5/ Les Ghomaras hors des pays du Maghreb : Les Ghomaras (Gomera) ayant participé aux mouvements de l'histoire depuis le VIIe Siècle, on les trouve un peu partout autour de la Méditerranée et plus loin... En Europe et autour de la Méditerranée (Iles Canaries, Espagne, Portugal,...) Aux Caraïbes (République Dominicaine,...) et en Amérique du Sud (Pérou, Brésil,...), le nom de cette tribu, qui a participé à la découverte du Nouveau Monde avec Christophe Colomb et à la conquête du Pérou avec Pizarro, s'écrit : Au singulier : Gomery, Gomerée, Gomrée, Gumery, Gummery, Gomary, Gomero, Gomeiro, Gomori, Gomory, Romary, Romery, Au pluriel : Goméra, Gomara, Gomeira, Gomeros, Gomeiros, Gomerez,... ou encore Roméra, Romara, ... 6/ Saint Augustin, Sainte Monique et la Numidie berbère : Le philosophe, écrivain romain, théologien chrétien et pilier de l'église romaine, saint Augustin, dit Augustin d'Hippone (Aurelius Augustinus) est Berbère. Il est l'un des principaux pères de l'église latine. Hippone en Numidie est l'actuelle ville d'Annaba en Algérie. Après Saint Paul, l'évêque d'Hippone est considéré comme le personnage le plus important dans l'établissement et le développement du christianisme. C'est lui, entre autres, qui a réconcilié la philosophie et les saintes écritures. Il est l'auteur le plus cité du dernier catéchisme universel... Saint Augustin est né le 13 novembre 354 à Thagaste en Numidie, c'est à dire dans l'actuelle ville de Souk-Ahras en Algérie. C'est une petite ville située à 300 kilomètres de la mer. En mars 429, les Vandales partant de la Péninsule ibérique, s'étaient lancés par-delà les Colonnes d'Hercule (l'actuel détroit de Gibraltar) à la conquête de la Maurétanie romaine et de la Numidie. L'évêque d'Hippone meurt le 28 août 430, durant le siège de la ville d'Annaba par les Vandales et leur chef Genséric... On ne peut parler de saint Augustin sans parler de Sainte Monique, sa mère. Profondément pieuse, elle tenait aux pratiques traditionnelles de l'église africaine. Le nom de Monique dérive du nom d'une déesse berbère locale qui s'appelle Mon. Références : Ibn Khaldoun, Histoire des Berbères, Paul le Sept, Nédroma, cité berbère. Gilbert Grandguillaume, Nédroma, l'évolution d'une médina. Hadj Sadok, Al-Idrisi. Rachid Benblal, Histoire des Idrissides : 788-948. Jean-Marc Bastière, article : Saint Augustin assiégé par les Vandales. Les Ghomaras avant l'arrivée de l'Islam Introduction : Je présente la culture et le comportement des Ghomaras, en tant que tribu païenne, avant l'arrivée des Arabes... Certaines attitudes païennes sont restées inculquées dans leurs comportements jusqu'à quelques siècles après leur conversion à l'Islam. 1 - L'historien El-Bekri : El-Bekri (1014-1094) est un historien et géographe d'Al-Andalus du XIe Siècle. 1.1 - L'homme au collier : Parmi les merveilles du pays des Ghomaras, nous annonce l'historien El-Bekri, nous pouvons citer celle-ci : «Chez les Béni Cheddad, branche des Ou-Halaouat, il y avait un homme qui portait toujours sur lui un sac rempli de têtes et de dents d'animaux marins et terrestres ; ces objets enfilés par une corde lui servaient de chapelet. Lorsqu'un individu venait le consulter sur un événement futur ou sur un fait déjà arrivé, il passait ce chapelet au cou de cette personne, en guise de collier, puis il le secouait et l'arrachait avec violence. Flairant alors chaque pièce du chapelet successivement, jusqu'à ce que sa main s'arrêtait sur l'une d'elles ; il répondait à la demande du curieux et lui déclarait le sort qui l'attendait : maladie, mort, gain, perte, prospérité, adversité, chagrin et autres choses de cette nature. Il présidait tout et ne se trompait presque jamais ». 