Le peuple s'inscrit à l'intérieur d'une hiérarchie qui permet de distinguer de haut en bas, les artisans, etc. La population est soumise à des lois sévères : «Ne ment pas. Ne vole pas. Ne paresse pas.» Ce sont les trois règles d'or. Les morts sont vénérés et leurs corps soigneusement conservés. On craint qu'une personne mal intentionnée ne s'empare d'une momie et pourrait dominer les descendants du défunt. Le mort dont le cadavre est enveloppé de fines toiles, préside à la cérémonie funéraire. Tandis que l'on exécute devant lui des danses lentes, ses amis jouent ses biens aux dés. Une façon de choisir l'héritier Selon les régions, les tombes sont très différentes. A Paracas, par exemple, il s'agit de cavernes dans lesquelles on enterre de nombreux «fardos», entourés de céramiques, de nourriture, de vêtements. Les «fardos» renferment une momie prise dans plusieurs enveloppes de tissus. Chacune d'elles est resserrée dans sa partie supérieure, modelant ainsi la forme d'une tête que l'on recouvre d'un masque et que l'on coiffe d'un turban et de plumes. Dans la région du lac Titicaca, les morts prennent place dans des « chullpas », véritables constructions en pierres. Les momies sont glissées dans les niches de la partie basse. On retrouve dans les chullpas trois niveaux de l'univers inca : en haut les astres, au centre les hommes, en bas les morts. Comme les Egyptiens, les Incas accordaient le plus grand soin à la conservation de leurs morts. Mais ce n'est pas la seule ressemblance entre les deux civilisations. Le Dieu suprême de la religion quechua était le soleil Inti. Toujours comme les Egyptiens, les Quechuas adorent la Lune, les étoiles, la foudre et l'arc-en-ciel, attributs du Dieu suprême. Pillage du trésor inca La variole, maladie répandue chez les Espagnols mais inconnue chez les Incas, constitua un allié de poids pour Pizarro. Dès son premier débarquement en 1527, elle se répandit dans tout le Pérou comme une traînée de poudre, emportant l'empereur Huayna Capac. Revenu cinq ans plus tard avec à peine 200 soldats, Pizarro envahit sans difficulté cet empire miné par la maladie et la guerre civile. Il s'empare de l'Inca Atahualpa, venu à sa rencontre avec 20.000 hommes et le garde prisonnier neuf mois avant de le faire étrangler le 29 août 1533. Pizarro et ses hommes se mirent alors à piller les trésors des Incas et à saccager les vestiges de leur pouvoir, tandis que les prêtres faisaient démolir les temples pour dresser les églises, tout en baptisant les Indiens de force. Les Quechuas conservent la mémoire de cette terrible époque à jamais indélébile. De même que Sumer précéda Babylone, Ninive, Persépolis, Chavin et la culture mochica annoncèrent les splendeurs de Cuzco et son empire Inca. Le chemin des Incas (Pérou) Aller au Pérou demeure toujours un rêve. Parcourir le chemin des Incas, une attraction aussi intense que le cheminement du Grand Canyon, les hautes pistes du Népal ou les falaises escarpées du Biandagara (Dogons au Niger). Celui des Incas recouvre en plus de l'aspect historique, la beauté d'un paysage imprenable, manifeste dans la cité du Machu Picchu, à Cuzco, Nazca, etc. La discipline et l'organisation du peuple inca lui ont permis de gouverner sur un vaste territoire qui s'étale de l'Equateur au Chili, de maintenir une cohésion linguistique et une hiérarchie conviviale. S'ils ont ignoré la poulie, avec le cheval ils ont transporté et entassé des blocs cyclopéens de plus de 350 tonnes en terre haute à des altitudes de 3000 mètres et plus. Similitude frappante avec celle des Pharaons (plus hydraulique sur le Nil), Maya ou Olmèque dont le génie de la construction excellait à plus d'un titre. Joindre le Pérou ne fut possible qu'à partir de Montréal, avec deux escales aux Etats-Unis aéroport de Cleveland où j'aurais le loisir d'attendre la correspondance pendant deux heures et d'admirer les vitrines des magasins soigneusement achalandées sur les trois longs couloirs en zone de transit. La cherté des produits exposés vous évite toutes incursions à l'intérieur. Par contre, la salle de toilette, digne de la plus haute admiration quant à la propreté, à la disposition et à la disponibilité de tout ce qui peut être agréable pour un voyageur (musique de fond très douce, serviette blanche immaculée, savon parfumé, parterre brillant, lavabos sophistiqués, etc. ne peut vous laisser indifférent pour émettre une bonne