En l'absence d'activités festives et d'intermèdes récréatifs de nature à tromper l'ennui estival, certains Souk-Ahrassiens se sont découvert, ces derniers temps, un dada fort original. Il s'agit, vous ne l'aurez jamais deviné, de l'incinération, méthodiquement et régulièrement entreprise, des déchets domestiques. Sans demander l'avis de personne, surtout pas celui des autorités, des «pyromanes» à visage découvert s'adonnent en plein jour et sans scrupule aucun, à un infâme acte d'agression caractérisée sur le voisinage et sur l'environnement. En mettant le feu aux décharges qui ne désemplissent pas, en dépit des collectes effectuées par les services communaux, ces incendiaires inconscients provoquent des dégâts souvent irréparables dont pâtissent les riverains, ceux souffrant de problèmes respiratoires et les personnes âgées, notamment, contraintes de se terrer chez elles pour espérer échapper aux écrans de fumée qui se forment jusqu'à l'intérieur des résidences. Cette manière incivile, irresponsable et dangereuse de faire vient appuyer la thèse qu'à Souk Ahras, tout est permis. Il suffit d'oser pour concrétiser les idées les plus morbides qui soient. Comme celle d'incendier - un acte répréhensible puni par la loi - des parcelles de terrain situées dans une zone d'habitation sans se soucier des conséquences pouvant en découler... Le silence étrange et incompréhensible des pouvoirs publics face à ce phénomène a encouragé beaucoup de citoyens à faire de même. Pire: cette atteinte multipliée et démultipliée au voisinage, à la nature et aux lois de la République est si banalisée, si «normalisée» qu'elle échoit désormais aux enfants qui prennent le relais des parents en se mettant eux aussi de la partie. Il n'est pas du tout anodin, en effet, de voir des charretées de bambins partir à l'assaut des ordures ménagères concentrées dans un coin du quartier, mais aussi des herbes sauvages qui envahissent les cités pour ensuite les brûler dans la bonne humeur et la jovialité de celui qui accomplit consciencieusement un devoir quelconque. Interrogé à ce propos, le maire de la ville, M. Fettar, reconnaît la gravité du phénomène: «Les auteurs de ces actes condamnables sont coupables de voie de fait sur les personnes, les biens et la nature. A ce titre, ils sont passibles de peine judiciaire comme c'était le cas, il y a peu lorsqu'un citoyen a comparu devant la justice pour s'être adonné au même jeu dangereux. Je rappelle à cette occasion à tous les habitants de notre commune qu'il est interdit d'incinérer quoi que ce soit sans l'avis des autorités. Un arrêté wilayal existe qui réglemente ce type d'action et il n'appartient à aucun citoyen de le faire de son propre chef. Ceci dit, nous comptons sur la vigilance et l'esprit de civisme des citoyens pour dénoncer tous les contrevenants car la commune ne peut pas avoir l'oeil partout...» Vrai ! Même s'il n'est pas moins vrai que les collectivités locales (commune, wilaya) ont l'obligation de garantir la protection des biens, des personnes et de la nature des atteintes cogitées et exécutées par les insoumis aux lois. La loi qui «ne vaut que lorsqu'elle est appliquée», dixit un bel esprit. Or, à quoi assistons-nous, chez-nous, sinon au piétinement renouvelé des textes via des pratiques d'un autre âge qui croissent à l'ombre d'une horrible permissivité laquelle fonde sa supposée légitimité sur les impératifs d'une paix sociale qui expliquerait et justifierait tout. A contrario, ne sommes-nous pas en droit de crier à l'ébranlement de cette même paix sociale via les violences faites au citoyen au moyen d'une foule d'expédients aussi violents, aussi pernicieux.