28 ans ont passé depuis le 5 octobre 88. Déjà, peut-on dire d'une date qu'on le veuille ou non qui a changé le visage de l'Algérie. Du chahut de gamins cher aux apparatchiks à la révolte téléguidée ou non d'une jeunesse désespérée, asphyxiée par un système liberticide, le 5 Octobre fait partie des grandes dates du pays malgré le peu d'importance que lui accordent les autorités officielles. 28 ans plus tard, le bilan est mitigé. Les morts, les enlèvements et les tortures ont marqué l'événement et la guerre des clans a débordé sur la chaussée. Les Algériens découvraient avec horreur le visage effrayant d'un système qui ne voulait pas abdiquer. Passé les premières heures euphorisantes d'une overdose de liberté, de l'ouverture du champ politique et médiatique, l'Algérie basculait dans le sang, celui de ses enfants. Dix ans d'une guerre civile exsangue qui a mis le pays au ban du reste du monde. Le terrorisme islamiste fourbissait ses premières armes et aiguisait ses lames sur le cou des innocents. Le 5 Octobre était vite oublié mais pas par ses enfants, une génération qui s'est sacrifiée pour pouvoir respirer et parler sans rendre compte, sans risquer de se faire prendre dans une rafle, le soir, attablé au café du quartier, ou interpellé aux aurores au sortir du sommeil par la police politique. L'état d'urgence remisait toutes les libertés acquises au prix du sang et des souffrances sous la torture et la chape de plomb se faisait encore plus pesante qu'auparavant. Le 5 Octobre s'éloignait dans la mémoire collective ne subsistant que dans la mémoire individuelle, sélective des premiers écorchés vifs qui ont vu leurs amis tomber sous les balles. Puis Bouteflika, la charte sur la réconciliation nationale, le retour à la paix, la fin des faux barrages, de Bentalha, Ramka et Had Chekalla. Mais des acquis du 5 Octobre ne subsistaient que les intérêts personnels et partisans. De cet esprit qui a poussé des milliers de jeunes Algériens à offrir leur poitrine aux balles réelles des snipers ne survit que bruits et rumeurs. Des livres ou des récits. Des témoignages et un fonds de commerce douteux. Un esprit trahi par ceux qui devaient le défendre, par une opposition de façade plus soucieuse de la carrière politique de ses ténors que des intérêts du peuple. L'Algérie d'aujourd'hui est plus proche d'un pré-5 Octobre que d'un post-5 Octobre avec un net recul des libertés individuelles, de culte et syndicales. La presse privée est menacée même dans son existence et les partis politiques condamnés à disparaître sur l'autel des articles 73 et 94 de la loi organique portant régime électoral. Que reste-t-il du 5 Octobre ? Une date à commémorer, beaucoup de nostalgie et énormément de regrets.