Pour la première fois, depuis plusieurs semaines, l'euro enregistre un léger glissement vers le bas. Hier, sur les places publiques du marché parallèle de la devise à Constantine, l'euro s'échangeait contre 175 dinars (170 dinars à l'achat), enregistrant une baisse de quelque 5 dinars en deux jours. La monnaie unique européenne est talonnée de près par le dollar américain qui s'échangeait contre 165 dinars (160 dinars à l'achat). « Le marché est instable », nous avoue un cambiste sur un ton inquiet. Plusieurs professionnels du change parallèle de la devise croyaient que l'euro allait grimper encore lors de ces derniers jours de l'année 2015, à cause notamment de la forte demande prévisionnelle qui serait générée par les fêtes de fin d'année et les départs à l'étranger, mais il n'en fut rien. C'est bien le contraire de ce qu'on prévoyait, « la demande est très faible sur l'euro », lancent les cambistes qui parlent de perte sèche durant ces deux derniers jours, après avoir acheté l'euro à un prix assez élevé (180 dinars). Mais, selon nos interlocuteurs, il n'y a pas que la baisse des départs à l'étranger qui a provoqué ce léger fléchissement de l'euro, car la demande réelle est exercée par les importateurs qui raflent de grandes sommes sur le marché parallèle pour s'approvisionner à l'étranger. Chose qui indiquerait que les importateurs sont, eux aussi, de plus en plus désintéressés par cette pratique qui ne leur rapporte plus grand-chose. « Ce n'est plus rentable pour les importateurs de changer des dinars en euros, avec cette flambée de la devise sur le marché noir et, surtout, avec l'étau qui se resserre autour d'eux en matière de législation », estiment d'autres cambistes. L'effondrement du dinar commence-t-il à toucher l'un de ses buts avec la limitation des transferts illicites de devises vers l'étranger et la baisse des importations ? La politique d'intégration de la masse d'argent en circulation dans le circuit informel qui, quoi qu'on dise à ce sujet, commence à donner des résultats, ne serait pas étrangère à cette fluctuation de la monnaie forte, il est vrai encore timide. Les gens qui trouvaient refuge dans le change en monnaie forte et qui participaient à sa flambée sur le marché parallèle se tournent vers d'autres créneaux, beaucoup plus axés sur l'investissement local. Pas forcément un investissement productif, mais le foncier et l'immobilier sont deux créneaux qui attirent beaucoup de monde. Et cette tendance baissière va se poursuivre dans les prochains mois, car plusieurs importateurs qui exerçaient toute la pression sur l'euro annoncent leur retrait définitif des affaires. « Je ne pourrais plus importer du chocolat que j'écoulais à 140 dinars et que je serais contraint de revendre à 400 dinars avec la flambée de la devise et l'application des nouvelles taxes sur l'importation de produits finis et destinés à la consommation », nous a avoué un importateur. La monnaie forte va-t-elle suivre la dégringolade du dinar et perdre un peu de son pouvoir dans le nouveau contexte socioéconomique qui se profile à l'horizon 2016 ?