«Je vous assure que j'ai honte quand un ami vient jusqu'à chez moi car la route est devenue si défoncée que j'ai peur qu'il y laisse ses amortisseurs, ou plus encore». « Bien sûr, il n'y a personne parmi les élus de l'APC qui habite par ici, sinon on aurait déjà eu notre part d'aménagement urbain», ou encore: «nos enfants pataugent dans des égouts à ciel ouvert et personne ne s'en émeut», telles sont les paroles désabusées de la plupart des habitants du quartier Youssef Chérif, situé à la périphérie de la ville de L'Arba. En effet, c'est un des quartiers les plus denses en habitants et le plus ancien parmi ceux créés après l'indépendance mais, pour des raisons diverses, il est resté le parent pauvre de toutes les opérations de réhabilitation qui ont été menées à travers la ville et même en dehors. Déjà lorsqu'on arrive à ce quartier la route, complètement détruite donne l'impression de vous repousser; les ornières pleines d'une eau boueuse sont aussi grandes que des mares et les véhicules slaloment pour ne pas y tomber. Un peu plus loin et juste après avoir dépassé l'école primaire, nous nous retrouvons face à un véritable égout à ciel ouvert qui, en plus, déverse ses eaux noires et nauséabondes sur la chaussée car la canalisation est bouchée et personne n'a pensé à la dégager. Quelqu'un a déposé une palette en bois qu'empruntent les passants pour ne pas patauger dans la gadoue mais les enfants, au sortir de l'école, y vont en plein dedans car ils ne mesurent même pas le danger auquel ils s'exposent. Plus on avance et plus les choses se dégradent, il faut des bottes en caoutchouc pour circuler lorsqu'il pleut car la boue est maîtresse des lieux. Ceci sans oublier qu'il y a des magasins le long de la rue et qui reçoivent, outre leurs clients, soit de la poussière en été, soit des tonnes de boue lorsqu'il pleut. D'ailleurs, en parlant de pluie et dès qu'elle tombe assez fort, il y a deux endroits qui deviennent vraiment impraticables: il s'agit des lits naturels de deux amenées d'eaux (chaâba) qui drainent des trombes d'eau et qui traversent la rue principale de ce quartier. Quant à parler des avaloirs d'orage, c'est un rêve que ne voient les habitants qu'ailleurs, dans des quartiers plus chanceux, alors que les conduites d'assainissement réalisées, il y a des lustres ne peuvent plus contenir toutes les eaux usées après que le nombre d'habitants ait plus que quintuplé, surtout durant et après la décennie noire. La qualité de l'AEP laisse à désirer dans les robinets. Ne parlerons pas des aires de jeux ou des espaces culturels et de détente; c'est encore une chimère, pour ces citoyens de seconde zone qui n'aspirent qu'à avoir leurs chaussures encore propres en arrivant en ville ! Cependant, il paraît que les choses sont en train de changer et l'espoir de revenir après la visite sur le terrain qu'a effectuée le nouveau chef de daïra, M. Salah Touati qui a promis de prendre en charge toutes les doléances des citoyens, surtout en matière d'aménagement. D'ailleurs nous apprenons qu'un projet de réaménagement urbain est en cours, l'enveloppe est dégagée mais l'entreprise qui avait été choisie s'est retirée. Mais tous espèrent que les choses vont rentrer dans l'ordre et que cette visite, peut-être bien la première du genre, permettra aux habitants de ce quartier de vivre enfin, quelques moments «normaux».