3,5 tonnes de kif saisies par L'ANP    El-Oued : le Chahid du devoir national le pilote Lieutenant-Colonel Bekkouche Nasr inhumé au cimetière de Sidi-Youcef    Refus d'extradition d'Abdeslam Bouchouareb : le Gouvernement algérien relève l'absence de la coopération française    Les résultats du fonctionnement continu au port de Bejaia sont "encourageants"    Blida: début d'approvisionnement en eau dessalée depuis la station Fouka 2 à Tipaza    Palestine: l'Algérie dénonce au Conseil de sécurité le "deux poids, deux mesures" dans l'application du droit international    France : Mélenchon dénonce les attaques répétées de Retailleau contre l'Algérie    M. Merad préside le lancement officiel de la plateforme numérique "Formulaires services de police"    Décès de la journaliste Fatima Ould Khessal : la Direction générale de la communication à la Présidence de la République présente ses condoléances    Célébration de la Journée internationale des forêts : des campagnes de reboisement et de sensibilisation à la préservation du patrimoine forestier dans l'Ouest du pays    Vers l'inscription du patrimoine archéologique de Tébessa sur la liste indicative du patrimoine mondial en Algérie    Mondial 2026: l'équipe nationale intensifie sa préparation avant le match contre Botswana    CHAN 2024: premier entraînement à effectif complet depuis le début du stage    Le FLN réaffirme son plein soutien aux positions diplomatiques judicieuses de l'Algérie    Cible principale, l'Algérie et les Algériens    Secousse tellurique de Médéa: une réplique de 4,0 degrés enregistrée    Guterres "horrifié" par la mort d'un employé de l'ONU dans une frappe sioniste contre Ghaza    Décès de Fatima Ould Khissal, ancienne journaliste et animatrice à la Radio nationale    Tournoi de la presse : Les 8es de finale lancés    A Gaborone pour la victoire...    Coupe d'Algérie 2025 (1/4 de finale) : Les dates et les stades connus    Appel à la vigilance des agriculteurs    Près de 100.000 personnes ont dû fuir des violences armées    A l'horreur s'ajoute l'asphyxie humanitaire    Près de 11 000 tonnes de produits impropres à la consommation saisies à l'Ouest    Plus de 800 g de kif traité saisis, une arrestation    Plus de 100 g de kif traité, 401 comprimés de psychotropes saisis, trois arrestations    Nadir Larbaoui préside une réunion du Gouvernement    « L'Algérie est un modèle à suivre en matière de lutte contre le terrorisme »    L'autre lutte pour le recouvrement de l'indépendance    Guelma accueille la 9e édition    Dans l'imaginaire littéraire et artistique algérien    Le documentaire "Les prisonniers algériens de Sainte-Marguerite" projeté à Alger    Mondial 2026/Botswana-Algérie: premier entraînement des Verts à Gaborone    «Loyauté envers les martyrs»    Manifestations à Washington et New York pour exiger la libération d'un étudiant miilitant palestinien        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Les grandes sociétés américaines sont-elles au-dessus des lois ?

NEW YORK - Fondateur de l'économie moderne, Adam Smith explique que la poursuite des intérêts privés - les profits - bénéficiera toujours au bien commun. C'est sans doute vrai dans certaines situations, mais de toute évidence pas systématiquement. De la même manière que la soif de bénéfices des banques a conduit à la crise financière de 2008, c'est bien le désir de profits de Purdue et d'autres sociétés pharmaceutiques qui a engendré la crise des opiacés, et le soutien de Texaco au régime de Franco qui permit aux fascistes de triompher lors de la guerre civile espagnole.
Les exemples de cette litanie perverse ne manquent pas. Mais parmi les pires abus liés à l'avidité des grandes entreprises figure l'esclavage des enfants. Les amateurs de chocolat à travers le monde l'ignorent peut-être, mais certains de leurs plaisirs coupables sont potentiellement le fruit du travail d'enfants esclaves.
Nestlé, Cargill et autres grandes entreprises de l'alimentaire confrontées à ce type d'accusations parviennent à échapper à toute explication devant un tribunal. Elles-mêmes ou leurs filiales étant basées aux Etats-Unis, ces sociétés considèrent ne pas avoir à rendre de comptes pour des écarts de conduite commis en lointaine Afrique, bien conscientes de l'absence de système judiciaire efficace dans les pays au sein desquels des enfants sont exploités.
Par ailleurs, même si le jugement d'un tribunal était rendu à l'étranger contre elles, le prix à payer pour ces sociétés resterait faible. Elles se contenteraient de délocaliser leurs opérations, et il serait alors difficile voire impossible pour un pays pauvre d'exécuter le jugement prononcé.
