La «harira» (ou «h'rira») est une soupe traditionnelle du Maroc et de l'Ouest de l'Algérie, constituée de légumes secs, d'oignons et de viande. Pendant le ramadhan, la «harira» est traditionnellement le plat de la rupture du jeûne. Elle est cependant servie durant toute l'année dans les restaurants et hôtels, et fréquemment consommée à longueur d'année, particulièrement pendant l'hiver. A ce titre, nous ne manquerons pas d'évoquer les gargotiers de l'époque appelés «hammas» qui servaient la fameuse «h'rira» bien chaude et bien épicée. Citons pour cela Hammou el marroqui de la Qissaria en face du marché couvert, El Gosbi avec Bouhdjar (Kada Kloucha) de derb Zirar voisin de K'chaïri el brachmi, Bahlouli d'El Medress, Negadi de la rue Basse (El Medress), Touhami de la rue Lamoricière (mitoyen au cinéma Colisée), Settouf el hali (le musicien) de Blass el Khadem (hôtel Majestic), Mustapha el moghrabi de la rue Belle vue, Rahal à Nedroma à côté du marché Cette soupe chaude est toujours présente à table, lors des diverses cérémonies (mariages, réceptions . Pendant le mois sacré de Ramadhan, la «harira» est servie accompagnée de bourek (genre de chaussons farcis à la viande hâchée et enroulés dans une feuille de pâte très mince dite warqa dioul). Elle peut aussi être accompagnée de tranches de citron. En termes de recette, elle se concocte à base de ragoût d'agneau (ou jumbo), une carotte , une petite courgette, un oignon, une branche de céleri, une petite boîte de pois chiches, une boîte de tomate pelée, un navet, une petite pomme de terre, un bouquet de persil haché, un autre de coriandre haché, une pincée de poivre noir, de paprika, de gingembre, de carvi, de sel, un petit paquet de safran, du riz cru (50 g), du levain (125 ml) et un œuf. La veille on prépare le levain en délayant 50 g de farine avec 50 g d'eau, une casserole de soupe de vinaigre et un morceau de sucre. On mettra dans un récipient couvert mais pas fermé. On fait cuire tous les légumes sauf les pois chiches dans 1.5l d'eau et on les mixera. On fera revenir la viande dans une casserole d'huile. On ajoutera les légumes mixés, les épices, le sel, le persil, la coriandre et on laissera cuire jusqu'à ce que la viande soit tendre. On versera le riz et on laissera cuire quelques minutes. On délaiera un peu le levain avec de l'eau (30 cl environ) et on versera petit à petit dans la soupe en remuant continuellement. La soupe doit être veloutée (pas épaisse !) Donc y aller graduellement avec la farine ou le levain. On laissera cuire encore un peu et on y délaiera l'œuf battu. Donner encore un bouillon et retirer du feu. Servir avec un filet de jus de citron et saupoudrée d'un peu de carvi. On peut également remplacer le levain par de la farine délayée dans un peu d'eau et du jus de citron. La préparation traditionnelle de cette soupe au levain dite «h'rira» était faite de farine additionnée de levure de bière et du jus de citron préparée quelques jours à l'avance. On parlait de «khmira» qu'on gardait «rabiw'ha», à la maison (pâte domestique ou levure boulanger). Actuellement, celle-ci tend à être remplacée par de la farine délayée dans de l'eau et du jus de citron faite au moment même de la préparation. Ce procédé fait gagner du temps à la ménagère qui exerce une activité extérieure. S'agissant de son étymologie, elle doit tirer probablement son nom de son mode de préparation, à savoir le «mélange» (des ingrédients), le «délaiement» du levain ou de la farine, l'obtention d'un potage «velouté, onctueux». «Son effet sur l'estomac d'un jeûneur est semblable à l'effet que procure la soie (h'rir) sur la peau d'une belle cordon bleu», dira avec une note d'humour un fin gourmet. Quant à son origine historique, les avis divergent. Ce mot aurait été rencontré dans des textes anciens arabes, à l'époque des Abbassides. Ce plat, d'origine morisque, c'est-à-dire andalouse (Zyriab en serait-il l'inventeur ?) et d'adoption tlemcenienne, serait rentrée par Oujda, pour se répandre dans tout le Maroc. Certains avancent le contraire en la présentant comme un plat d'origine marocaine. A noter que jadis, la «h'rira» était à Tlemcen l'apanage (spécialité) des familles koulouglies alors que son pendant, la chorba était prisée par les «H'dars». A ce propos, la chorba m'qatfa était consommée durant le mois de Ramadhan; on utilisait à cet effet au lieu du vermicelle, une sorte de «langues d'oiseau» préparées quelques heures avant la cuisson, filée avec le bout des doigts experts de vieilles femmes.