Même si l'Administration américaine semble prendre son temps pour dévoiler tous les contours de sa nouvelle feuille de route, en matière de politique étrangère, les premières déclarations du nouveau locataire de la Maison Blanche, Joe Biden, tranchent radicalement avec les pratiques de son prédécesseur. Des positions franches qui suspendent plusieurs décisions diplomatiques adoptées sous l'ère Trump ont été clairement annoncées par le président américain, jeudi dernier, lors de son premier discours de politique étrangère. La couleur était en fait révélée depuis la signature d'un décret actant le retour des Etats-Unis dans l'Accord de Paris sur le climat, dès la première heure de son investisseur. Ainsi, parmi les plus importantes décisions figure la fin du soutien américain à la coalition saoudienne au Yémen, où les armes doivent se taire, comme l'a clairement laissé entendre le président américain. Une décision qui implique l'annulation des contrats de vente d'armes sophistiquées, aux Saoudiens notamment, qui étaient sur le point d'entrer en possession de munitions de précision suite à un marché conclu à la fin du mandat de l'ex-président. Une position qui conforte, quelque part, la politique étrangère de l'Algérie, l'un des rares pays arabes à ne pas avoir soutenu la coalition saoudienne, refusant toute participation dans cette guerre au Yémen. C'était très difficile de s'opposer aux Saoudiens qui ont formé, en 2016, cette coalition d'une dizaine de pays arabes (pays du Golfe, ainsi que l'Egypte, le Maroc et le Soudan), mais l'Algérie, qui n'était pas moins gêné de s'opposer au grand frère arabe, avait avancé le prétexte constitutionnel qui n'autorisait pas, anciennement, l'intervention de son armée hors des frontières du pays pour éviter de participer à ce qui est devenue de nos jours la plus grande catastrophe humanitaire du 21ème siècle. Cela permet-il d'espérer plus d'attention dans la politique étrangère américaine aux souffrances des peuples ? Il faut attendre pour voir, car les prétentions envers le Yémen, aussi bonnes soient-elles, ne devraient pas faire oublier que ce pays se trouve dans un Moyen-Orient appelé, en sus des relations avec la Russie, la Chine et les alliés US, à connaître de nouveaux rééquilibrages de la politique étrangère américaine, notamment le retour à l'Accord sur le nucléaire iranien, incluant le Yémen dans sa sphère d'influence. Pour l'Afrique du Nord, les attentes sont focalisées sur le dossier du Sahara Occidental ou sur ce que ferait l'Administration américaine du décret signé par son prédécesseur, reconnaissant la souveraineté du Maroc sur les provinces sahariennes ? Des voix s'élèvent, d'un peu partout dans le monde, pour demander au Président Joe Biden d'annuler ce décret de la honte, mais le concerné n'y fera aucune allusion dans son discours sur la politique étrangère. Cela veut-il pour autant dire qu'il n'y pense pas ? Pas sûr, car s'il n'en a pas parlé, comme le fait d'avoir fait l'impasse sur la stratégie US face à la Chine et l'Iran, ou encore le problème palestinien, il a affirmé que son pays allait rebâtir ses alliances et faire la promotion de la démocratie et des Droits humains. Avec Trump, Joe Biden et d'autres qui les ont précédés à ce titre, l'Amérique défendra toujours ses intérêts à travers sa politique étrangère, ce sont seulement les circonférences coopératives, ou les voies et moyens qui changent au gré des besoins. Trump a signé le décret reconnaissant la souveraineté du Maroc sur la Sahara Occidental en contrepartie de la normalisation par le Maroc de ses relations avec Israël. Son successeur ne ferait pas autant de la normalisation des relations des pays arabes avec Israël, son cheval de bataille.