appels au meurtre, lancés par des rabbins, contre ceux qui cherchent à s'opposer à leurs errances, deviennent légion, sans que des mesures adéquates ne soient prises pour faire cesser ces menaces. C'est en se fondant sur des appels au meurtre de cet acabit qu'un jeune religieux, intoxiqué de messianisme frelaté, et se prétendant l'instrument de Dieu, a porté la mort contre le premier ministre Yitzhak Rabin. Par ailleurs, il est difficile de ne pas voir de lien entre ces crimes et l'article écrit en 2006 par le rabbin extrémiste Youssef Falay, habitant la colonie de Yitzhar, au nord de la Cisjordanie. Dans son texte, paru sous le titre «Chemins de la Guerre», il a préconisé le massacre de tous les hommes palestiniens qui refuseraient de quitter leur pays : «Nous devons nous assurer qu'aucun individu palestinien ne reste sous notre occupation. S'ils s'échappent, alors c'est bien ; mais si n'importe lequel d'entre eux reste, alors il devra être exterminé». Plus récemment, la police vient d'arrêter un israélien d'origine américaine, Yaacov Jack Teitel, habitant la colonie Shvout Rahel, suspecté du meurtre de deux arabes, d'une série d'actes terroristes, du dépôt d'une charge explosive au domicile du Dr Zeev Sternhell, à Jérusalem, et d'attaques répétées contre la communauté homosexuelle. Le procès s'est ouvert le 9 décembre, au tribunal de Jérusalem. Selon l'acte d'accusation, le prévenu aurait agi impunément pendant une dizaine d'années, ce qui démontre les failles et les limites du système sécuritaire israélien. A la suite de cette arrestation, le Premier ministre, qui présidait les cérémonies du 14e anniversaire du meurtre d'Itzhak Rabin, s'est trouvé contraint de marquer le coup : «Il existe toujours, en notre sein, des individus qui ne sont pas prêts à accepter une décision démocratique. Ils ne représentent pas la majorité du peuple. Nous devons condamner tout recours à la violence». Il a été relayé par le chef d'Etat-major de l'armée, qui a confirmé : «Bien que les temps aient changé, depuis l'assassinat d'Itzhak Rabin, il y a encore des éléments, dans la société israélienne, qui veulent faire justice eux-mêmes et changer la situation en incitant à la violence et en attentant à des civils innocents. Nous devons couper ces mauvaises herbes, avant qu'elles ne poussent plus mal». Enfin, la chef de l'opposition, Tzipi Livni, a taclé le Premier ministre en estimant «qu'il n'y a pas de place pour des gens comme cela, chez nous, et le devoir d'un leader est d'éduquer tous les enfants d'Israël sur la base de valeurs communes qui constituent le fondement de notre existence en tant que société». Cependant ces déclarations conduisent à peu de résultats.