Telle est la situation en pays anciennement colonisées où, surtout en milieu populaire, la langue de communication est une mosaïque de langues. Cette situation de diglossie et de plurilinguisme nous fait penser ancréole, amalgame de langues d'origines diverses ; cependant la diglossie qui désigne des variantes d'une même langue proviendrait d'une différence de niveaux de langue due en grande partie à des écarts de conditions de vie. On n'a qu'à repenser la différence existant entre les utilisateurs de la langue classique en arabe et ceux qui se limitent à la langue dardja pour communiquer au quotidien. La maîtrise d'une ou de plusieurs langues, en situation de monolinguisme ou de plurilinguisme, laisse supposer un apprentissage de qualité. Discours populaire et discours savant Ces deux types de discours reflètent bien la différence de niveaux de langue de toutes les catégories d'utilisateur d'une même langue. Pour être plus clair, nous dirons que le niveau de langue d'un marchand de légumes dont le niveau scolaire ne dépasse pas celui du primaire et qui ne lit jamais, et celui d'un intellectuel chercheur, sont en net contraste. Ces deux type de discours sont à l'image des variabilités dans la performance de communication langagière et les schémas culturels. Cela correspond à la situation de diglossie qui montre bien la différence des niveaux de langue pouvant exister entre les utilisateurs appartenant à des classes sociales différentes. Bentolina, linguiste de renommée, cite le cas des émigrés d'origines diverses et parlant le français, langue fortement nominative en France. Les discours sélectionnés pour une analyse scientifiquement objective, sont porteurs de marques d'appartenance à différentes cultures. Chacun des locuteurs du milieu émigré a pris l'habitude de la variation des usages qui réponde au critère de l'intercompréhension, de la confrontation aux discours institutionnels, comme celui de l'école et populaires. Les échanges, en situation d'oralité, permettent aussi de tracer des frontières entre bon et mauvais parleurs dans les langues d'origine et la langue du pays. N'oublions pas d'évoquer les critères de bon ou de mauvais parleur en tant qu'étranger dans un pays donné. Ils sont d'ordre sociologique (entre les vieux, les jeunes, il y a une différence de niveau de compétence ou de culture, d'ordre linguistique (la pureté et la richesse du répertoire), d'ordre psychologique (appartenance à une société et conformité à ses traditions). Ceux qui ont travaillé comme chercheurs en matière de langue, dans les milieux des émigrés, ont découvert une distinction entre le français du sénégalais, du marocain, de l'algérien d'un côté, de l'autre le vrai français. Le non-respect des normes d'une langue, sur le plan lexical, syntaxique, phonétique, est dévalorisant pour le parleur étranger en situation d'échanges ; un climat de tension s'installe entre les participants à la communication, si l'un a la maîtrise de la langue alors que l'autre n'est qu'un baragouineur. L'interaction verbale, comme lieu de tension Il y a interaction entre deux interlocuteurs lorsque la réponse de chacun est déterminée par l'intervention ou la question de l'autre. La tension est d'autant plus forte que l'une des parties est en situation de supériorité, par le niveau de langue. Cette situation d'interaction permet ainsi de mettre en évidence la variabilité des discours recueillis. L'échange dans le cadre interactif, peut se faire entre dominant et dominé, ou entre égaux par le statut social ou le niveau de langue. Mais, quel que soit le cas de figure, le participant à un dialogue ou à débat, essaie de donner de lui-même la meilleure image possible. On désigne par dominant quiconque à la maîtrise de la langue ou à la possibilité de parler dans le respect des normes. Pour l'émigré, le niveau de langue du pays d'adoption est déterminant pour les relations avec les autochtones. Les baragouineurs, par contre, souffrent de l'handicap de la langue pour se faire accepter. A l'intérieur d'un pays, lorsque celui-ci est en situation de plurilinguisme, mais de façade, les parleurs utilisent ce qu'on appelle le code switching qui, sur le plan du vocabulaire, est un mélange de mots d'origines diverses. Pour l'Algérien qui discute dans un transport public, au café, ou dans tout autre espace de rencontre, la langue populaire est émaillée de mots tirés du français, de l'anglais, du latin , du turc. Kahwadji viendrait du turc comme tchipa. Teskifiou, verbe s'esquiver conjugué en arabe dardja. Etc.