Les événements de violence qui ont marqué la nuit du Réveillon de fin d'année, à Cologne (Allemane), ont fait ressurgir, chez des responsables politiques des sentiments racistes, glauques, pas différents des coupables qu'ils dénoncent. La nouvelle année 2016 s'ouvre, en Europe, avec de nouveaux fantasmes, crispations identitaires et négations des libertés comme au temps obscures du Moyen-Âge. A Cologne, et en Norvège des groupes de «soulards» du 31 décembre, au soir, ont harcelé ou agressé des femmes et jeunes filles, dans la confusion des explosions de joie, à minuit tapante. C'est grave, impardonnable et indigne de ces jeunes et moins jeunes, surexcités par la fête particulière de fin d'année. Les policiers ont fait leur travail et des coupables ont été arrêtés. Les mis en cause méritent une punition et une condamnation exemplaires. Dans le groupe des coupables il y a des citoyens allemands, mais aussi des Maghrébins, arabes et autres origines nationales et même quelques réfugiés. Ils devront répondre, par devant la justice, de leurs actes inacceptables, sales, mesquins. En revanche, hormis la maire de Cologne qui a tenté de calmer les esprits surchauffés d'extrémistes et autres nazillons, pour éviter l'amalgame dans la communauté étrangère, d'une manière générale, cela donne-t-il le droit à certains autres responsables politiques et «spécialistes» de l'immigration qui n'ont pas hésité à saisir l'occasion pour cibler, dans leurs dénonciations de ces actes barbares, les seuls arabes et Maghrébins en les qualifiant de «prédateurs» innés de la gente féminine ? «Les arabes et Maghrébins voient les femmes comme des gibiers de chasse», a déclaré une responsable politique belge flamande du parti C&V (Social chrétien) faisant partie du gouvernement fédéral. Immédiatement d'autres porte-voix de partis conservateurs et d'extrême droite ont pris le relais pour déclarer des «horreurs» racistes d'une rare violence : les Maghrébins et arabes sont génétiquement des prédateurs sexuels, des violeurs, des barbares sans aucune morale, etc. On savait le cliché classique collé aux arabes et Maghrébins, faisant d'eux des jouisseurs, des «violeurs potentiels», ou encore l'Africain et son cops aux proportions idéales qui fait fantasmer les dames blanches européennes, mais là un pas vient d'être franchi, dans la surenchère raciste aveugle : on découvre que l'agressivité sexuelle est innée, un trait de caractère et une nature chez ces populations. On l'aura compris, le but est de faire regretter à l'Allemagne sa générosité, dans l'accueil de près d'un million de réfugiés de guerre, l'année dernière. Derrière, l'extrême droite et les conservateurs, se frottent les mains pour remettre à l'ordre du jour les menaces sur la sécurité, les traditions et l'identité européenne définie comme, exclusivement, chrétienne, blanche et supérieure, dans le genre humain. Cette stratégie qui mélange, amalgame, fantasme, délire à des fins électorales n'est pas nouvelle. D'ailleurs lors des découvertes des dégâts causés par des ecclésiastiques pédophiles, l'opprobre a sali toute l'église chrétienne jusqu'au Vatican. Ce qui est inquiétant dans ce cas-ci, est que cette soudaine poussée supplémentaire de racisme intervient, dans une conjoncture politique difficile en Europe (chômage, terrorisme, flux migratoires) et catastrophique, dans son voisinage immédiat (guerres en Syrie, Libye etc.) Autrement dit, la crainte d'une amplification des crispations identitaires, des violences racistes et des dérives sécuritaires, en Europe, est réelle puisque tant en Libye qu'en Syrie, l'espoir d'une paix globale est une perspective lointaine, mieux les tensions entre Iran et Arabie Saoudite et l'aggravation de la guerre au Yémen ne vont pas aider à freiner le flot des réfugiés de guerres et de violences. Ce qui s'est passé, au lendemain, des évènements de ce 31 décembre 2015 est nouveau, dangereux. Parce que des agressions de ce type et à cette occasion, il y en a, partout, à des degrés divers, chaque année et partout en Europe et dans le monde. En revanche, utiliser les faits qui ont eu lieu, à Cologne, impliquant quelques étrangers parmi les Allemands de souche pour en conclure à des thèses aussi farfelues que dangereuse, n'est pas une erreur de communication, sous le poids de «l'émotion». Elle procède d'une méthode et d'une stratégie si bien connues des extrémistes et conservateurs pour pousser à l'affrontement intercommunautaire, voire de «civilisations» à des fins bassement électoralistes, sans souci pour la cohésion sociale dans leurs pays. Sans ces clivages, ces exploitations éhontées de vrais sentiments de citoyens, mis en marge de la société ou ayant été victimes de crimes et d'agression, les extrémistes de toutes obédiences n'ont pas d'avenir. Malheureusement, la situation dramatique de certaines parties du monde et la persistance des guerres, terrorisme, crise migratoire, aux portes de l'Europe, menacent cette nouvelle année 2016 qui espérons-le, quand même, ne tuera pas, totalement, l'espoir pour la paix partout où les hommes souffrent. En Europe aussi.