Le lancement des souscriptions pour l'acquisition d'un logement sous la formule location-vente de l'AADL exclusivement sur le Net a tourné au click-click sans fin désarmant pour les impatients. Dès les premières heures de sa mise en ligne, le site web de l'AADL dédié à l'inscription des demandes (inscription.aadl.dz) a été inaccessible pour de nombreux Algériens. C'était prévisible au vu de l'engouement suscité la relance de la formule. Dès la fin de l'année 2012 correspondant à l'annonce par le gouvernement du come-back de la formule location-vente dédié aux ménages à revenu intermédiaire, AADL est devenue la requête la plus récurrente sur web dans la catégorie «actualité». Ella a eu une courbe stable tout au long de l'année. L'intérêt des Algériens pour cette actualité a été aussi important que la santé du Chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika. Les «chanceux», ceux ayant pu accéder au site, ont eu des difficultés à remplir certaines cases du formulaire notamment celle relative à la commune de résidence dont le menu déroulant ne s'affichait pas. Et lorsqu'on y parvient, sa validation échoue. Surmonter cette difficulté nous amène aussi à celles du chargement de l'accusé de réception. Le site est resté saturé même à 4h du matin de la journée du mardi. En temps normal, l'inscription en ligne donnerait lieu au téléchargement d'un accusé de réception ainsi que les conditions d'éligibilité, les pièces à fournir et le modèle de déclaration sur l'honneur. Chaque demande de souscription recevra un numéro d'enregistrement et un mot de passe spécifique qui s'afficheront sur le formulaire d'enregistrement et seront reportés sur l'accusé de réception. Ceux-ci resteront comme des «liens» pour la réponse à donner aux citoyens ou pour toute demande d'information complémentaire. Bilan chiffré d'une opération qui ne convainc pas Aux difficultés techniques, le ministère de l'Habitat et de l'urbanisme a préféré rendre compte d'un bilan plutôt positif de l'opération. Selon lui, 84.215 demandes ont été enregistrées au premier jour de l'opération de souscription en ligne au nouveau programme de logements de location-vente de l'AADL. Avec cette capacité, l'opération ouverte (sans aucune date de clôture) peut enregistrer 2,5 millions de demandes en un mois. Le ministère préférant le chiffre à la réalité des difficultés des souscripteurs a même donné la répartition des demandes enregistrée par sexe, statut matrimonial et situation géographique. Le recours au web a été privilégié par les responsables de l'AADL «afin d'éviter aux souscripteurs les désagréments liés aux déplacements au siège de l'Agence et les problèmes de files d'attente avec la présence d'un grand nombre de personnes sur place». Mais, il faut dire que le scepticisme a été de mise dès l'annonce de cette nouvelle procédure «innovante», sans précédent dans le secteur de l'Habitat. D'aucuns s'interrogeaient déjà sur les capacités du site alors en construction à faire face une demande aussi importante que celle du logement. Lyès Benidir, le directeur général de l'AADL, a reconnu publiquement le «défi» qu'une opération demandant «une grande préparation sur le plan technique et la formation de pas mal d'ingénieurs». La construction du site a été pourtant réalisée en collaboration avec le Centre de recherche sur l'information scientifique et technique (CERIST). Un organisme de recherche et fournisseur d'accès Internet dont l'expertise technique n'est pas à démontrer. Le «rush» sur le site était prévisible. Mais pourquoi l'AADL ne s'est-elle pas préparée ? Elle qui voulait éviter les désagréments aux souscripteurs en a créé d'autres, comme preuve que les solutions numériques sont loin d'être une panacée dans un environnement mal adapté au développement des nouvelles technologies. Les Algériens qui ont investi la toile à l'affût du moindre détail sur l'opération ont eu des réactions sarcastiques sur les actualités qui défilent à propos de l'opération. «C'est une page, pas un site. Qui l'a conçu ?», «Une page web non réussie! Comment veut-on lancer un projet d'habitat?» s'interrogent les internautes sur la page de l'actualité AADL sur Facebook. Doute sur la sécurisation des données D'autres s'interrogent sur la sécurisation des données. En effet, le site s'affiche avec le protocole internet http. «Pour éliminer tout risque d'interception de données par une tierce personne, il fallait un protocole sécurisé httpS», nous explique un enseignant universitaire de l'USTHB de Bab Ezzouar. Selon lui, l'échange de données entre le souscripteur et le serveur se fait «en clair» sous le protocole http ou la sécurisation des données est à un niveau très faible. «Lorsqu'il s'agit d'entrer des données de grande importance comme les coordonnées personnelles et celles de la sécurité sociale dans un formulaire en ligne il faut opter pour le protocole sécurisé qu'est le httpS, (S pour Secure en Anglais) pour crypter les données échangées», a-t-il encore expliqué. Alors comment le CERIST dont la sécurité des réseaux d'information est l'une de ses spécialité a pu ne pas prendre en compte ce paramètre essentiel, surtout que des fois ce n'est pas la page web qui est offerte mais un cache ? Pour notre professeur, le choix d'un fournisseur de service web algérien n'exempte pas du risque de voir les données des souscripteurs interceptées par d'autres. «En l'absence d'une autorité de certification qui délivre les certificats numériques, nul ne peut garantir la sécurisation des données, même lorsque les serveurs sont Algérie. Certains recourent à des boites étrangères pour l'achat de ces certificat mais là encore on ne peut garantir la confidentialité des données», a-t-il jugé. Le problème de la sécurisation des données doit être traité dans sa globalité avec la mise en place de cette autorité. Ce dossier est bloqué pour cause de divergences entre les autorités civiles et militaires, dit-il en soulignant que le problème de la sécurisation des données se posera avec une acuité avec le déploiement de la technologie mobile 3G. «De nombreux services inhérents à la 3G se trouveront face à cette difficulté», a-t-il averti.