Ce n'est pas sans surprise que la demande du Maroc d'adhérer à l'Union africaine (UA), adhésion et non réintégration comme le laissent entendre certaines parties, a été acceptée lors des travaux de la 28e Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'organisation panafricaine, dans la capitale éthiopienne, Addis-Abeba. Le Maroc devient 55e membre de l'UA. Son Parlement a signé l'Acte constitutif et le pays reconnaît, de fait, la Rasd et accepte de siéger avec elle. Du moins, officiellement. C'est la condition pour valider l'adhésion. Il s'engage donc à s'y soumettre, alors que pendant des années il a contesté l'existence même de la Rasd, et le père du roi, en 1984, a quitté l'OUA parce que la Rasd y siégeait au même titre que lui. Le mois de septembre dernier, lorsque Mohammed VI a exprimé son souhait de se joindre à cette organisation, il a accompagné sa demande par une exigence simplement inacceptable : l'exclusion de la Rasd qui est un membre fondateur et qui n'a jamais transgressé un seul article de l'Acte constitutif. Surtout pas d'occupation d'un autre pays membre. Ce qui n'est pas le cas du Maroc qui continue d'occuper illégalement des territoires sahraouis et défie les organisations internationales qui le pressent d'aller vers le référendum d'autodétermination. On ne sait pas ce qu'il s'est passé exactement lors du vote pour cette adhésion du Maroc à l'UA, alors que beaucoup s'attendaient à un report pour ne pas dire carrément un rejet officiel de la demande. Il y a quelques jours, le conseiller juridique de l'organisation panafricaine, interpellé par des pays dont l'Algérie, l'Afrique du Sud et le Nigeria sur le fait qu'une telle adhésion est en contradiction avec les principes contenus dans l'Acte constitutif, a rendu un avis défavorable à la demande marocaine. Dans son rapport, la commission juridique a écrit que «la demande d'adhésion du Maroc soulevait des questions fondamentales». Vu sous cet angle, le Maroc n'avait aucune chance d'être admis à l'UA. Il n'empêche qu'à la fin de la journée du lundi, il a été officiellement intégré. Réagissant à cette annonce, le Congrès national sud-africain (ANC) a déclaré qu'il «regrette la décision prise par l'Union africaine (UA) d'admettre à nouveau le Maroc dans l'organisation». Se montrant plutôt optimiste, le ministre des Affaires étrangères sahraoui, Mohamed Salem Ould Salek, a affirmé que «l'admission du Maroc au sein de l'Union africaine est une victoire pour le peuple sahraoui, car le Maroc a finalement accepté de s'asseoir aux côtés de son voisin, la République sahraouie». Dans une déclaration à l'APS, le ministre sahraoui a affirmé que «du moment que le Maroc n'a pas posé de conditions et n'a pas fait de réserves sur l'Acte constitutif de l'UA, nous le prenons au sérieux et nous acceptons qu'il soit admis à l'Union sur la base de l'Acte constitutif dans son ensemble». Aussi, «la République sahraouie souhaite la bienvenue au Maroc qui va siéger aux côtés de la Rasd, et tous les Etats africains, y compris ceux amis du Maroc, ont affirmé qu'ils travailleront pour que la République sahraouie et le Maroc règlent leur conflit». Le représentant sahraoui poursuivra : «La République sahraouie est disposée à négocier avec le Maroc pour qu'il mette fin à l'occupation de nos terres et ce, sur la base de la légalité internationale et du respect des droits du peuple sahraoui.» Hier, au deuxième jour des travaux du sommet, quelques heures après l'annonce officielle de l'adhésion du Maroc, l'Union africaine a appelé le Conseil de sécurité des Nations unies «à assumer ses responsabilités en restaurant le plein fonctionnement de la Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara occidental (Minurso)». La Conférence a fait part de sa «profonde préoccupation de l'impasse persistante dans la recherche d'une solution au conflit au Sahara occidental» et a souligné «la nécessité urgente d'efforts internationaux additionnels pour faciliter un règlement rapide du conflit». Les dirigeants africains ont réitéré leur appel à l'Assemblée générale de l'ONU pour fixer une date pour la tenue du référendum d'autodétermination du peuple sahraoui. De son côté, l'intergroupe «Paix pour le Sahara occidental» au Parlement européen a exhorté, le même jour (mardi), dans un communiqué rendu public, l'Union européenne (UE) et ses Etats membres à «exiger la libération immédiate des prisonniers sahraouis du groupe de Gdeim Izik et à condamner clairement le recours par le Maroc à la torture pour obtenir des aveux». Côté algérien, la désignation du président Bouteflika par ses pairs comme vice-président de l'Union africaine, ajoutée à la réélection de Smaïl Chergui au poste de Commissaire à la paix et la sécurité (CPS) de l'UA, constituent des balises sûres contre toute tentative de manœuvres malsaines de la part du Maroc s'il se risquait à faillir à ses engagements envers l'Union africaine et la Rasd. Ajouté à cela la nomination du Tchadien Moussa Faki Mahamet à la présidence de la Commission de l'UA et qui est un ami très proche de l'Algérie et dont les positions sont parfaitement convergentes avec celles de l'Algérie. K. M.