L'installation prochaine d'une instance nationale de lutte contre la corruption, et le traitement des grandes affaires pénales dévoilées dernièrement ont été au centre de l'intervention jeudi devant les parlementaires du ministre de la Justice, M. Tayeb Belaïz. Les grandes affaires de crime, d'homicide volontaire ou de corruption sont traitées par la justice au même titre que les autres affaires pénales, c'est-à-dire avec le principe de présomption d'innocence dont bénéficie tout accusé, selon la loi. C'est en filigrane le message du garde des Sceaux lors de cette séance de questions orales. Le ministre de la Justice était particulièrement questionné sur les enquêtes judiciaires menées dans certaines affaires de corruption qui ont ébranlé le sérail politique et éclaboussé de grandes entreprises nationales, à l'instar de celle récente qui a terni l'image de marque de Sonatrach, ou le meurtre du directeur général de la Sûreté nationale, le regretté Ali Tounsi. Belaïz était sous les feux des questions des députés alors que son secteur traverse une période pour le moins «faste» en affaires et scandales économiques. Pour Belaïz, et quelle que soit l'ampleur de l'affaire que la justice traite, il faut absolument respecter «le principe de la présomption d'innocence dont jouit tout accusé jusqu'à preuve de sa culpabilité». «Jusqu'à preuve de sa culpabilité, chaque accusé jouit, dans le cadre des libertés individuelles, du principe de la présomption d'innocence». Il précisera, lors de son intervention devant les parlementaires, que «le ministre de la Justice, en sa qualité de premier responsable de la politique pénale, est habilité à saisir le ministère public et lui dicter les procédures qu'il juge utiles». C'est une précision de taille, et qui a son poids dans le traitement et la gestion de certaines affaires sensibles qui vont, certes rarement, au-delà de la compétence de la chancellerie. Et, pour donner des chiffres sur les affaires liées à la corruption, le ministre de la Justice a indiqué que 5.575 personnes ont été poursuivies et condamnées pour des affaires liées à la corruption entre 2006 et 2009, réaffirmant la «ferme volonté politique de l'Etat à lutter contre la corruption sous toutes ses formes». Il indiquera à ce sujet que l'Etat a mis en place des mécanismes et des moyens de prévention qui ont permis de révéler ce nombre considérable d'affaires de corruption. Ainsi, 930 personnes poursuivies dans des affaires de corruption ont été jugées en 2006, et ce nombre est passé en 2007 à 1.789 personnes jugées, puis 1.694 en 2008 et 1.162 condamnées en 2009. Beaucoup d'affaires liées à la corruption sont en cours de traitement, selon le ministre de la Justice, qui a souligné que le taux le plus élevé de délits de corruption est enregistré dans des affaires de dilapidation des biens par un fonctionnaire public avec 55,16% des délits. Le taux des affaires de corruption liées à la passation frauduleuse dans les marchés publics est de 11,37 %, alors que le taux de fonctionnaires corrompus a atteint 10,98 % du taux global des crimes liés à ce fléau, selon M. Belaïz, qui a révélé que «des pôles spécialisés de lutte contre la corruption ont été mis en place», outre la formation des magistrats de jugement et d'instruction et les procureurs généraux dans ce domaine. Et, bien évidemment, comme les affaires de corruption sont devenues le plus gros morceau que la justice algérienne traite actuellement, le ministre a rappelé la réhabilitation de la Cour des comptes pour contrôler les dépenses publiques, avant d'annoncer la prochaine installation de l'instance nationale de lutte contre la corruption, outre la révision du code des marchés publics. Enfin, le taux de criminalité au niveau national entre 2006 et 2008 a baissé à 5,53%, selon le ministre qui a indiqué en outre que la baisse du taux global des meurtres commis avec préméditation et des homicides volontaires au niveau national a atteint 76,64 % entre 2006 et 2009. Selon les chiffres du ministère de la Justice, en 2006 le nombre des meurtres commis avec préméditation a atteint 1.166 crimes contre 159 en 2009, soit une baisse de 86,33 %, et 254 homicides volontaires ont été recensés en 2006 contre 172 en 2009, soit une baisse de 32,25%.