Ali Benflis ne reconnaît pas les résultats proclamés, avant-hier, par le Conseil constitutionnel. Le candidat à l'élection présidentielle du 17 avril accuse même certains membres du Conseil constitutionnel d'avoir fait campagne au profit de Bouteflika, en contradiction avec la loi et la Constitution. «Les images de ces personnes sont disponibles sur Youtube», a fait savoir Ali Benflis, lorsqu'il a été interrogé sur l'identité de ces membres du Conseil constitutionnel, censés garder la «neutralité» dans cette échéance électorale. «Le Conseil constitutionnel vient de rendre publics les résultats officiels de l'élection présidentielle du 17 avril. Et comme on s'y attendait, il vient de cautionner une fraude à grande échelle qui a entaché ces élections», a-t-il déclaré, hier, lors d'une conférence de presse organisée à son ancien QG de campagne, à Alger en soulignant que «ce n'est pas la première fois que cette institution s'écarte de sa mission de défense de la Constitution et de la légalité». «Déjà, en 2008, cette institution a cautionné, sans état d'âme, le viol caractérisé de la Constitution qui a supprimé la limitation des mandats et sans lequel nous ne serions pas là, aujourd'hui, face à une grande crise de légitimité de la première institution du pays», soutient Benflis qui fait état d'un «chèque en blanc» donné par le Conseil constitutionnel ce qui a permis de contourner la volonté populaire et de faire adopter ce coup de force sans passer par un référendum populaire. «Le Conseil constitutionnel a été totalement dépossédé de ses missions. Il a été rabaissé au rang de simple appareil mis au service exclusif du régime en place. Au lieu de s'imposer comme une institution républicaine ne servant que l'Etat, il a accepté et assumé sa dérive qui l'a conduit à devenir l'instrument par lequel un habillage légal, trompeur est systématiquement donné aux actions et aux décisions douteuses du pouvoir en place», ajoute le conférencier. Ce dernier qui rappellera ce qu'il qualifiera de «non-conformité du dossier de Bouteflika» et accepté par le Conseil constitutionnel, affirme que l'institution suprême dirigée par Mourad Medelci a en fait simplement permis d'assurer une «auto-reconduction» du régime et sa devanture, la présidence de la République. Le candidat Benflis accrédité de seulement 12% de voix a affirmé qu'il détient les preuves matérielles qu'il y a eu une fraude généralisée à travers les 48 wilayas du pays. Exhibant un document qu'il a baptisé «livre blanc», le «brûlot» de centaines de pages délivre à l'opinion publique tous les procédés utilisés, selon lui, pour trafiquer le scrutin. Le document sera, promet Ali Benflis, diffusé à grande échelle, notamment sur le Net, pour permettre aux citoyens de connaître la vérité. «C'est Bouteflika qui a distribué les quotas quand il a su en début de soirée qu'il a perdu dès le premier tour», affirme Ali Benflis. Ce dernier, qui soutient qu'au moins 4 à 6 millions d'Algériens ont voté pour lui, ne compte pas pour autant désarmer affirmant qu'il va continuer à se battre politiquement et pacifiquement pour changer le système et instaurer une véritable alternative démocratique. «Dans cet esprit, je vous informe que j'ai entamé la préparation de la création d'une formation politique dont la raison d'être est de perpétuer le projet pour le renouveau comme alternative toujours valable et l'élan populaire qu'il a pu susciter autour de lui», a déclaré l'ancien chef du gouvernement qui souligne en ce sens qu'il n'a pas d'autre conception de la politique que celle de la confrontation d'une idée à une autre, d'un programme à un autre et d'un projet à un autre projet. «Nous livrerons ensemble ce combat commun dans l'esprit et les règles de la compétition démocratique saine et honorable», ajoute M. Benflis qui appelle ses sympathisants à rester mobilisés pour constituer dans un « délai proche» cette formation politique. «Ma campagne électorale a permis au peuple algérien de s'assurer qu'il existait une alternative politique au régime en place», dira Benflis qui évoque des «moments historiques» que vit notre pays. «Mon combat politique futur œuvrera comme toujours à la promotion et à la défense des droits, tous les droits attachés à la citoyenneté», promet le conférencier pour qui la situation du pays est devenue extrêmement grave. Enfin, interrogé sur la position de l'armée à l'occasion du scrutin de jeudi dernier, Ali Benflis dira qu'il n'avait adressé aucun appel à l'armée et qu'il n'a aucune raison de douter de l'engagement de neutralité exprimé dans la revue El Djeich. Cependant, le candidat malheureux à l'élection présidentielle dira clairement que «l'armée est restée spectatrice et a laissé l'administration faire ce qu'elle voulait».