La baisse, ces deux dernières années, de la demande mondiale en produits pétroliers est à l'origine de la crise sans précédent que traverse le secteur du raffinage. C'est en effet la première fois depuis le début des années 80 que l'on enregistre une chute aussi spectaculaire de cette demande qui a été particulièrement forte en Europe. Selon les derniers chiffres de l'AIE, l'Agence internationale de l'énergie, les européens ont ainsi réduit leur consommation d'or noir de 7,5% entre 2007 et 2009. Cette baisse de la demande, largement due à la crise qui a plongé l'économie mondiale dans la récession, a eu des conséquences directes sur les raffineries, contraintes de réduire leur production. La situation est particulièrement sensible en Europe où la consommation a reculé le plus rapidement. Or, le continent est le premier centre de raffinage dans le monde. 10 à 15% des raffineries européennes menacées Les capacités de raffinage excédentaires sont ainsi passées de 2 à 7 millions de barils par jour, selon l'Institut français du pétrole. Ce déséquilibre devrait encore se poursuivre au moins jusqu'en 2015 puisque plusieurs raffineries géantes doivent être mises en service en Asie et au Moyen-Orient. L'Europe ne pourra donc pas compter sur la reprise de la demande dans des pays comme l'Inde ou la Chine pour éponger ses surplus. Dans ce contexte, l'existence même des raffineries européennes est aujourd'hui menacée. Selon l'Union française des industries pétrolières, 10 à 15% des sites du continent sont condamnés à fermer pour rétablir l'équilibre entre l'offre et la demande. Et si en France la raffinerie de Dunkerque est aujourd'hui dans la ligne de mire du groupe Total, en Italie, l'Union pétrolière italienne a d'ores et déjà averti que quatre à cinq raffineries pourraient bientôt fermer en raison de la forte baisse de la demande. 150 millions d'euros de pertes par mois Mais aujourd'hui, c'est en France que la situation est particulièrement préoccupante. Les six raffineries du groupe Total sont en effet en grève depuis la semaine dernière, et deux unités d'Exxon Mobil devraient rapidement rejoindre le mouvement. La crise, il est vrai, ne date pas de ces derniers mois même si depuis un an, les raffineries françaises perdent en moyenne 150 millions d'euros par mois. Le pays a déjà connu une première vague de fermetures de sites dans les années 80, avec notamment la construction du parc nucléaire qui a provoqué une chute de la demande de fioul lourd, consommé par les centrales électriques. Conséquence, la France ne compte plus aujourd'hui que 12 raffineries contre 24 en 1977. Mais le pays souffre surtout d'un déséquilibre entre la consommation d'essence et de gazole. Favorisé par une fiscalité avantageuse, le gazole représentait à la fin de l'année dernière près de 80% de la consommation de carburants en France. Or, une raffinerie produit au maximum 45 à 55% de gazole, le reste étant de l'essence, du fioul lourd ou du kérosène. Cette situation oblige la France à importer près de 40% de sa consommation de gazole et à exporter ses excédents d'essence. Dans ce contexte, la viabilité des raffineries dans l'hexagone ne peut être que compromise.