La fiscalité dans la loi sur les hydrocarbures va sans doute être revue. Les trois derniers appels d'offres de l'Alnaft l'agence en charge du domaine minier- ont confirmé la non- attractivité de la recherche exploration en Algérie. 66% du domaine minier national (1 553 488 km2) sont pourtant inexplorés et la moyenne du nombre de puits forés aux 10 000 km² est de 13 en Algérie contre 105 dans le monde. Même les réserves algériennes de gaz naturel ont cessé d'être renouvelées. La réaction des autorités était attendue. Elle a tardé. Un cadre du secteur de l'énergie a affirmé, sous couvert de l'anonymat à l'agence Reuters, que la règle du partage de production devrait être assouplie et que la taxe sur les superprofits pourrait se voir abrogée. Ces mesures devraient répondre aux doléances de deux compagnies étrangères en contentieux avec l'Algérie, et à celles qui se préparent à ester. Mais plus stratégiquement, la révision du dispositif fiscal dans la loi Khelil de 2005, amendée en 2006, devrait relancer l'attractivité de la recherche exploration, en berne depuis 7 ans, sur l'amont pétro-gazier algérien. Le directeur de la promotion du domaine minier à Alnaft, Djilali Takherist, a parlé pourtant en mars dernier du lancement d'un nouvel appel d'offres avant la fin de 2011. Ce scenario paraît aujourd'hui peu probable avant que le cadre légal actuel ne soit revu. Le ministère de l'Energie aurait déjà, selon la même fuite rapportée par Reuters, suggéré au Président de la République de modifier le cadre de la loi en vue de rétablir un équilibre juridique et fiscal à même de relancer l'attractivité des activités Amont en Algérie. Les appels d'offres lancés dans le cadre de la loi 05-07 ne suscitent pas de bousculade de la part des compagnies internationales. Leur «prise de distance» a même des allures de boycott. En mars dernier, à peine deux blocs ont été attribués sur une dizaine de blocs proposés, dont l'un à Sonatrach. Pourtant, une quarantaine de compagnies internationales avaient retiré les cahiers des charges. In fine, quatre offres seulement avaient été adressées à l'agence Alnaft. Ceci confirme le désintérêt grandissant pour le domaine minier national, avec 7 blocs attribués sur 26 périmètres proposés lors des deux rounds précédents. Toutes conditions étant égales par ailleurs, l'appel d'offres de la fin 2011, évoqué par Djilalili Takherist, risque de connaître le même dénouement. Le ministère de l'Energie a, semble-t-il, décidé de ne pas prendre ce risque supplémentaire et de créer une pression médiatique afin de hâter un arbitrage demandé au président de la République. INCOHERENCE ENTRE DEUX SYSTEMES FISCAUX Face à la désaffection spectaculaire des compagnies étrangères aux appels d'offres de Alnaft, le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi a, entre autres, avancé la prudence des compagnies pétrolières devant les risques de récession économique mondiale. L'argument pourrait être pertinent, n'était-ce le dynamisme de ces mêmes compagnies dans des pays voisins. Les observateurs avertis évoquent plutôt l'incohérence du cadre légal et réglementaire qui régit les activités d'exploration-production en matière de pétrole et de gaz. Marier des dispositions relevant du régime concessionnel, devenu caduc, à la pratique du partage de production 51/49% au bénéfice de Sonatrach, retire toute attractivité à la recherche d'hydrocarbures en Algérie. Particulièrement dans des bassins où la probabilité de trouver de grands gisements est faible. Le coup de grâce aura été la décision prise de taxer fortement les surprofits des compagnies partenaires, à savoir le chiffre d'affaires généré par la tranche supérieure à 30 dollars le baril. Si, au moment, juillet 2006, de la promulgation de cette disposition, 30 dollars permettaient un retour sur investissement tout juste acceptable, voir les réactions virulentes de nombreux partenaires, aujourd'hui, ils ne ménagent aucuns profits assimilables auxquels les compagnies peuvent aisément prétendre ailleurs. LES AUTORITES SEMBLENT AVOIR PRIS CONSCIENCE DES ENJEUX Compte tenu des changements politiques survenus en Libye, pays voisin au domaine minier aussi vaste, prometteur et sous-exploré que celui de l'Algérie, la démarche qu'aurait engagé Y.Yousfi, le ministre de l'Energie, en vue de modifier les dispositions fiscales de la loi sur les hydrocarbures pourrait s'avérer salutaire. En tous cas, cette évolution était attendue depuis plusieurs années par les spécialistes. Le tourbillon du passage du système de partage de production (loi de 1986) au système de la concession (avril 2005) puis le retour au partage de production (2006) avec un système fiscal inadapté, a cassé la dynamique de la recherche exploration des années 1990-2004. Les partenaires étrangers de Sonatrach ont régulièrement déploré cette instabilité juridique et fiscale qui a finalement caractérisé la gestion Khelil. En recourant à l'arbitrage international (Anadarko) et en retardant le développement de gisements gaziers récemment découverts (exemple Statoil dans le Gourara), elles ont envoyé un message fort à tous les acteurs de la scène pétrolière : en Algérie, il est difficile d'anticiper la rentabilité à long terme de leurs investissements. Alnaft s'est retrouvée en tête à tête avec Sonatrach. Il était plus que temps de s'attaquer aux incohérences du cadre légal qui font l'effet d'un repoussoir sur un domaine minier encore l'un des plus prometteurs au monde.