Le président du Haut Conseil islamique (HCI) Bouabdallah Ghlamalllah a prévenu, hier lundi, sur la présence de sectes religieuses se prévalant, notamment de courants soufis, en Algérie. Après l'apparition, au mois d'août dernier, d'une secte inconnue jusque-là, près de Mostaganem, la tariqa karkarya', l'ancien ministre des Affaires religieuses a mis en garde contre la dangerosité de telles sectes sur la pratique religieuse dans le pays. «Ce qui a étonné le plus les Algériens, c'est cet accoutrement de la Karkarya, qui n'a pas de nom, et ils disent que c'est une méthode vestimentaire soufie. Mais, les soufis ne se distinguent pas par leur accoutrement et cela ne correspond pas aux préceptes de la religion musulmane», a commenté le président du HCI. Pour lui et face à la recrudescence de ces sectes, se prévalant du soufisme, notamment, il y a «la loi, qui protège celui qui respecte ses convictions, et pour ceux qui ont inventé des nouvelles méthodes et des sectes et demandent une liberté de culte, je dis que cela n'a aucun fondement, car il n'y a pas d'ancrage social ou religieux». Il ajoute qu' «il faut qu'il y ait des fondements, soit dans les livres saints, comme l'Islam, le Christianisme ou le Judaïsme. Si cela existe et a des fondements, qui ont des adeptes en Algérie, ils peuvent pratiquer leur culte, en toute liberté, mais ceux qui inventent leur religion et demandent qu'ils la pratiquent, personne ne peut le protéger, le droit algérien est clair, il y va de la protection de l'Algérie et des Algériens.» Au mois d'août dernier, une nouvelle secte religieuse, la tariqa Karkarya' était apparue, à l'ouest du pays, dans la daïra de Sidi Lakhdar, dans la wilaya de Mostaganem, et avec un accoutrement bizarre de ses adeptes, des djellabas en damier avec les couleurs de l'arc-en-ciel. Le ministère des Affaires religieuses aurait ouvert une enquête sur cette nouvelle secte religieuse. Par contre, ce qui mène la vie dure au même ministère et aux autorités, c'est bien la secte des Ahmadis', dont plusieurs membres ont été interpellés. Selon le ministre des Affaires religieuses Mohamed Aïssa, la secte des Ahamadites, ou Al Ahmadya, «est non musulmane, attente aux principes de l'Islam» et a été interdite en Algérie comme dans le reste des pays musulmans, depuis les années 1970. «L'interdiction des activités de la secte d'Al Ahmadiya, en Algérie, est basée sur une fetwa' décrétée par le Haut Conseil Islamique (HCI) dans les années 1970», avait rappelé M. Aïssa, et a expliqué sa position par la décision des Conseils scientifiques, qui se sont référé à cette fetwa' et celle du défunt Cheikh Ahmed Hamani, qui avait qualifié cette secte de groupe égaré et en dehors de l'Islam». Il faut, dès lors, unifier les fetwas' et les interprétations de l'Islam, a souligné, par ailleurs, le président du HCI pour qui «cela ne dépend pas du HCI, mais de commissions scientifiques réparties dans les wilayas. Mais, l'exégèse (Idjtihad) revient au HCI», explique M. Ghlamallah, pour qui «s'il y a une question nouvelle, il y a une entraide entre le HCI et les commissions scientifiques, dans le cadre du dialogue et la concertation et en fonction de notre héritage culturel et religieux.» Et «tout le problème est là: on ne prend que ce qui nous concerne, socialement et culturellement, pas les concepts des autres pays comme l'Arabie saoudite dont les conditions sociales et les référents religieux sont différents de ceux des Algériens». Plus direct, il invite les adeptes des courants religieux provenant de la péninsule arabique qu' «on ne va pas transformer des Algériens en Saoudiens, ou vice- versa». Sur le cas de la minorité musulmane du Myanmar (ex-Birmanie), les Rohingyas, le président du HCI condamne «toute attaque contre les musulmans, et même si elle n'est pas musulmane, cela ne peut-être toléré.» Selon lui, «il faut que les pays islamiques prennent une position commune pour défendre les Rohingyas, car ils n'ont été attaqués que par rapport à leur religion, et cela ne doit pas légitimer qu'on les pourchasse et qu'on les expulse. Même le bouddhisme ne permet pas cela». Pour l'ex-ministre algérien des Affaires religieuses, il faut que les ONG islamiques et la société civile internationale, y compris aux Etats-Unis, bougent pour défendre cette minorité religieuse du Myanmar. Ghlamallah estime que le monde musulman «est en crise du fait de ce qui se passe à l'intérieur des pays arabes, en Syrie, en Irak, au Yémen...» Par ailleurs, sur le dossier de la Chrétienté en Algérie, il a expliqué que «nous n'avons pas de statistiques exactes sur le nombre des chrétiens algériens, il n'y a que des rumeurs.» Certes, «il y a des cas individuels comme il y a des chrétiens qui entrent dans l'islam. Et si des Algériens deviennent des chrétiens, il faut qu'on fasse des études anthropologiques pour savoir pourquoi ces jeunes sont passés de l'Islam à la Chrétienté.» Pour autant, M. Ghlamallah estime que «si un Algérien veut devenir chrétien, personne ne peut le faire changer d'avis, il est libre avec sa conscience.» Sur la polémique de besmallah' qui fait rage entre le ministère de l'Education nationale et certains courants religieux, il a indiqué que «les livres de Mathématiques n'ont pas besoin qu'il y ait de besmalla'. Il y a des cas où il n'est pas besoin de cela, comme la mention RADP dans certains manuels». «Il ne faut pas créer des problèmes factices», a-t-il dit, expliquant que «nous (HCI, Ndlr) travaillons en concertation avec le ministère de l'Education ou de l'Enseignement supérieur, et nous allons faire des remarques sereines sur ce sujet au ministère de l'Education.» Sur les muftis qui officient dans certaines chaînes de TV privées, Ghlamallah a estimé que ces TV doivent être contrôlées par l'ARAV, qui doit travailler avec le ministère des Affaires religieuses, car «il faut mettre un terme à toute activité qui divise les Algériens». «Ces chaînes TV véhiculent des idées et des référents non acceptables en Algérie.» Enfin, il a annoncé l'installation, hier lundi, de nouveaux membres du HCI, dont l'élément féminin, car «le HCI doit bénéficier des compétences, quelles qu'elles soient, masculines ou féminines.» Le HCI est composé de 15 membres, dont le président.