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Le groupe Izenzaren brise le silence
Musique
Publié dans La Nouvelle République le 06 - 05 - 2010

Ce fut donc au cœur du village Aït Daoud, au sein de ce grand carrefour d'art et du savoir, qu'avait eu lieu la première rencontre entre ces trois amis alors, qu'ils n'avaient même pas atteint l'âge de l'adolescence. Cette bourgade qui les a vu naître et grandir, recèle des sites naturels dont la splendeur offre au visiteur de passage, plaisir et repos. Elle est perchée sur les hauteurs d'Iyatafène, à proximité d'Akbil et non loin d'Iboudhrarène. Reprenons ce morceau où il rend hommage à ses amis et proches :
Ô voyageur de passage,
Prend la route d'Iyatafène
Va droit dans mon village,
Ce sanctuaire d'Izenzarene
Salue nos jeunes et nos sages
Prends soin de leurs peines…»
Cette contrée de la haute Kabylie, au passé prestigieux pour avoir été l'épicentre de grandes opérations militaires , durant notre lutte armée, avait donné naissance à des sommités aussi bien artistiques que révolutionnaires.
Aujourd'hui comme par le passé, elle ne cesse de subjuguer de ses richesses naturelles, tout visiteur qui s'y rend en le remplissant de caresses rajeunissantes qui lui procurent l'envie de s'y éterniser. C'est un lieu idéal qui permet au poète de mieux rimer et au chanteur de transformer les vers en mélodies attrayantes. Suivons ensemble cet extrait de la chanson «Ayithvir» Ô pigeon :
Prends l'envol ô pigeon,
je t'envoie,
A travers nos monts et nos plaines
Vas droit dans mon village,
Salue nos jeunes et nos sages,
Passe ta nuit sous notre toit
Transmets-leur mon message
Décris-leur tout mon émoi
Bats des ailes et redescends,
Rends visite à me vieille mère
Hantée par de longs tourments.
Elle attend au pas de la porte,
Le retour de son escorte.
Retire-la de sa torpeur,
Pour atténuer sa douleur…».
Au sein de ce village qui les a unis pour le bien et pour le pire, les trois camardes ne parlaient d'autre que de la chanson. Ils rêvaient de devenir, un jour des artistes en mesure d'être appréciés et respectés du grand public. A chaque sortie des classes, Mourad Faouzi et Lekrim, choisissaient des endroits retirés et se mettaient à reprendre des airs de leurs aînés tels, Kamel Hamadi, Cheikh El Hasnaoui, Slimane Azem et bien d'autres encore. Ecoutons notre ami Mourad Ali Mamer, poète et porte-parole du groupe Izenzaren, qui nous retrace en quelques mots comment cette union a pu se concrétiser :
«Tout remonte aux années quatre-vingt où ensemble, nous fréquentions le même collège dans la commune d'Iyatafène. Je me souviens, nous avions les mêmes goûts en matière de musique et de chansons. A la sortie du collège, en dépit même de l'absence de moyens adéquats, mais cela ne nous empêchait pas de nous rencontrer et chanter à même de dissiper le brouillard qui obscurcissait notre adolescence. Alors ensemble, nous fredonnions les chansons de nos cheikhs tels Kamal Hamadi, El-Hasnaoui, Azem, Ferhat Imazighen et bien d'autres qui nous avaient bercés à ce moment -à. Nous faisions de petites randonnées qui nous permettaient de fuir le regard des autres. Et là, nous nous adonnions à de longues séances de préparations avec des instruments de fortune. Certes, même si, sur le plan matériel, nous ressentions une énorme carence, mais, l'amour que nous partagions et le désir d'atteindre le top a fait en sorte à nous faire oublier les manques dont nous souffrions. C'est bien sûr tous ces ingrédients qui nous ont permis d'aller de l'avant et par là même, d'arriver là où nous sommes aujourd'hui. Permettez-moi de vous souligner que nous ne sommes pas un groupe d'intérêt. Nous sommes unis pour détrôner la médiocrité et rehausser la liberté.»
