155 milliards de DA, c'est le montant des transactions opérées sur le marché informel ces dernières années. C'est ce qu'a affirmé hier le ministre du Commerce Mustapha Benbada qui intervenait à l'occasion d'un séminaire international sur l'économie informelle en Algérie, organisé à l'hôtel Hilton d'Alger. Le ministre évoque carrément une explosion de ce phénomène qui touche, dit-il, tous les secteurs et toutes les branches d'activité. Malgré les mesures prises jusqu'ici pour amener ceux qui exercent dans l'informel à intéégrer le circuit formel, le phénomène va crescendo, de l'aveu même du ministre qui soutient que l'ampleur du phénomène hypothèque sérieusement le développement de notre économie mais aussi menace toutes les entreprises qui exercent dans la légalité. «Les activités informelles ont fini par s'incruster dans le paysage», avoue le ministre du Commerce qui évoque des risques à tous les niveaux sur la population et sur la sphère économique. «L'expansion du phénomène obéit à des objectifs occultes», dira Benbada qui cite notamment le gain facile et l'évasion fiscale. Le Forum des chefs d'entreprises (FCE), dans une récente analyse, avait estimé pour sa part que le secteur informel occupe 1,78 million de personnes et engrange entre 300 et 600 milliards de DA. Le FCE avait également fait état d'une perte de recettes budgétaires et de recettes de la sécurité sociale de l'ordre de 42 milliards de DA pour l'IRG, 22 milliards pour la TVA et 120 milliards de DA pour ce qui est des prélèvements de la sécurité sociale. Cet argent, qui circule dans le circuit informel de main en main, échappe totalement au contrôle de l'Etat dont les services, malgré plusieurs enquêtes réalisées sur le terrain, sont demeurés incapables de suivre la «traçabilité» de cet argent détenu très souvent par de gros bonnets connus sur la place. Dans la perspective d'essayer de «cerner» justement ce phénomène qui gangrène l'économie nationale, les services du ministère du Commerce et le club CARE ont invité, hier, plusieurs experts, économistes et universitaires au colloque placé sous le thème «Les pistes d'une transition vers la formalisation». Hermando de soto Polar, un économiste péruvien, auteur de plusieurs ouvrages sur l'économie informelle et l'absence de système de droit de propriété efficace dans les pays du Sud, a développé, hier, sa propre thèse en se basant sur les expériences des pays occidentaux qui ont commencé, affirme-t-il, la lutte contre l'informel depuis 5 siècles. «Il faut se demander pourquoi le droit n'est suivi que par une minorité de la population dans le tiers-monde ?», s'interroge cet expert, présenté au colloque par les organisateurs, comme étant une sommité mondiale. L'expert conseille de chercher des mécanismes pour appliquer le droit et amener les partisans de l'informel à intégrer le circuit formel et du coup avoir une existence légale et profiter des avantages en matière de crédits bancaires notamment.