Le général de corps d'armée, Gaïd Salah, chef d'état-major de l'armée et vice-ministre de la Défense, a mis en garde en des termes très durs ceux qui contestent la légitimité du chef de l'Etat. Il les a informés que l'armée ne permettra pas le «tekhlat» de ceux qui mettent en doute la crédibilité de l'élection présidentielle. L'avertissement - car c'en est un - a été lancé dans un discours à l'Ecole des cadets de la nation à Béchar. Le communiqué du ministère de la Défense nationale sur ce discours à Béchar ne fait pas état de cet avertissement. Il se contente d'un passage où le général Gaïd Salah appelle la troupe à «consentir davantage d'efforts et d'abnégation afin de préserver l'intégrité territoriale du pays et de défendre ses frontières contre les divers fléaux». C'est dans un article du journal El Khabar daté du dimanche - que nul n'a démenti et qui ne le sera probablement pas - que l'on retrouve cette très sévère admonestation à des opposants dont certains étaient, dit-il, «hier des amis». Les membres de la CNLTD n'avaient pas encore réagi hier alors que la mise en garde leur est adressée en particulier. Dans le récit détaillé avec les guillemets d'usage pour signifier que le propos est bien celui du chef d'état-major on y retrouve même une accusation à des «gens étrangers au pays qui cherchent à provoquer le chaos». Le message du général Gaïd Salah n'est pas surprenant sur le fond. L'appel des membres de la CNLTD à la mise en œuvre de l'article 88 de la Constitution puis à la tenue de présidentielles anticipées n'est «techniquement» possible que si Bouteflika y consent ou que l'armée l'y contraint. La réponse de Gaïd Salah est sans équivoque : le président a été élu, l'armée le soutient. Elle fait sienne la «ligne rouge» des partis du pouvoir qui refusent toute contestation du président de la République. Si le «fond» n'est pas surprenant, la forme l'est, par contre, par sa dureté. C'est probablement la raison pour laquelle on a évité de le diffuser par le biais du site officiel du MDN. Il exprime un agacement perceptible à l'égard des membres de la CNLTD qui ont décidé de faire du départ du président une exigence préalable. La fermeté du message de Gaïd Salah contraint, une fois de plus, la CNLTD à se poser la question de la faisabilité de ses revendications. Ce n'est un secret pour personne que les deux seules possibilités de bousculer l'agenda actuel sont une implication de l'armée pour faire jouer l'article 88 ou une mobilisation populaire suffisamment forte. La première voie est clairement fermée par le discours de Béchar. La seconde option reste très problématique même si l'actualité montre que des motifs de colère ne manquent pas dans le pays. Mais ce sont des contestations qui se mènent de manière spontanée, voire violentes, loin de tout encadrement politique ou associatif. La mise en œuvre d'une présidentielle anticipée n'est possible que dans le cas d'une fissure profonde au sein du régime. Les signes de divergences et de tensions qui ont prévalu avant la présidentielle avec la charge de Amar Saadani contre le général Toufik et la «riposte» du général à la retraite Hocine Benhadid semblent s'être estompés. A défaut d'un consensus, il y a bien une entente sur le statuquo. La CNLTD s'est fixé un objectif très ambitieux d'imposer une présidentielle anticipée. Mais c'est un objectif qui paraît irréalisable car dépendant du bon vouloir de Bouteflika ou de l'armée. Cela ressemble à une impasse.