Issus comme bien d autres de familles démunies et sans ressources, avec en charge une scolarité aussi rude que complexe, de par le manque de moyens et les exigences qui s'imposaient pour réussir leur cursus, nos trois amis ne désespéraient tout de même pas. Au contraire, ils travaillent vaillamment, car ils voulaient à tout prix gagner la bataille. Ils ne reculaient devant rien. Les difficultés qu'ils avaient endurées leur avaient permis de mûrir leur vision mais aussi, de prouver par leurs capacités à se frayer une place honorable parmi les artistes les plus respectés de la région. Reprenons ce morceau extrait de la chanson Assefrou Le poème dans lequel il nous parle de la liberté d'expression et de la démocratie qui étaient à cette époque là, les cibles privilégiées de nos responsables qui ne voulaient pas sortir des sentiers battus :
«Qu'il est beau et même sublime,
Fixez-le de vos yeux,
C'est un poème
Composé non,
à l'aide d'une force physique
Ou sous pression d'une amulette.
Il est né, d'une émotion
Ou d'un constat amère
Il est notre repère
Parfois même, une solution,
Dont chacun s'en sert…»
En 1986, alors qu'ils attendaient la mise sur le marché de leur 1er album, nos amis du groupe Izenzarene furent tout de suite choqués par le décès de leur producteur. Ce qui retarda -- pour ne pas dire empêcha -- la sortie de l'album, voire même, sa diffusion. Ecoutons le porte-parole du groupe nous en dire plus sur ce volet :
«Nous avons, certes, enregistré un album en 1986, mais comme le malheur ne vient jamais seul, sa mise sur le marché n'avait pas eu lieu pour cause du décès tragique de notre producteur. Je ne dois pas vous cacher que pour parvenir à la phase d'enregistrement, il avait fallu faire du porte à porte. C'est une véritable tempête qui s'est abattue sur nous. Nous ne savions plus quoi faire. Le peu d'économies dont nous disposions a été versé au producteur. On n'avait pas d'autres ressources qui puissent nous permettre de nous orienter vers un autre producteur. Alors, on n'avait d'autres choix que de nous retirer et attendre. En 2009, sur insistance de proches et amis que je remercie au passage (Farid Ferragui, Youcef, Ifri Musique et bien d'autres encore, nous avons signé un album où nous avons repris quelques titres de celui de 1986.»
«Je compose ma rime
Sur la base des faits.
Envoyez-moi de vos airs,
Une musique douce et fine
Pour habiller mes vers.
De vos airs
Et de mes vers,
J'en ferai une symphonie
Qui envahira les genêts
La Soummam et Thouvirets….»
Fidèles aux traditions ancestrales, ils ne trouvaient aucune gène à dénoncer les abus et l'arbitraire qui s'exerçaient au su et vu de tous. Orgueilleux et pleins d'ambitions, nos trois amis ne baisseront pas les bras. Ils sont toujours là, au devant de la scène pour affronter le spectre de la médiocrité qui a de tous temps hanté notre société. Les obstacles rencontrés durant leur parcours, ne les avaient en aucun cas fléchis.
Au contraire, cela leur avait permis de mettre à l'œuvre leur capacité d'analyse.
En parcourant les titres de leurs albums, on découvre l'étendue de leur attachement au combat identitaire mais aussi à la démocratie constructive que nous recherchons encore. Sur ce sujet, notre ami Mourad nous dit :
«Vous savez, beaucoup d'hommes et de femmes de valeur nous ont quittés. A mon sens, on n'a pas le droit de déchirer les longues pages qu'ils avaient noircies ou d'enterrer l'idéal qu'ils avaient servi et défendu. Ne dit-on pas que la trahison est l'ennemi de tout combat ? Continuions alors le combat pour affaiblir la trahison. Un combat ne se fait pas iniquement avec les armes. Il l'est encore pas l'image et par les mots. On n'a pas le droit de taire ce qui pourrait nuire à notre société.»
Ecoutons cet autre extrait de la chanson Amahvus où il relate l'arbitraire et l'injustice qui s'exerçaient à ciel ouvert sur des jeunes dont la plupart sont des innocents :
«Détenu, dans les geôles de mon pays
Sans avoir commis de délit.