impression sur le pays et son état d'avancement). (Jamais à comparer avec le nôtre). Encore une escale à Houston, immense aéroport qui distille une flopée d'avions en toutes directions (un des plus importants du monde), me permet de constater le nouveau dispositif de sécurité mis en place depuis le coup de choc de l'avion contre les deux tours jumelles de New York. Un triple contrôle filtre tous les passagers et gare aux connotations de noms d'origine arabe. Il subira un contrôle en rabiot des plus sympathiques. Civilisation oblige ! J'arrive malgré tout à Lima sain et sauf, légèrement abasourdi par 13 heures de vol. Aussitôt franchi les portes de l'aéroport, me voici pris d'assaut par une vague de débandades de «taxieurs» et de poltrons. Une horde indisciplinée qui s'agite bruyamment. Surpris et encore étourdi par la fatigue, je me rétracte en marche arrière vers les couloirs de l'aéroport. Les conseils du «guide du routard» me viennent en aide d'une façon récurrente pour me rappeler qu'il faudrait s'adresser qu'à des taxis portant numéros. De nombreuses plaintes confirment les malheureuses aventures de touristes candides. Compressé, j'ouvre un couloir avec mon seul sac en bandoulière vers la station. Bien poli, le chauffeur m'explique à travers Lima sa configuration à l'instar des villes américaines coupées en quadrilatères appelés « quadra » en espagnol. Le nom de Lima vient du fleuve « RIMAC » qui coule à travers celle-ci. Le cœur de la cité, si chère à Francisco Pizarro, son fondateur en 1535, n'a pas changé. « Voici la Plazza des Armas, et la cathédrale, où la momie du conquistador repose dans un sarcophage en verre ». Un carré d'arcade aux balcons coloniaux et de fenêtres aux ventaux de bois, rappelant quelques coins d'Andalousie. Toutes près, quatre églises chantent la gloire de l'architecture baroque espagnole : le Merced, sanctuaire d'une Vierge miraculeuse qui sauva la ville des pirates, «San Francisco» qui abrite les catacombes et une bibliothèque de 20.000 volumes. Saint Pedro dont la cloche nommée «abuela» (petite grand-mère) fut la première à saluer la déclaration de l'Indépendance de 1821. Mon hôtel, en plein centre, est un peu le rendez-vous des voyageurs sans valises. L'ambiance est chaleureuse, à la cafétéria c'est la connaissance sans protocole. A Lima il est important de savoir flâner. Cela permet de découvrir l'artisanat andin au marché et d'aller savourer un «cerviche» (marinade de poissons ou de crevettes) dans un des petits restaurants qui jalonnent le front de mer. Une visite au musée d'anthropologie et celui de l'or s'impose afin de découvrir toutes les facettes des diverses civilisations précolombiennes et le passage des conquistadors. La richesse de ces musées n'a d'égale dans aucun pays latino. Les vitrines et les cimaises se suivent dans des couloirs en enfilade et à travers leurs artéfacts, se déroule l'histoire évènementielle du Pérou. C'est le musée le plus riche en matière d'or. Déambulant au hasard, je fus attiré sur la place Sans Martin par des attroupements qui rappellent les cercles de la place Djamaa El Fna de Marrakech au Maroc. Surélevé sur une mini-estrade, un citoyen lambda harangue la foule par un discours politique enflammant laissant voltiger tous les mots galvanisants d'inspiration marxiste et maoïste. Cette méthode découle de la tradition anglaise qui jusqu'à ce jour se tient dans quelques jardins de Londres. Cette opposition populaire non structurée fait partie de la mouvance révolutionnaire depuis Bolivar, un des libérateurs de l'Amérique latine. A quelques pas de là, des grappes de policiers bien casqués discutent peut-être sur leur sort par rapport à cette coulée diatribe politicienne. Ils sont là à titre préventif, veillant sur la démocratie et autres débordements. Je regagnais un peu songeur sur cette vision, la situation contradictoire dans le monde arabe et en particulier au Maghreb dominaient par toutes sortes de maladies infantiles telles que la corruption ou le népotisme. La tolérance et les soubassements de la démocratie sont absents aux créneaux porteurs de la politique. En 1988, le «Sentier Lumineux», un mouvement révolutionnaire avait déclenché «la guerre populaire» dans les montagnes d'Ayacuchuo, aux contreforts de l'Amazonie et aux bidonvilles de Lima. A-t-il fait avancer la démocratie ? La pauvreté y demeure avec l'injustice s'abreuvant aux sources de l'Etat.