Moins de deux ans après la signature de l'arrêté interministériel, du 22 décembre 2021, portant ouverture d'archives relatives à la Guerre de Libération nationale, et rendant communicables quinze ans d'avance les documents relatifs aux affaires portées devant les juridictions et à l'exécution des décisions de justice, ainsi que les documents relatifs aux enquêtes réalisées par les services de la police judiciaire « dans le cadre d'affaires relatives à des faits commis en relation avec la guerre d'Algérie entre le 1er novembre 1954 et le 31 décembre 1966», la France a pondu un autre arrêté, paru dimanche 27 août 2023 au Journal Officiel, en vue d'assouplir davantage l'accès à ses archives sur la Guerre d'Algérie. Désormais, la consultation des dossiers impliquant des mineurs sera autorisée. Chose que réclamaient historiens et familles. Le précédent arrêté stipulait qu'afin de «garantir l'équilibre qui doit présider à la politique d'accès aux archives, le gouvernement a, toutefois, estimé nécessaire de préserver certaines informations encore particulièrement sensibles et, ainsi, exclure du champ d'application de l'arrêté les documents, en très petit nombre, qui relèvent du délai de communicabilité fixé par la loi à cent ans». Dans ce cadre précis, l'arrêté souligne que «la consultation anticipée de ces documents pourra, toutefois, toujours être demandée à titre individuel». Finalement, le gouvernement français a décidé de les rendre accessibles à quiconque en fait la demande. Rappelons qu'en novembre 2022, l'historien Marc André avait regretté dans une tribune publiée par le journal Le Monde' les difficultés d'accès à ces documents et «informations sensibles», principalement l'exclusion des dossiers impliquant des mineurs - les moins de 21 ans, en raison de la législation de l'époque -, toujours soumis au délai de classification de 100 ans. En raison de cette limitation, couplée à plusieurs autres, «la majorité des dossiers se referment», relevait l'historien. Alors que l'arrêté de 2021 parlait de documents en «très petit nombre» ! «Cette gestion bureaucratique conduit à ignorer la réalité d'une guerre menée par des jeunes. Cela est vrai tant dans l'immigration algérienne en France que dans les maquis, les réseaux urbains et les prisons où les indépendantistes, leurs soutiens, les réfractaires, les appelés avaient pour nombre d'entre eux autour de 20 ans lors de leur engagement», précisait pour sa part l'historien. «Suffisamment majeur à l'époque pour avoir la tête tranchée, il est aujourd'hui suffisamment mineur pour voir son dossier soustrait de la dérogation générale», s'indignait Marc André, dont les critiques ont été reprises par des médias algériens. Ainsi, le nouvel arrêté, paru dimanche et daté du 25 août 2023, supprime l'exclusion de consultation pour les dossiers impliquant un mineur. Mais, il reste toujours des exclusions concernant les documents et informations classifiés, dont la communication «porte atteinte à l'intimité de la vie sexuelle des personnes» ou à «la sécurité de personnes nommément désignées ou facilement identifiables impliquées dans des activités de renseignement», relève le nouvel arrêté. Ce qui referme également de nombreux dossiers, selon Marc André. Ce nouvel assouplissement s'inscrit dans la politique d'apaisement décidée par Emmanuel Macron durant son premier quinquennat, après les recommandations du rapport de Benjamin Stora sur le conflit mémoriel, entre l'Algérie et la France, sur le passé colonial. Dans ce contexte, deux autres arrêtés relatifs aux archives de la guerre d'Algérie avaient déjà été publiés par le ministère de la Culture, le premier, daté du 9 septembre 2019, portant ouverture des archives relatives à la disparition de Maurice Audin, et le second, daté du 9 avril 2020, portant ouverture d'archives relatives aux disparus de la guerre d'Algérie. Ce qui en fait quatre arrêtés en quatre ans. Les «documents classifiés» des archives de la guerre d'Algérie sont encore nombreux.