Dites-moi, ô pionniers des libertés
Jusqu'à quand,
Cesseront l'ostracisme et le mépris…
Ô mon cri, rejoins ma mère,
Caresse-la elle m'est très chère
Qu'elle cesse de larmoyer
De souffrir, à trop penser
Fais lui entendre mon désir
De la voir souvent sourire
Qu'elle sache résister
Aux peines éphémères
Pour mieux protéger
Mon fils et sa mère…»
Pour mieux apprécier un produit artistique, il ne suffit pas seulement d'écouter la chanson. Comme chacun le sait, derrière chaque produit, il y a une cause, un chagrin, une peine, en un mot, une blessure profonde en quête d'apaisement. Il va donc falloir côtoyer l'artiste, le provoquer, le bousculer, le décortiquer pour mieux l'évaluer. Contrairement à d'autres qui ont chaviré dans le détroit de la chanson sentimentale, le groupe Izenzarèn lui, fait dans le constat.
Il s'articule sur des thèmes que bien d'autres n'ont pas pu atteindre. Oui, des thèmes qui maudissent le mal et dénoncent l'argent sale.
Le travail accompli par ce groupe, à leur tête, le gardien du temple en l'occurrence, Mourad Ali Mamer, repose d'une part sur la recherche dans le temps et dans les faits et d'autre part, sur le comportement des uns et des autres. Il a pu mieux que d'autres, marier histoire et pédagogie.
Quoi que parfois, on se faisait accompagner de quelques balades musicales plus ou moins excitantes, qui incitent jusqu'à des mouvements de hanches, mais on est vite retenu par le contenu du texte qui relate non une histoire d'amour insignifiante – dont le verbe aimer est parfois même, mal conjugué – mais il nous contraint à scruter avec lui d'une part, la résistance, le défi, la réussite, la fidélité des uns et d'autre part, il nous baigne dans le monde du chômage, de la paupérisation, des harcèlements ou de l'injustice qui caractérisent l'échec des autres.
Reprenons ici, un extrait de la chanson, Arabi Ghorki Dhaoûgh (ô Dieu, c'est toi que j'implore) où il exhorte nos décideurs à plus de respect et à moins de mépris à l'égard des jeunes universitaires dont la majeur partie n'ont pas eu la chance de trouver un job dans une Algérie qui a pourtant besoin de leur énergie :
«ô Dieu, c'est toi que j'implore
Je t'en prie,
Accord es-moi cette grâce.
Toi le Clément, le Symbole
du pardon.
Fais en sorte à m'extraire
De cette boue mystérieuse
Dans laquelle on m'a enfoui
Que ferai-je, ô mon Dieu,
Quand les poches sont au vide ?
Plus d'aliments, en ces lieux
Où les jarres sont arides.
Réponds-moi, ô Clément,
Par un job décent,
Les enfants ont soif et faim
Seigneur de la terre, Dieu du ciel,
Faites pour nous l'essentiel…».
Las, de n'entendre se produire sur nos scènes et radios que des sons effrayants, incompatibles et sans aucune substance artistique, les amoureux de la chansons et musique kabyles ne savent plus sur quel pied danser. La chanson kabyle que bien des hommes et femmes de plusieurs contrées, avaient défendu de leur sagesse et de leurs airs ensorcelants, tend à devenir aujourd'hui, un moyen qui permet à ceux-là même qui abusent du verbe «aimer» de la transformer en simple folklore incitant à des mouvements maladroits, après avoir été durant des lustres, un moyen d'expression et de lutte.
En 2010, le groupe Izenzarène, comme pour manifester une nouvelle fois sa fidélité à répondre aux besoins de ses fans en matière de musique mais aussi de poésie, enregistra un autre album, dont les thèmes traités sont d'une plénitude harmonieuse, avec une subtilité et une finesse qui charment l'esprit.
Au-delà du Burnous ancestral, quand reprend quelques-uns de leurs textes, on y trouve un dynamisme hors du commun, une ferveur d'engagement et une fièvre que l'on se trouve pas ailleurs.
Ce dernier album, de par le message qu'il véhicule, traite des thème parfois percutants mais objectifs. On en citera «Amahvus» (le Détenu»), «Tahya» (que vive…), «Tharguith» (le rêve) et bien d'autres encore qui nous transportent du monde de l'imagination vers celui de la réalité. En l'écoutant, on sent qu'il réalise un accord parfait entre la musique, l'expression et l'idée.
A tous ces rayons qui nous illuminent, à leurs amis, Ghiles, Saïd, Bournane, Djaâfar, Hamid et Youcef, qui sont aussi mes amis, je leur souhaite beaucoup de
courage et de réussite.


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