L'effet suisse, opposant un niet catégorique à la construction des minarets, a révulsé l'Europe profondément laminée par la montée en puissance de l'islamophobie. Loin d'être un phénomène isolé, la majorité référendaire (57% du suffrage populaire) et cantonale (26 sur les 30) ont inscrit cette tendance lourde en réalité incontournable dans le spectre politique dominé par l'activisme de la droite nationaliste de l'UDC (Union démocratique du centre) et du parti chrétien de l'UDF (Union démocratique fédérale) déployant haut l'étendard de « l'islamisation rampante ». Sous le prétexte fallacieux du refus de la sur-représentation de l'Islam (le cas des 4 minarets), la Suisse de la neutralité légendaire, du respect des droits de l'homme et du caractère multiculturel a massivement dérouté sur le sentier étroit de l'intolérance et du communautarisme, en portant atteinte aux valeurs fondamentales de la démocratie, de la liberté de culte et de conscience. Le «vote de la peur», induit par le recours aux amalgames et les fantasmes entretenus par les mouvements extrémistes, hante l'Europe de la crise identitaire, sociale et politique qui fonde le vivier du radicalisme porteur de fractures et de tentatives d'exclusion. Le mouvement qui touche aux fondements républicains, au même titre d'ailleurs que le djihadisme négateur et destructeur, fait tache d'huile en Allemagne (l'exemple de la Ruhr opposé aux projets de construction des grandes mosquées), en Belgique, aux Pays-Bas et en France. Les apôtres de l'islamophobie qui se recrutent dans les rangs du parti flamand, du parti hollandais de la liberté et ceux du Front national français ont sonné `le glas du modèle d'intégration européen par voie d'occultation du rôle et de la place de l'Islam. Le débat biaisé, consacrant le racisme ordinaire, se présente à la mode inquisitoire sous la forme de cette querelle de minarets à grande échelle. La dérive extrémiste est lourde de conséquence sur le bon équilibre des sociétés européennes en mal de crispation et la stabilité interne menacée par la poussée xénophobe.