La fin de la guerre en Libye signifiera-t-elle la paix pour les Libyens et les voisins des pays du Sahel ? Deux porte-parole de l'Otan y croient sérieusement. Le ton est donné depuis quelques semaines : «le CNT libyen assumera toute la responsabilité de la sécurité des civils en Libye». C'est ce qu'a répété à plusieurs reprises, la porte-parole de l'Otan, Mme Oana Lungescu, lors de la conférence de presse donnée, mardi après-midi, au siège de l'Organisation transatlantique. La conférence, précisons-le, a été tenue conjointement et par vidéo avec le P.P des opérations militaires installé en Italie, le colonel Roland Lavoie. «Dès la fin des opérations militaires en Libye, c'est au CNT libyen que reviendra d'assurer la sécurité et la reconstruction de la Libye» a résumé Mme Lungescu. S'il est évident que le CNT, reconnu aujourd'hui comme le représentant du peuple libyen, il est tout aussi évident qu'il assumera le pouvoir politique à la fin de la guerre. Cependant, toute la question est de savoir s'il parviendra à assurer la sécurité dans toute la Libye ainsi que les régions frontalières du Sahel. A la question du «Quotidien d'Oran» de savoir si l'Otan détient des informations sur la quantité d'armements «exfiltrés» par les partisans de Kadhafi et, subséquemment, par des activistes d'El Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), Mme Lungescu a estimé que «ce sont des informations colportées par les médias et que l'Otan n'a pas connaissance de telles informations.» Le colonel Roland, lui, est resté silencieux. A l'autre question de savoir si l'Otan et les alliés ont quelques plans de prévention contre le risque réel de développement de l'activité terroriste dans la bande du Sahel, ou si l'Otan consulte ses partenaires du «Dialogue méditerranéen» tels l'Algérie, la Tunisie, la Mauritanie et le Maroc pour prévenir ces risques, les deux porte-parole sont restés muets. En revanche, sur la conquête des espaces et régions encore sous contrôle des loyalistes à Kadhafi, Mme Lungescu et M. Roland sont catégoriques : le noyau qui résiste encore est compris dans le triangle Bani/Walid/Sirte et Sebha (450 km au sud de Tripoli). Ils ont expliqué que si la situation militaire n'a pas évolué sur le terrain, ces derniers jours, c'est parce que les chefs du CNT ont voulu donner toutes les chances à la négociation et éviter des pertes humaines. Une carte de situation a été distribuée aux journalistes, carte indiquant ce fameux «triangle» qui résiste. «Les partisans de Kadhafi, cernés à Bani Walid, ont répliqué avec des tirs de roquettes à partir de maisons de civils et de mosquées» a affirmé le colonel Roland Lavoie. C'est dans ce climat qu'est attendu, ce jeudi à Tripoli et Benghazi, le Premier ministre turc, Erdogan. Cela est le signe, ont indiqué les responsables de l'Otan, que «la Libye est déjà entrée dans l'ère de la reconstruction.» Ils se félicitent de cette visite. «Des raffineries de pétrole sont déjà fonctionnelles et la rentrée scolaire à Tripoli, Misrata, Benghazi et ailleurs, aura lieu dans les prochains jours », a tenu à signaler le colonel Roland Lavoie. Revenant sur la durée de l'opération «Unified Protector», Mme Oana Lungescu a répété que «c'est une question technique» et «que dès que le CNT libyen pourra assurer la sécurité à tous les civils libyens, la mission de l'Otan prendra fin.» Elle a rappelé que l'Otan ne dispose pas de troupes au sol et qu'elle exécute sa mission conformément aux résolutions 1970 et 1973 du Conseil de sécurité de l'Onu. Ainsi, l'avenir de la Libye est, selon l'Otan, tributaire de la seule reddition des troupes loyalistes à Kadhafi. Tous les débordements et les conséquences de cette guerre sur la région du Sahel ou la probable instabilité politique et sécuritaire qui se dessine déjà dans la région, ne semblent pas inquiéter les Occidentaux et l'Otan. Peut-être. L'Occident est si loin du Sahel africain.