Ces problématiques intervenaient toutes dans une affaire jugée cette année devant la Cour suprême des Etats-Unis. Dans le procès Nestle USA, Inc. v. John Doe I, et al./Cargill, Inc. v. John Doe I, et al., la Cour a débouté six Maliens qui demandaient réparation à Nestlé et Cargill pour leurs souffrances lorsqu'ils étaient enfants esclaves. Plutôt que de se prononcer sur le fond de l'affaire, la Cour a rendu une décision à 8 contre 1 sur la question juridique plus étroite de savoir si une société américaine pouvait se voir reprocher des préjudices infligés à autrui à l'étranger. La loi US Alien Tort Statute ne saurait s'appliquer « extraterritorialement », a considéré la Cour, car cela équivaudrait à prolonger le droit américain au-delà des frontières des Etats-Unis.
Or, les Etats-Unis opèrent évidemment très souvent de manière extraterritoriale, par exemple en punissant des entreprises étrangères pour violation des sanctions contre l'Iran. La différence dans cette affaire, c'est que les sociétés mises en cause (ou leurs filiales) étaient américaines. En se prononçant en leur faveur, la Cour a évité d'avoir à répondre à la question de savoir comment exiger de sociétés participant à des comportements illicites à l'étranger qu'elles rendent des comptes. Devant quel tribunal les juger si ce n'est aux Etats-Unis ?
En l'absence de toute responsabilisation, rien n'incite réellement les grandes entreprises américaines à revoir leur comportement. Si la possibilité leur est conférée de proposer à moindre coût en rayons leur chocolat favori issu de fournisseurs recourant au travail des enfants, les entreprises peu scrupuleuses - catégorie qui inclut évidemment ces grandes sociétés - adhéreront strictement à la logique de la concurrence de marché, et le feront volontiers.
Qui protégera alors les enfants ? Intervient dans cette affaire l'une des valeurs fondamentales des Etats-Unis : le respect des droits de l'homme. Il est clairement dans l'intérêt de l'Amérique de montrer au reste du monde que ses grandes entreprises se conforment à ses valeurs, d'autant plus à l'heure où les projecteurs médiatiques internationaux sont braqués sur les violences policières commises contre les Afro-Américains dans le pays.
Aux côtés d'Oxfam, nous avons remis à la Cour suprême un argumentaire dans lequel nous affirmons qu'il serait dans l'intérêt économique des Etats-Unis d'exiger des sociétés américaines participant à des conduites illégales qu'elles rendent des comptes, quel que soit le lieu de survenance des méfaits. Nous sommes convaincus que la responsabilité sociale d'entreprise constitue une exigence payante à long terme - pour les consommateurs comme pour les entreprises - dans les pays qui appliquent cette notion.
En effet, les Etats et les entreprises à la réputation saine peuvent attirer davantage de capitaux et de meilleurs employés que leurs concurrentes moins éthiques, et leurs produits séduiront une génération de consommateurs de plus en plus conscients. Les jeunes travailleurs sont particulièrement sensibles à ce que leurs employeurs accomplissent et défendent. C'est la raison pour laquelle de nombreuses entreprises ont pris position contre certaines lois défavorables au vote pour tous, et adopté des objectifs de réduction des gaz à effet de serre.
Les grandes entreprises sont malheureusement encore beaucoup trop nombreuses à privilégier les profits à court terme. Ayant travaillé activement pour éviter d'avoir à s'expliquer en justice, Nestlé et Cargill ont toutefois formulé des déclarations standardisées condamnant l'esclavage des enfants. Mais si telle est leur position, pourquoi ne pas l'avoir défendue devant la Cour ? De toute évidence, leurs avocats généreusement rémunéré auraient largement fait le poids face aux représentants des demandeurs maliens. Si les deux sociétés avaient perdu, cela n'aurait certainement pas été par manque de conseil juridique.
Comment faire en sorte que les grandes entreprises ne commettent pas à l'étranger ce qu'elles n'oseraient jamais tenter dans leur pays ? La mondialisation a propulsé cette question à l'agenda, à l'heure où les sociétés occidentales développent leur recours à des pays pauvres dénués de véritable cadre légal. L'extraterritorialité n'est pas la question. Il s'agit avant tout de mettre fin à une course vers le bas. L'Amérique doit montrer au monde qu'elle et ses entreprises s'engagent pour la morale, sans double langage.
Dans le même temps, Cargill, Nestlé et autres sociétés accusées d'enfreindre les droits de l'homme et de mettre à mal l'environnement doivent être jugées par le tribunal de l'opinion publique. Car les efforts démesurés qu'elles déploient pour échapper à la responsabilité de leurs actes en disent long.
Traduit de l'anglais par Martin Morel
1- Lauréat du prix Nobel d'économie, est professeur à l'Université de Columbia, et membre de la Commission indépendante pour la réforme de l'impôt international sur les sociétés
2- Professeur en entreprises sociales à la Columbia Business School


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.