L'attaque terroriste à la roquette perpétrée, tôt hier, contre le champ gazier de Krechba, à El-Ménea, exploité par British Petroleum, Sonatrach et Statoil ne peut que raviver les craintes de l'Algérie quant à d'éventuels attentats à l'image de celui de Tiguentourine. Si ce dernier, aussi spectaculaire que dramatique, a fait mal et très mal à l'Algérie du pétrole, des interrogations entourent cette attaque de vendredi. En effet, si la prise d'otages meurtrière d'In Amenas a été revendiquée par Belmokhtar, dont la troupe de djihadistes multinationale est arrivée de Libye, on voit mal un groupe de terroristes «étrangers» traverser pratiquement la moitié du désert algérien pour «cracher» de loin deux ou trois roquettes contre un champ sous haute surveillance militaire. A priori, les auteurs de cette attaque seraient des «locaux» qui sont passés à l'action pour on ne se sait quelle raison. Le timing aussi laisse perplexe. Pourquoi maintenant ? Après le discours alarmiste du chef d'état-major de l'ANP, Gaïd Salah, appelant à plus de vigilance face à un environnement sécuritaire régional des plus instables et alors que l'Algérie redoute un scénario à la tunisienne, un groupe terroriste passe à l'action au cœur même du désert, frappant un site gazier. S'agit-il d'une prise de pouls pour jauger de la réactivité des services de sécurité ? Peut-être, puisque l'attaque en elle-même n'a pas eu d'incidence sur la production «qui se poursuit normalement». L'autre objectif visé est de menacer la présence physique des ressortissants étrangers dans le Sud algérien comme cela a été le cas à Tiguentourine. Une attaque à caractère économique pour dissuader les entreprises étrangères de travailler en Algérie. Quels enseignements devront être tirés après cette action terroriste ? Le ou les groupes terroristes sont déjà présents en Algérie, en particulier dans le Nord, un fait connu de tous, mais cette incursion, loin des bases traditionnelles du terrorisme, laisse à penser que de nouveaux groupes armés se sont constitués, certainement recrutés parmi les réseaux de contrebandiers et de narcotrafiquants. La position géographique même des lieux de l'attaque corrobore cette hypothèse. En attendant qu'elle soit revendiquée par Daech, Belmokhtar ou une autre source, l'attaque d'El-Ménea met à mal les derniers scoops sur des prétendus accords secrets entre l'émir du groupe « Les signataires par le sang » et les services algériens de ne pas s'attaquer à l'Algérie.