«Nous sommes pris en otage par les commerçants !». Cette remarque, remplie d'aigreur et d'amertume, s'est transformée en litanie ressassée au quotidien à travers tous les marchés de la ville. Dans ces enceintes en folie, et à une dizaine de jours du mois de Ramadhan, les prix des viandes rouges et blanches affichés culminent ces derniers jours pour atteindre des pics jamais égalés. Cette situation de fait aura poussé la majeure partie des consommateurs à faible revenu à se rabattre sur les viandes congelées et sur les viandes issues de l'abattage clandestin. Toujours est-il que ni les associations de défense du consommateur, qui ne possèdent aucun pouvoir coercitif, ni les services du commerce ne semblent en mesure de faire bouger les choses pour tenter un tant soit peu d'endiguer ce vent de folie qui s'est emparé de la majeure partie des marchands de légumes et des viandes. Sur le sujet, un cadre de la direction du commerce nous confiait, voilà quelques jours, que «toute action sur le terrain était vraiment périlleuse et que pour toute intervention, les agents de la DCW devaient être accompagnés par des éléments de la police nationale ou de la gendarmerie». Toujours du côté de la DCW, un cadre met l'accent sur «le rôle trop passif à ses yeux de certains consommateurs». Pour ne citer que les viandes congelées, notre interlocuteur précise que «tout client potentiel a le devoir d'attirer l'attention des services de la DCW pour leur signaler tout défaut d'étiquetage ou manquement dans les conditions d'hygiène.» A une semaine du début du Ramadhan, c'est la période habituelle où les ménages entament la période dite du ravitaillement. A ce sujet, une mère de famille explique qu'elle a toujours pour habitude de constituer un petit stock de nourriture afin d'éviter les marchés les premiers jours du Ramadhan. En plus des légumes dont les prix sont passés du simple au double, il faut faire bouillir la marmite et agrémenter la chorba avec quelques morceaux de poulet ou de viande rouge. Mais voilà que ce même poulet vient de dépasser les 360 dinars et que la viande rouge est devenue tout bonnement inaccessible. Le mouton, généralement très abordable au niveau de la vieille ville (Souika), était hier proposé à 560 dinars, alors qu'il est vendu 680 dinars au marché Bettou (ex-Ferrando), connu pour ses prix prohibitifs. Si vous désirez une grillade, le bifteck oscille entre 800 et 900 dinars, la viande hachée est cédée à 700 dinars, en attendant de culminer à 800 dinars dans quelques jours ! Pour cette raison de cherté, revoilà que les viandes congelées reviennent «à la mode». Celles-ci, écoulées entre 320 et 340 dinars voilà seulement quelques jours, se sont vu pousser des ailes pour dépasser les 400 dinars. Mais c'est surtout l'abattage clandestin qui a la part belle en s'érigeant en maître absolu dans certains quartiers très populeux et plus spécialement au niveau de la vieille ville, des faubourgs de Benchergui, El-Gammas, Aouinet El-Foul et Oued El-Had particulièrement, où, dit-on, foisonnent des abattoirs clandestins, avec des conditions d'hygiène que nous pouvons deviner et les risques encourus par le consommateur.