Colère, indignation, révolte. Tels sont les sentiments qu'inspirent ces offensives monstrueuses à répétition, véritables crimes contre l'humanité, commis contre un peuple dont on s'efforce de nier l'existence et qui, six décennies durant, est arrivé à tenir tête à la plus grande coalition mondiale. Profondément irrité par la médiatisation outrancière de cette énième agression barbare, frustré et exaspéré par la couverture partielle et partiale des événements, il me semble essentiel de dénoncer, encore une fois, le dérapage permanent de l'information et les tares d'un système médiatique mondial qui, par ses défaillances et ses effets pervers, constitue une entrave au droit de l'être humain à une information honnête et sans fioriture. Informer, c'est raisonner, expliquer, convaincre, choisir, nous dit-on doctement, et choisir est un acte politique par excellence, un acte responsable et réfléchi. Or, en ouvrant bien, les yeux on constate que les médias, instrument de rapprochement, selon l'étymologie du mot, se transforment, chaque jour un peu plus, en matrice idéologique. On pensait le paroxysme de la supercherie atteint avec les perversions médiatiques à Timisoara, au Panama et en Irak. On s'était trompé. Les grandes bavures de ces dernières années le prouvent aisément. Manipulation, déformation de l'information et trucage de la réalité sont aujourd'hui des évidences. Les forces politiques, économiques et sociales, les groupes de pression et plus particulièrement les trusts internationaux(1) en faisant main basse sur tous les moyens d'information, ont une grande part de responsabilité dans ces dérives. Limiter cependant la dénonciation à la seule inconscience, voire à la mégalomanie des médias occidentaux et masquer nos propres lacunes ne serait pas juste. Nos erreurs de parcours sont tout autant dommageables. Tous les pouvoirs, d'ailleurs, ont la même tentation : verrouiller l'information et limiter la liberté d'expression. Là où le bât blesse, c'est lorsque les pays qui s'autoproclament chantres de la démocratie accusent un déficit flagrant en matière d'éthique et de déontologie. C'est précisément le cas d'Israël et de ses affidés qui faisant preuve d'un cynisme évident, pratiquent le black-out médiatique total ou cèdent au jeu de la transparence opaque. Tsahal, sans état d'âme, mène une guerre sans merci, aérienne, terrestre et navale, contre un peuple entassé dans un ghetto à ciel ouvert, qui rappelle étrangement celui de Varsovie. Faisant fi des « dommages collatéraux », la soldatesque sioniste n'hésite pas à tirer des obus et des missiles à partir de bateaux et d'avions. Elle assassine des gens depuis des hélicoptères et fonce avec des tanks sur une population désarmée, contrainte à survivre sans nourriture, sans eau et sans médicaments depuis des années. Tellement persuadée de son bon droit, Tsahal, qui a une sainte horreur du regard des caméras durant ses basses besognes, préfère interdire le théâtre des opérations aux journalistes et leur offrir gracieusement des images soigneusement canalisées, triées et aseptisées des carnages qu'elle provoque. Avant même le début des hostilités, l'appareil médiatique a été verrouillé et l'establishment journaliste mis au garde à vous. Cédant aux intimidations et aux pressions, ces derniers acceptent de reproduire in extenso les citations des porte-parole, sans précaution de langage et sans vérification. L'indulgence coupable à l'égard de l'Etat hébreu laisse perplexe. Comment un journaliste peut-il s'abstenir de dénoncer et de poser les questions qui gênent lorsque l'interlocuteur est Israélien ou pro-Israélien ? Tout cela montre bien que la frontière entre la connivence et la pression demeure fragile. Pour engluer les médias et exercer une influence pernicieuse sur les journalistes, les descendants de l'holocauste sont devenus des spécialistes de l'intox et de la manipulation des consciences. « Gouverner, c'est faire croire... Il faut paraître car le peuple se prend souvent aux apparences et ne juge que par l'événement », écrivait l'homme qui a lancé les bases théoriques de la propagande. Barak, Livni et Olmert semblent avoir bien retenu la leçon de Nicholas Machiavel. L'offensive contre Gaza la veille d'élections essentielles pour Israël ne trompe personne. Le flagrant délit de mensonges, de pagaille, de confusion et d'embrouille témoigne du danger que représentent ces prédateurs. Hors Israël, les patrons de presse veille au grain et se plient aux exigences de leur tuteurs. Si entre TF1 et France2, on ne sent pas une nette différence dans le traitement de l'information, on ne peut en dire autant au niveau de la presse écrite où on peut facilement repérer l'appartenance idéologique du chroniqueur. Dans leur quasi-totalité les titres de presse français ont fait campagne pour Israël et se comportent comme des acteurs politiques partisans. Le totalitarisme du mal qu'incarne Israël aujourd'hui, après le nazisme hier, fait que les journalistes n'osent plus écrire, penser, dire à haute voix. Israël faisant partie de la caste des intouchables, ses exactions sont mises en veilleuse, et