Le président de l'APN «sortante» a dressé un bilan «globalement positif» de la dernière législature qui, de l'avis de ceux qui font l'effort de suivre l'activité institutionnelle, a été une des plus ternes de l'histoire. Les chiffres qu'il a donnés illustrent on ne peut mieux l'extrême faiblesse du rôle de l'APN, puisque sur les 2.165 amendements aux projets de loi présentés par les députes, seuls 339 ont été retenus. Et hormis le rejet systématique d'une augmentation du prix de gasoil - c'est devenu une occasion de montrer du faux muscle et le ministère de l'Energie a cessé de la proposer par la suite -, l'Assemblée populaire nationale n'a pas particulièrement brillé. C'est une législature «tranquille» où l'Assemblée populaire nationale s'est accommodée, sans faire de vagues, de la tendance du président de la République à légiférer par ordonnance. Finalement - et ce n'est pas du tout un paradoxe -, l'une des législatures les plus riches est celle où les députes du FLN, encore parti unique, ont fait la soudure après octobre 1988, en votant les grandes lois des réformes. Les batailles internes du régime, pressé par la montée de la contestation de la rue et la crise sociale, y avaient trouvé une expression autrement plus significative que dans les APN présumées pluralistes mais à encéphalogramme totalement plat qui ont suivi. C'est que le Parlement a subi les effets du grignotage systématique des progrès politiques réalisés après octobre 1988 qui avaient été consacrés par la Constitution du 23 février 1989. Après janvier 1992 et le vote du 26 décembre 1991, le régime a entrepris de se cadenasser en se mettant à l'abri d'un «mauvais vote» des Algériens. La création d'un Conseil de la Nation avec un tiers désigné par le président a été la première remise en cause du rôle du Parlement qui devenait, subitement, une chambre basse dont les lois étaient censurables et filtrables. Avec la remise en cause «de fait» - avant qu'elle ne soit consacrée par la suite par un autre amendement constitutionnel - de la fonction de chef de gouvernement responsable devant le Parlement, c'est un quasi-retour au système qui prévalait avant octobre 1998. L'exécutif, incarné désormais uniquement par un président élu directement au suffrage universel, n'avait aucun compte à rendre au Parlement. Le gouvernement n'étant plus lié à une majorité parlementaire, l'APN n'a plus en vérité qu'un rôle technique. Les députés mis en vacances politiques se sont contentés d'assurer ce rôle sans faire de vagues. Il s'ensuit ce qui était prévisible: une APN ennuyeuse, reflet cruel d'un gel autoritaire de la vie politique décidé par le régime derrière une devanture de pluralisme destinée à la consommation extérieure. Les prochaines élections législatives vont se dérouler alors que ce corset qui réduit l'APN à faire de la figuration est encore en vigueur. Le pouvoir qui cherche à crédibiliser des réformes qui laissent la plupart des observateurs sceptiques a annoncé que la Constitution serait révisée. Certains focalisent sur un retour à la limitation des mandats présidentiels. La remise en cause de cette limitation des mandats était en effet spectaculaire. Mais la remise en cause du pouvoir et des prérogatives du Parlement a été très lourde de conséquences car elle a figé la vie politique et gelé la vie partisane. Même si en Algérie les textes ne sont pas faits pour être respectés, un rétablissement au niveau de la Constitution du pouvoir de l'Assemblée nationale est un minimum et un préalable. L'autonomie absolue de l'exécutif - et donc son irresponsabilité - n'est pas un gage de réformes et d'ouverture. Et encore moins de participation.