Ce que nous ne voulons pas comprendre, c'est que les temps ne sont plus les mêmes. Nous ne sommes plus à l'ère de l'improvisation ou de l'élan patriotique et elle est loin en arrière cette période des slogans trempés dans de niais sentiments. Nous sommes à une époque du développement de la civilisation humaine où la réalité est autrement conçue qu'il y a des siècles et elle est mieux cernée qu'il y a une dizaine d'années. Les nations se développent tout en prenant soin d'améliorer leur gestion des affaires du pays et des citoyens. Il n'y a plus de place, dans le traitement des questions liées au devenir des sociétés, à l'à-peu-près ou à la spontanéité. Quel que soit le niveau auquel s'inscrivent nos décisions, il y a lieu de comprendre que, de nos jours, quand on gère, il faut gérer. Laissons donc de côté ces gesticulations archaïques accompagnées de sourires et de slogans qui ne durent, en fait, que le temps d'être débités. Laissons tomber les longs discours vains et trop creux et regardons-nous en face. Nos dirigeants sont trop vieux pour gérer une jeunesse devenue sourde à des appels superficiels et insensible à des mensonges éhontés. Ils sont trop lents pour pouvoir accompagner les changements qui secouent le monde. Ils sont aussi, trop collés à des pratiques archaïques, mille fois périmées, et ils ne peuvent, de ce fait, ni promouvoir l'art de gérer ni le pratiquer eux-mêmes. Aussi, sommes-nous condamnés à entendre les éternels refrains chantonnés, depuis les années soixante, par des voix si rouillées qu'elles ont fini par être inaudibles. Depuis longtemps, c'est à coups de stratégies successives qu'avancent les pays. Des stratégies sérieuses qui n'ont, évidemment, rien à avoir avec les discours mal rangés et les plans mal maîtrisés. Toute société qui veut aller de l'avant s'appuie sur sa jeunesse, sur ses intellectuels, ses cadres... les vrais, pas les pseudos, pas les faux, pas ceux qui font plus charlatans qu'autre chose ! Si l'on continue à improviser de la sorte, si l'on décide du sort d'un secteur, d'une industrie, d'une génération, en tentant des coups d'éclat en réalité éphémères, nous ne pouvons pas mener loin le pays. S'il faut continuer à gérer en fonction des hommes, des humeurs, des campagnes... mieux vaut parler d'autre chose que de la gestion car il n'est point question de gestion. De stratégie, il n'est bien sûr pas question. Et même cette improvisation qui nous colle à la peau devient beaucoup plus une plaisanterie de mauvais goût qu'autre chose.