ses gaffes dissimulées. Les médias se gardent bien de montrer les images de cortèges qui manifestent pacifiquement contre Israël. Ils préfèrent, comme à Paris, s'attarder sur des voyous casseurs, que la presse partisane assimile vite à des pro-Palestiniens. Mais si l'aviation israélienne cible et détruit la Tv palestinienne, des écoles, des mosquées, des domiciles et des structures administratives, le journaliste minimisera les dégâts. Quel média a eu le courage de parler de tous ces enfants assassinés en l'espace d'une semaine ? La réalité est dissimulée. La vérité subit des distorsions. Les boucs émissaires tout désignés. Qu'à cela ne tienne, les Israéliens en campagne vont par la propagande et l'agitation créer l'événement, au prix de milliers de morts et de blessés palestiniens, tout comme Hitler qui disait : »La propagande nous a permis de prendre, conserver, et étendre notre pouvoir ». Sur les plateaux TV, les vrais débats se font rares. Le jeu se trouve pipé dès l'annonce des invités, pour la plupart des chroniqueurs défenseurs d'Israël qui accaparent l'essentiel du temps de parole (2). Les glissements sémantiques sont nombreux et sous prétexte de temps limité, on omet complètement certains faits, on en tronque d'autres, alors qu'on laisse s'hypertrophier de façon verbeuse des commentaires politiques oiseux. Hamas, élu démocratiquement est diabolisé, tout comme les résistants palestiniens traités de terroriste. Par ces partis pris manifestes, la télé a compromis sérieusement son objectivité. Cette nouvelle guerre menée par Israël contre les Gazaouis n'a rien d'un événement. Elle est la répétition depuis 60 ans d'un événement permanent. Ce qui stupéfait de plus en plus c'est la tétanie générale. Alors que la liste des morts et des blessés palestiniens ne cesse de s'allonger dans Gaza assiégée, certains journaux télévisés préfère éviter le drame humanitaire qui se profile et consacrer leurs manchettes aux potins sans importance. Il est somme toute trop tôt pour tirer des conclusions, mais cette deuxième semaine d'hostilités nous permet d'appréhender la réalité avec la responsabilité qu'exigent la lucidité et le réalisme. Le premier constat à faire est que dans leur globalité, les médias occidentaux ont, encore une fois, failli à leur mission, tout comme lors des précédentes agressions contre l'Irak et le Liban. Les menaces sont sérieuses et les répercussions profondes. Même si l'offensive israélienne contre les Gazaouis venait à cesser, une chose est certaine, cette guerre hégémonique sera longue. Obama, tout comme Bush, ne cesse de souligner son soutien indéfectible à l'Etat hébreu. Les puissants vont continuer à imposer leur perception du monde, leur raisonnement et leur manière d'appréhender la réalité. Au service de la stratégie occidentale, et sous la férule du Pentagone, les journalistes se sont habitués à l'uniforme militaire. Que peuvent faire les citoyens démunis et muselés face à cette armada et à tous ses instruments dits d'information qui, tels des gaz chimiques, anesthésient, troublent et perturbent une opinion publique inquiète dont on veut affaiblir la détermination ? Question lancinante, à tout le moins épineuse que nous ne cessons de nous poser. Considérons le phénomène, non dans son aspect sectoriel, mais dans sa globalité. Si la guerre des médias est menée comme on mène une opération militaire, ce n'est point sous l'effet d'une simple coïncidence. Les mécanismes informels qui font intervenir les valeurs de l'idéologie des peuples dominants doivent être mise à jour si l'on veut esquisser une stratégie anti-idéologique. Pour ce faire, il faut tout d'abord de circonscrire le champ de l'idéologie ; ensuite, savoir ce que l'on combat pour enfin arriver à dévoiler la mystification. Ce n'est qu'ainsi que le réel caché, daigné, déguisé ou aseptisé par les médias occidentaux peut être exhibé. Mais, comment générer une dynamique de changement et mener des actions de conscientisation alors que les médias arabo-musulmans se trouvent plongés dans un coma profond. L'occasion pour l'Algérie et nombre de pays solidaires des Palestiniens et des Irakiens n'a pas été saisie. Ils n'ont pas su monter au créneau et dévoiler aux yeux du monde le jeu sordide et machiavélique des Israéliens ? Pourtant ces pays ne manquent ni de chaînes satellitaires, ni de médias sophistiqués, ni de techniciens compétents. Le combat politique se joue aujourd'hui avec les médias. Cela implique une attitude critique et sans ambiguïté face à toutes les images que nous distillent les médias. Cela oblige aussi à une mise en évidence et approfondissement les rapports entre l'image et la réalité représentée, entre le contenu et la forme de représentation et cela, afin d'aider ceux dont la prise de conscience est encore insuffisante et qui peuvent réagir à partir d'impulsions purement émotionnelles. ------------------------------------------------------------------------ Notes : 1) Edouar de Rotshild (Libération), Arnauld Lagardère ((Europe 1) Serge Dassault, Martin Bouigues,... 2) Max Gallo, Elisabeth Levy, Paul Nahon, Alain Finkielkraut...