Les touareg et les arabes du Nord suspendent les négociations avec Bamako qui a fermé toute option vers l'autonomie se contentant de proposer une «amélioration de la décentralisation». Un retour à la case départ d'une crise qui dure depuis plus de trois décennies. L'afflux des djihadistes au nord du Mali a été la fiè-vre qui masquait le fond du vieux problème malien posé par les populations du Nord. A Bamako, l'intervention française était considérée, en soi, comme la fin du «problème». La France, soucieuse de se désengager, avait fortement pesé de son côté pour la conclusion d'un accord entre Bamako et le MNLA afin de permettre la tenue de la présidentielle. Des accords dits «de Ouagadougou» ont bien été signés le 18 juin et l'élection présidentielle s'est tenue. Et depuis.. plus rien ; mis à part une forte méfiance émaillée d'accrochages armés. Mais le «vieux problème» que l'on s'est évertué à masquer ou à mettre de côté est bien là. Susceptible de relancer les tensions voire la rébellion des populations du Nord, targuies et arabes. Les responsables de ces populations dont le MNLA ont décidé de suspendre les discussions avec le gouvernement de Bamako sur le statut de l'Azawad. Le MNLA, qui a renoncé par réalisme politique à l'indépendance de l'Azawad, défend avec fermeté une autonomie pour les régions du Nord. Ce que Bamako, reconduisant une vieille politique marquée par un certain autisme, refuse d'accepter. Le nouveau président du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta («IBK») avait laissé entendre au cours de la campagne électorale que les accords de Ouagadougou «ne l'engageaient pas totalement» puisqu'ils avaient été signés par son prédécesseur, le président par intérim Dioncounda Traoré. «Plus rien à négocier » Pour le nord du Mali, il ne préconisait rien d'autre qu'une «amélioration de la décentralisation». Loin, très loin, du «projet d'autonomie» défendu par le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), le Haut conseil pour l'unité de l'Azawad (HCUA) et le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA). «Suite aux multiples difficultés de mise en œuvre de l'accord de Ouagadougou causées notamment par le non respect par la partie gouvernementale malienne de ses engagements», le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), le Haut conseil pour l'unité de l'Azawad (HCUA) et le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA), ont décidé de suspendre «jusqu'à nouvel ordre» leur participation aux structures de mise en œuvre dudit accord». Le communiqué précise que la décision a été prise le 18 septembre à la suite de la «deuxième et controversée réunion du Comité de suivi et d'évaluation du dit accord et aux graves déclarations du nouveau président malien qui affirmait dans son discours à Bamako que sauf l'indépendance, le fédéralisme et l'autonomie, tout est négociable ». Pour les trois mouvements, cette déclaration du président malien rend de «facto, nulle et non avenue la participation des mouvements de l'Azawad à toute discussion dans la mesure où elle implique explicitement qu'il n'y a strictement rien à négocier». Les signataires relèvent également que les autorités de Bamako ne respectent pas les engagements pris dans le cadre de l'accord de Ouagadougou. Ils citent à cet égard, la «violation unilatérale du cessez-le feu par la partie malienne», la «poursuite des exactions militaires sur les civils azawadiens et la poursuite des arrestations arbitraires», la «non libération des détenus politiques suite au conflit», «la violente répression de la manifestation des femmes à Kidal» et «l'agression des positions militaires du MNLA à Foyta, dans la zone de Léré». Au bord de la dérive La coordination des mouvements de l'Azawad a écrit à la médiation burkinabé en reprenant à son compte le propos du secrétaire général du MNLA, Bilal Ag Acherif. «Nous serons au bord de la dérive de manière terrible et dangereuse, si toutefois la trajectoire du processus engagé par Bamako n'est pas corrigée dans les meilleurs délais». Un retour à la case départ et un rappel que le problème fondamental du Mali est celui de la prise en charge des revendications des populations du Nord dans le cadre de la préservation de l'intégrité territoriale. En début d'après-midi, hier, on attendait une réponse du gouvernement malien à la décision des rebelles touareg et arabes de suspendre les discussions. Mais il est clair que sans une évolution de Bamako en matière de réorganisation de l'Etat du Mali, l'impasse se profile. Un retour à la case départ d'une crise qui perdure depuis plus de trente ans !