«Belles Sources», «El-Annassers» (les Sources), Echarchar, Boutektoune, Aïn Berkouk, Aïn Sefra El-Hamama, quelques noms de lieux encore à l'usage par les populations mais qui au fil des années sont devenus des noms vides de sens car si ces signifiants avaient pour signifiés l'abondance de l'eau dont beaucoup de Milianais d'un certain âge se souviennent, on vous citera à titre d'exemple que l'eau était tellement abondante et coulait avec une telle force qu'elle faisait fonctionner le broyeur géant de minerai de la manufacture d'armes de l'Emir Abdelkader, et que la première centrale hydroélectrique de la région construite au début des années 1900 par le pouvoir colonial pour faire fonctionner l'extraction du gisement de fer qui était exporté en direction des usines se trouvant de l'autre côté de la Méditerranée, pour les jeunes, aujourd'hui, ces noms ne veulent plus rien dire. Ces sources se sont taries comme frappées d'une malédiction. Et l'eau, source de vie, se raréfiant, les rus et ruisseaux asséchés, les jardins florissant jadis, en cascades descendant vers la vallée, ont vu leurs productions vivrières, arboricultures et maraîchages, dont les surplus étaient vendus dans les marchés de la plaine en contrebas, s'éteindre progressivement. Plus d'eau... plus d'activités agricoles, paupérisation des populations déjà modestes, la disparition des anciens, le départ des jeunes, vivre sous d'autres cieux. Conséquence inéluctable, la raréfaction des ressources hydriques a entraîné un bouleversement du paysage: la verdure a fait place au béton et une urbanisation forcenée a ouvert la porte à des constructions à plusieurs dalles qui ont poussé comme des champignons. Aujourd'hui, que reste-t-il de ce passé où l'on comptait pas moins de 24 sources disséminées à travers le territoire de la commune, où les enfants petits et grands ne se décourageaient pas pour faire les 10 km de côte à partir de Khemis Miliana pour aller à la piscine située sur la route qui mène vers Aïn Torki, une piscine qui n'était en fait qu'un vulgaire bassin dont l'eau courante servait en coulant à travers tout un réseau à irriguer les jardins florissants en contrebas, par simple gravitation, jusqu'à Zougala Aujourd'hui la commune de Miliana compte quelque 46.000 habitants et dans les foyers les robinets sont devenus avares: 1 h le matin et 1 h le soir, affirment nombre de citoyens de plusieurs quartiers même du centre-ville. Certains habitants du côté Est de la ville de Miliana demeurant avant la route menant à Sidi Braham sont encore bien moins lotis avec une heure d'eau tous les 3 jours, le temps de se faire des réserves. Idem pour les habitants du quartier Chellal: un employé de la direction de l'Education affirme que le robinet ne coule qu'une heure par jour et très tôt le matin. Comment en est-on arrivé là ? Unanimement on reconnaît que l'eau «s'est éclipsée» au lendemain du bouleversement géologique induit par le séisme d'octobre 1980 qui avait touché principalement Chlef mais dont les ondes souterraines ont dû apporter des modifications importantes au niveau des nappes aquifères, le tarissement de la source thermale «Hammam Bounedjma» près d'El-Attaf et la remontée des eaux salées qui a affecté gravement les nappes d'eau douce d'El-Attaf, salinisation qui s'étend selon de nombreuses études en direction du nord vers El-Abadia Par ailleurs, il faut reconnaître que si le séisme a été pour beaucoup dans cet état de fait, les services concernés n'ont pas beaucoup investi dans la recherche de nouvelles ressources hydriques. Actuellement la commune ne dispose que de 6 forages, 2 à Oued Rihane, 2 à Boutektoune, 1 dans le secteur des Belles Sources et un autre à El-Hamama à l'Est de la commune qui débite une eau dont le taux de turbidité est très élevé, le débit global étant de 120 litres par seconde, soit 20 litres par personne et par jour. Un 7ème est en cours de réalisation, nous a-t-on indiqué sans plus de précision. A ce manque de ressources hydriques pour l'AEP, vient s'ajouter l'état du réseau de distribution qui a fait son temps, les conduites datent des années 50. Selon Koumas Fadhela, l'ingénieur chargé du réseau au niveau de l'APC de l'AEP, «le réseau de distribution est en état de dégradation avancé et les matériaux sont hétéroclites, selon les secteurs on a de la fonte, de l'acier, du PVC et même des conduites en amiante dans le centre-ville et les fuites sont partout». Notre interlocuteur a évoqué 3 sources situées sur le territoire de la commune de Miliana: la source Pizzani tarie depuis octobre 1980 à la suite du séisme et la conduite en acier qui devait acheminer de l'eau vers Khemis Miliana n'a jamais servi, les sources Aïn Soltane et Aïn Sefra situées au sud de Zougala et qui continuent avec un faible débit à alimenter les quartiers nord de Khemis Miliana, 3 km en contrebas jusqu'à Aïn Rekaba (fontaine des Cordonniers) située sur la rue Belsaadi Abdelkader. Renseignement pris auprès du service des eaux de la commune de Khemis Miliana, on affirme, preuve à l'appui, que ces sources ont été acquises par actes notariés par la commune d'Affreville auprès de la commune de Miliana. Cependant de l'avis des responsables de l'ADE, Ali Kadi et Hamou, la commune de Miliana recèle dans son sous-sol d'importantes nappes aquifères qui ne demandent qu'à être exploitées et de citer l'exemple de la source Aïn Berkouk entre Zougala et Miliana dont les eaux continuent à se perdre dans la nature et qui pourtant pourraient donner un débit allant jusqu'à 10 l par seconde, de quoi alimenter tout le secteur sud de la commune et permettre ainsi à la zone nord de disposer de plus d'eau Il faut noter aussi que si l'eau manque dans la ville de Miliana, ville que l'on qualifie «ville d'Arts et d'Histoire», cela ne relève pas des compétences de la commune car cela nécessiterait de gros moyens financiers auxquels l'APC ne pourra pas faire face, ni même l'Agence de distribution de l'eau qui vient depuis peu de «prendre les choses en main». Cela nécessiterait l'intervention du secteur de l'Hydraulique. A noter aussi que Miliana n'est pas la seule commune à vivre cette situation car dans la commune de Djelida la situation reste encore plus critique.