1.2 - Les dormeurs : Le pays des Ghomaras offre un phénomène extraordinaire, nous annonce l'historien El-Bekri : «Des hommes appelés Er-Reggada, c'est-à-dire, les dormeurs ; on les trouve sur les bords de la rivière Laou, chez les Béni Saïd, Les Béni Catiten et les Béni Irouten. L'un ou l'autre de ses hommes-là tombe dans une somnolence qui dure pendant 2 ou 3 jours et il y reste sans se remuer et sans s'éveiller, quand bien même on lui ferait souffrir les douleurs les plus vives ou qu'on le couperait par morceaux. Sorti de son évanouissement le lendemain du 3e jour, il a l'air d'un homme ivre et pendant le reste de cette journée, il demeure tout hébété, sans s'apercevoir de ce qui se passe autour de lui. Le jour suivant, il prédit ce qui doit arriver cette année là : Récoltes abondantes, disette, guerre et autres choses remarquables. Ceci est un fait qui se passe au vu et au su de tout le monde.» 1.3 - Le petit homme au teint jaune : L'historien El-Bekri, nous annonce : «Plusieurs personnes m'ont assuré avoir rencontré, au port de Badis, un petit homme au teint jaune qui jouissait d'une grande considération dans cette localité, parce que disait-on, il avait le pouvoir de faire jaillir de l'eau hors de la terre, même dans les localités où l'on n'avait jamais connu ni source ni puits : Il n'avait qu'à flairer l'air d'un endroit pour pouvoir annoncer la proximité ou l'éloignement de l'eau ». 1.4 - Le jour du mariage : L'historien El-Bekri, nous annonce, chez les Ghomaras : «Au moment où l'homme qui vient d'épouser une fille vierge se dispose à consommer son mariage, les jeunes gens de la localité enlèvent la mariée à la dérobée et la retiennent loin de son époux, pendant un mois ou même d'avantage ; ensuite ils la lui ramènent. Il n'est pas rare que la même femme soit enlevée plusieurs fois de suite ; ce qui lui arrive surtout quand elle se distingue par sa beauté. Plus on la recherche de cette façon, plus elle en est heureuse.» Il continue : «Tout ce peuple est d'une beauté remarquable, les hommes laissent croître leurs cheveux, à l'instar des femmes. Ils en font des tresses dont ils s'entortillent la tête après les avoir parfumées.» 1.5 - L'accueil chez les Ghomaras : El-Bekri continue : «Ils accueillent avec empressement les hommes qui se distinguent par les agréments de leur figure et par leur bravoure… ». 2 - Le géographe Al-Idrissi :Al-Idrissi (1099-1166) est un grand géographe et botaniste du XIIe siècle... il a réalisé la Géographie Universelle pour Roger II, le roi normand de la Sicile. 2.1 - Introduction : Al-Idrissi n'a pas été très tendre envers les Ghomaras, d'abord parce qu'ils n'ont pas réussi à changer assez rapidement leurs mœurs et leurs habitudes païennes, ensuite et surtout parce qu'il hérite des rébellions anciennes une hostilité globale pour les Berbères, nous informent Henri Bresc et Annliese Nef, et plus particulièrement pour les Ghomaras : Après avoir été longtemps fidèles aux Idrissides, ils ont tué son arrière-grand-père, Idris Ibn Yahya Ibn Idris Al-Sami. 2.2 - Le pays des Ghomaras, une chaîne de montagnes : «Le pays des Ghomaras (Ghomara) est un pays de montagnes dont la succession est ininterrompue, couvert d'arbres, un peu comme une jungle. Il s'étend sur un espace que l'on parcourt en trois jours environ. Il confine au midi avec les montagnes appelées Al-Kawakib (les