La Libye est au bord de l'explosion ! C'est le président du Tchad, Idriss Déby, qui l'énonce dans un entretien à un journal français. Quelques jours seulement après des accusations de la même tonalité émanant du président du Niger pour qui les terroristes qui ont attaqué une caserne et le site d'uranium d'Arlit sont venus du sud de la Libye. Pas de quoi réjouir Tripoli où l'Etat peine à reprendre ses marques après la «libération» par les avions de l'Otan et la destruction du régime de Kadhafi. La guerre en Libye a eu un impact direct sur le Mali et désormais on laisse entendre que la guerre au Mali s'est déplacée dans le sud de la Libye. Le Tchad et le Niger sont en «campagne» contre la Libye présentée comme le nouveau «foyer» du terrorisme djihadiste après la «libération» du Mali. Les deux pays du Sahel, très liés à Paris, peuvent toujours philosopher sur le fait que les actions dans lesquelles la France est impliquée ont toujours un effet collatéral sur eux. Pour l'instant, ils sont dans une démarche d'accusation contre la Libye accusée de ne plus maîtriser son Sud qui deviendrait un nouveau «sanctuaire». Des militaires français, cités par le journal Le Parisien, ont envisagé d'aller en Libye «pourchasser les djihadistes» dans la région du Sud-Ouest. La source militaire est allée un peu trop loin dans la traduction militaire des propos de Laurent Fabius qui évoquait la présence dans le Sud libyen «des chefs et des sous-chefs terroristes» qui «recrutent à nouveau et se réorganisent». Le président français s'est senti obligé de «corriger» en démentant une «information qui n'en est pas une». Un discours lisse où une éventuelle intervention est conditionnée par des résolutions de l'Onu. Mais il est clair que la Libye «nouvelle» est mise sous pression. Ses dirigeants, déjà passablement déstabilisés par l'ascendant des milices qui ne lâchent pas leurs armes, se trouvent dans la panade après l'adoption d'une loi destinée à «épurer» ceux qui ont servi sous Kadhafi. Les dirigeants libyens vont sûrement réagir avec force aux propos graves d'Idriss Déby, comme ils l'ont fait auparavant à l'égard du président du Niger. En réalité, le fond du problème est l'instabilité de l'Etat libyen. Les armes en circulation et les milices en action empêchent l'Etat libyen de reprendre les choses en main après le «traitement» par l'Otan. L'état de faiblesse politique de la Libye est tel que les «voisins» qui ont beaucoup bénéficié des largesses de Kadhafi se permettent aujourd'hui de la tancer. Et de la mettre à l'index en demandant une prise en charge internationale du problème libyen. Il est probable que des djihadistes ont quitté le Mali pour s'établir dans le Sud libyen. Mais il est faux d'affirmer que la Libye et la Tunisie sont leurs uniques destinations de repli. Ils sont aussi bien au Niger, au Tchad que dans d'autres pays de la région. La tendance à mettre à l'index la seule Libye relève de la politique de l'autruche. Les djihadistes ont perdu un «sanctuaire» au nord du Mali mais ils n'ont pas créé de nouveaux sanctuaires. Ils sont plutôt dans une démarche de dissémination dans l'ensemble du Sahel Ce n'est pas seulement la Libye qui pose problème.