Tension entre Madrid et Rabat, déjà divisés sur la question du Sahara occidental. En effet, empêtré dans une guerre aux conséquences imprévisibles au Sahara occidental, et un danger avéré pour la paix dans toute la région, le Maroc a ouvert un autre front hostile avec l'Espagne, en décidant de sortir le dossier des deux enclaves de « Ceuta et Melilla », plus de six siècles après leur annexion par Madrid, à la fin de la Reconquista espagnole, en 1497. En effet, l'Espagne, réagissant illico presto à la déclaration du Premier ministre marocain Saad-Eddine El Otmani, au sujet du vœu de Rabat de « rouvrir le dossier » des deux enclaves du nord du Maroc, a convoqué, en urgence, lundi l'ambassadrice du Maroc à Madrid. Dans des propos tenus samedi à la chaîne saoudienne «al-Sharq», le chef du gouvernement marocain, Saad-Eddine El Otmani, a proposé d'ouvrir la question de la souveraineté sur ces territoires : « Ceuta et Melilla est une question qui doit s'ouvrir », a déclaré le Premier ministre, suscitant un vif courroux de Madrid. La question des deux enclaves « reste en suspens depuis cinq ou six siècles, mais un jour elle pourrait s'ouvrir » a déclaré le chef du gouvernement marocain à la Chaîne saoudienne. Le ministère espagnol des Affaires étrangères a immédiatement convoqué l'ambassadrice du Maroc à Madrid, Karima Benyaich. « L'Espagne attend de tous ses partenaires le respect de la souveraineté et de son intégrité territoriale», a réagi le ministère espagnol des Affaires étrangères, demandant à l'ambassadrice du royaume chérifien des « explications sur les déclarations du Premier ministre marocain », selon un communiqué publié à la suite de l'entretien. Les villes de Melilla et de Ceuta sont sous souveraineté espagnole depuis le XVIe et le XVIIe siècle respectivement. Elles sont les seuls vestiges des territoires africains anciennement contrôlés par l'Espagne. La controverse survient à un moment délicat dans les relations entre les deux pays, en particulier sur la question du Sahara occidental, ancienne colonie espagnole. Le renouveau de tension entre les deux parties, dans cette zone et la récente reconnaissance par le président sortant des Etats-Unis, Donald Trump, de la prétendue souveraineté marocaine sur ce territoire, ont relancé les désaccords sur cette question entre Rabat et Madrid. Le gouvernement espagnol demande pour sa part le respect des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l'ONU, qui considèrent le Sahara occidental comme « un territoire non autonome » et prévoient la tenue d'un référendum d'autodétermination. Les propos du Premier ministre marocain ont suscité les critiques de plusieurs partis politiques en Espagne, dont le chef du Parti Populaire (PP), Pablo Casado, qui a exhorté le gouvernement espagnol à « répondre immédiatement » car la souveraineté espagnole des deux villes et l'intégrité territoriale nationale « est inaliénable ». Le parti Vox' a également exigé une « réponse énergique » et a critiqué la « lâcheté » du gouvernement devant les « revendications expansionnistes de la tyrannie marocaine », qui « constituent un danger » pour la souveraineté espagnole. « L'ennemi sent la peur et la lâcheté de ce gouvernement », a déclaré «Vox» dans un message publié sur Twitter, repris par des médias ibériques.