étoiles), qui sont également habitées et très fertiles. Elles s'étendent sur un espace d'environ quatre jours de marche vers l'intérieur, jusqu'auprès de Fès. Ces montagnes étaient autrefois habitées par les Ghomaras jusqu'à ce que Dieu en ait purgé la terre, les ait tous anéantis et ait ruiné leurs demeures à cause de l'abondance de leurs crimes, de leur peu de foi, de leur insolence, de leur entêtement à considérer l'adultère comme un acte licite, de leur éternelle filouterie, de leur habitude du meurtre qui est illicite aux yeux de Dieu quand il est contraire à la justice. C'est le châtiment de Dieu pour les méchants». 2.3 - La ville de Badis au nord-est du Maroc : « Badis est une ville qui a tous les attributs : elle est dotée de marchés et d'artisanats en petit nombre. Les Ghomaras viennent y chercher ce qui leur est nécessaire.» 3 Jean-Léon l'Africain : 3.1 - Introduction : Jean-Léon L'Africain ou Jean-Léon de Médicis (1488 – 1548) dit Al-Hacène Ibn Mohammed Al-Ouzzane Al-Ziyati, est né à Grenade dans le royaume des Banu Al-Ahmar en Al-Andalus. Après 1492, la famille d'Al Hacène Al-Ziyati a émigré à Fès au Maroc. Al-Hacène avait effectué ses études au Maroc et était d'un niveau social assez élevé. Tout jeune, il avait beaucoup voyagé : Tombouctou, Egypte, Constantinople, Tlemcen, Alger, Msila, Tunis, Gafsa, Gabès,… puis à La Mecque. Au retour de son pèlerinage et au cours de l'escale de Djerba en Tunisie (côté Malte et Sicile) il était capturé par le corsaire Sicilien Pietro Bovadiglia et emmené en Italie. Il avait été donné au pape Léon X Jean de Médicis qui l'avait très bien accueilli et fait baptiser des ses propres mains, et sous ses propres noms Jean et Léon, à Saint Pierre de Rome, le 6 janvier 1520.? Ayant appris l'italien, Léon L'Africain avait composé dans cette langue, un ouvrage de géographie intitulé Description de l'Afrique. Ce livre était parvenu à Jean-Baptiste Ramusio qui a réalisé sa première publication au XVIe siècle, et plus précisément en 1550, à Venise. Le séjour de Jean-Léon L'Africain en Italie est mal connu : Acheva-t-il sa vie à Rome ? ou quitta-t-il l'Italie pour se rendre à Tunis, comme il en avait formellement exprimé l'intention ?... - Présentation des tribus Berbères en Afrique : Dans son livre Description de l'Afrique, Jean- Léon l'Africain nous annonce : «Les Africains blancs sont divisés en cinq peuples : Les Senhadjas, les Masmoudas, les Zénatas, les Houaras et les Gumeras (Ghomaras)… Les Gumeras (Gomaras) habitent les monts de Maurétanie, c'est-à-dire ceux qui bordent la Méditerranée. Ils occupent la côte qui porte le nom de Rif et qui commence aux Colonnes d'Hercule (Détroit de Gibraltar)… ».? 3.3 - Les Ghomaras (Gumera), les Houaras et la langue arabe : Léon l'Africain nous informe : «A peu près tous les Gumeras emploient l'arabe, mais un arabe corrompu. Beaucoup de tribus de race Houara parlent aussi l'arabe corrompu. Cela résulte du fait que ces gens sont depuis longtemps en relations verbales avec les Arabes ». Jusqu'à nos jours, l'arabe parlé dans la rue, dans les pays du Maghreb, est différent de celui employé en Egypte, Syrie, Jordanie, compte tenu qu'il s'agit d'une langue mélangée d'arabo-hispano-franco-berbère". Références : Abou Obeïd El-Bekri, Description de l'Afrique Septentrionale. Ibn Khaldoun, L'histoire des Berbères. Al-Idrissi, La Première géographie de l'Occident – Présentation de Henri Bresc et Annliese Nef. Jean-Léon L'Africain (Al-Hacène Ibn Mohammed Al-Ouzzane Al-ziyati), Description de l'Afrique.