La 34ème session ordinaire du sommet des chefs d'Etat et de gouvernements de l'Union Africaine a pris fin avec les élections des commissaires à la tête des différentes commissions pour lesquelles l'Algérie n'a présenté aucune candidature. Après épuisement des points inscrits à l'ordre du jour de cette session, et au-delà du thème qu'ils s'étaient choisis, les gouvernants africains ont fait de la crise sanitaire et de l'acquisition par le Continent du vaccin anti-COVID-19 leur cheval de bataille. Et c'est en début de soirée du samedi, que les élections des commissaires ont commencé. Le Président de la Commission exécutif de l'Union Africaine, le Tchadien Moussa Faki a été réélu par 51 voix sur les 55 des Etats membres. Candidat à sa propre succession, « Faki est le premier africain à ce poste à avoir recueilli autant de suffrages grâce à un travail de coulisses » pensent des diplomates. Lui-même a qualifié sa réélection de «vote de confiance historique et écrasant » dont il s'est dit « profondément honoré ». Il a salué l'arrivée de Monique Nsanzabaganwa, la gouverneure adjointe de la Banque nationale du Rwanda, comme vice-présidente. L'Algérien Smaïl Chergui, a cédé son poste de Commissaire « Paix et sécurité » qui regroupe pour cette fois un autre ancien département «Affaires politiques », au Nigérian, l'ambassadeur Bankole Adegboyega Adeoye. Le nouveau CPS a été élu à l'unanimité (55 voix) après le retrait du candidat sud africain. Le poste de Commissaire à l'agriculture, Economie rurale et Développement durable est revenu à l'Angolaise. Josefa Leonel Correia SACKO après qu'elle ait battu le candidat marocain. Le nouveau commissaire au Développement économique est le Zambien Albert Muchanga. La commission à l'infrastructure, à l'énergie, à la numérisation et au tourisme a gardé son Commissaire l'Egyptienne Dr Amani Abou Zeid qui a succédé à elle-même. La session devait élire aussi des commissaires à l'éducation et aux sciences, au Commerce et l'Industrie, à la Santé, aux Affaires humanitaires. Au nom du principe d'une présidence tournante annuelle, le président Sud Africain Cyril Ramaphosa a cédé son siège au président de la république démocratique du Congo, Félix Tshisekedi. «Il faut sortir l'UA des salles de réunions », a recommandé de prime abord le nouveau président en exercice. Premiers commentaires à chaud de diplomates algériens, « on va souffrir avec le nouveau Président de la RDC ». Inquiétude fondée puisque la ministre d'Etat, ministre des affaires étrangères de la RDC, Marie Tumba Nzeza a inauguré le 19 décembre dernier aux côtés de son homologue marocain, Nasser Bourita, un Consulat Général à Dakhla, la ville sahraouie occupée». L'an prochain, au nom du même principe, la présidence tournante de l'UA reviendra au Sénégal « qui entretient d'excellents rapports avec le Maroc », notent-ils. Pas qu'eux qui sont alliés du Maroc, le Tchadien Faki qui décroche son deuxième mandat de quatre ans à la tête de la commission exécutive de l'UA est issu du pays du président Idriss Deby « très proche des Marocains », affirment nos sources. Autres inquiétudes de diplomates «un Nigérian à la tête de la CPS pourra contredire les positions de l'Algérie parce que son pays a amorcé récemment un revirement de sa position sur le Sahara Occidental. «Son président a déjà fait part de la neutralité de son pays vis-à-vis de la question sahraouie», estiment-ils. L'Algérie n'a présenté aucun candidat à aucun poste de commissaire. Ce qui déroge à ses habitudes diplomatiques et notamment à sa prestance au sein de l'organisation panafricaine. Rien n'explique le choix d'une telle abstention surtout en ces temps de repositionnement des puissances du monde et de leurs tentatives de dislocation des pays qu'ils considèrent «damnés». Les diplomates redoutent une première grande dérive institutionnelle africaine qui pourrait se tramer derrière la nouvelle configuration des responsabilités au niveau de l'UA. «Avec ses alliés notamment à la tête de la commission Affaires politiques, Paix et Sécurité, le Maroc va chercher à amender la Charte de l'UA pour arriver à geler la participation de la RASD», pensent-ils. Et dire, s'exclament-ils, « que rien ne pouvait se faire au sein de l'UA sans l'aval de L'Algérie ! ». Les changements géopolitiques provoqués dans la région par les lobbys sionistes, les Etats-Unis, la France et les pays du Golfe, l'ampleur des enjeux, la complexité des défis obligent aujourd'hui, disent les diplomates, «les plus hautes autorités du pays à faire preuve du sens profond de l'Etat et des institutions légitimes pour préserver les intérêts stratégiques nationaux et au-delà se recréer une place diplomatique prépondérante au sein du Continent».