Les exercices de communication aux-quels se livre de temps à autre le gouverneur de la Banque centrale sont toujours intéressants. Sur le plan formel, les formules très techniques dont il émaille son discours sont devenues, au fil des années, une sorte de marque de fabrique du gouverneur de l'institut d'émission. Au-delà d'une réponse indirecte sous forme de leçon d'économie au ministre Abdelhamid Temmar sur la Constitution et le rôle des réserves de change, la communication, savamment exprimée, ne révèle rien de neuf sur le fonctionnement et l'orientation de l'économie algérienne. A l'adresse de ceux qui réclament le «rapatriement» des réserves, le gouverneur rappelle que le dinar est garanti par les réserves de change et que «la contrepartie de ces réserves de change se retrouve dans l'économie nationale au niveau des dépôts de Sonatrach auprès de la Banque extérieure d'Algérie (contrepartie de cessions des recettes d'exportation d'hydrocarbures non utilisées), des dépôts de l'Etat dans ses comptes tenus sur les livres de la Banque d'Algérie (part de la fiscalité pétrolière non dépensée) et des dépôts des autres agents économiques non financiers auprès des banques». L'argent disponible pour l'investissement existe déjà dans le pays. Mais ce faisant, le gouverneur confirme - ce n'est pas un scoop - que l'économie et la monnaie nationale sont fondées intégralement sur les hydrocarbures. Le dirigisme de la gestion économique, l'isolement relatif de l'économie algérienne et sa dépendance aux hydrocarbures l'ont bien servi l'année dernière. Alors que les économies de très nombreux pays ont souffert de la perte de confiance des marchés et de la crise du crédit, l'économie nationale a continué malgré tout à croître, toujours trop faiblement, en 2009. Mais contrairement à de nombreux pays, l'Algérie n'a pas accès au crédit et ne dispose pas des mécanismes de marché susceptibles de permettre un minimum d'auto-stabilisation. Dans une telle situation et compte tenu de la dépendance absolue aux exportations de pétrole, l'Algérie doit impérativement conserver des niveaux élevés de réserves de change. De fait, si les prix du pétrole venaient - à Dieu ne plaise - à chuter durablement, l'Algérie serait confrontée à de sérieuses difficultés en l'absence de réserves significatives en devises pour amortir l'ajustement. Le scénario de la fin des années quatre-vingt est encore frais. Ainsi, dans la perspective de la Banque centrale, le gouverneur Laksaci a tout à fait raison d'être satisfait du niveau des réserves de change et a beau jeu d'insister pour que la politique de niveaux élevés de réserves soit poursuivie. Mais pour certains mauvais esprits, le discours sur l'importance cardinale de ces réserves est un clair aveu d'immobilisme. Les nécessaires réformes structurelles de l'économie réelle ne sont toujours pas à l'ordre du jour.