Le docteur Bouchareb Bilal est connu pour être l'un des premiers spécialistes algériens en endocrinologie. Ancien de la faculté de médecine de Lyon, il lui est reconnu le traitement du diabète de la stérilité, l'hypertension artérielle, l'impuissance... Sur le terrain, il s'est imposé en s'engageant à fond dans la lutte contre le fléau du siècle qu'est le diabète. Il exerce à Oran où nous l'avons rejoint en son cabinet au 21, rue Larbi Benmhidi afin qu'il éclaire nos lectrices et lecteurs sur le diabète. Réflexion : Docteur Bouchareb, qu'est-ce que le diabète ? Dr Bouchareb : D'abord, permettez-moi de corriger votre question. Vous voulez me demander ce qu'est le diabète sucré. Oui, chez nous on entend toujours par « diabète » le diabète sucré. C'est dans notre langage courant. Une petite leçon de chose. Qu'est-ce que l'insuline et à quoi sert-elle ? L'insuline est une molécule secrétée par les cellules béta des îlots de Langerhans de notre pancréas. A quoi sert-elle ? Elle sert à empêcher la glycémie de trop monter et de la faire baisser quand elle monte au-delà de la norme. C'est une hormone hypoglycémiante. Qu'est-ce que la glycémie, me demanderez-vous ? La glycémie est la concentration de glucose, le « sucre », dans le sang ou plutôt dans le plasma sanguin. Quand vous mangez, la glycémie a tendance à augmenter grâce à l'apport en glucose qui est notre source principale d'énergie. L'insuline est secrétée et régulée dans un organisme normal. Cette insuline se fixe à des récepteurs situés sur la membrane des cellules du foie, du tissu graisseux, des muscles et fait pénétrer le sucre dans les cellules. On parle de « diabète » quand le pancréas ne produit plus suffisamment d'insuline ou quand l'organisme n'utilise pas correctement celle-ci. Réflexion : Quels sont les signes et symptômes du diabète ? Dr Bouchareb : Je vous cite ces signes et ces symptômes sans tenir compte du degré d'atteinte du malade. C'est la soif importante, l'envie fréquente d'uriner de nuit comme de jour, l'augmentation de la faim, l'amaigrissement, la fatigue, les faiblesses, les fourmillements et les engourdissements dans les pieds et les mains, ajoutez à cela les infections de la peau, des gencives, de la vessie et des organes génitaux. Le patient est aussi sujet à l'impuissance, la mauvaise cicatrisation, les crampes, les troubles visuels ainsi que les pathologies cardiaques et vasculaires. C'est beaucoup ? Je voudrais vous dire que les problèmes et les souffrances sont énormes quand les reins, par exemple, sont atteints. Je vous épargne les amputations des membres inférieurs pour ne pas vous effrayer. Réflexion : Tant que ça, docteur ! Dr Bouchareb : Oui. Revenons au diabète. Il en existe deux types. Le type 1 et le type 2. Mais quels sont les facteurs de risques ? D'abord la prédisposition génétique, puis l'excès de poids. Ensuite viennent l'obésité abdominale, la sédentarité, l'hypertension artérielle et l'alimentation déséquilibrée (pauvre en fruits et légumes et riche en graisses animales et acides gras saturés). Le diabète de type 1 se caractérise par une production insuffisante d'insuline et celui de type 2 par la mauvaise utilisation par l'organisme de cette insuline. Le patient atteint par le type 1 doit s'administrer quotidiennement sa dose d'insuline, alors que celui atteint par le type 2 se contente d'un traitement moins lourd. Parmi les diabétiques, on compte 10 % d'atteints par le type 1 et 90 % par le type 2. Leur nombre total dépasse les 330 millions y compris des enfants. Imaginez un dépistage systématique et le nombre de diabétiques ! Le demi-milliard aurait été atteint depuis bien longtemps. Toutes les cinq secondes, une personne développe un diabète de par le monde. Réflexion : Quels sont vos conseils aux diabétiques, docteur ? Dr Bouchareb : La bonne hygiène corporelle, une activité physique régulière et une discipline alimentaire chez le diabétique sont des règles à ne jamais enfreindre. Je vous affirme d'emblée que le diabète ne tue pas, mais il complique la vie. Pour certains il la complique un peu et d'autres assez. Cela dépend de la prise en charge de la maladie qui doit être tout simplement acceptée, bien suivie et bien traitée. Le patient doit lui-même connaître à quoi il a à faire. Il ne doit pas fermer l'œil, car le diabète ne dort pas. Voici quelques conseils parmi mille en matière d'hygiène chez le diabétique. Je vous les offre sur cette brochure que m'a ramenée un patient consciencieux. 1. Lavez vos pieds tous les jours à l'eau tiède, savonnez et séchez bien entre les orteils pour éviter la macération et l'apparition de champignons. Evitez les bains de pieds prolongés. 2. Appliquez chaque jour une crème hydratante ou une huile pour conserver une peau souple. 3. En présence de corne (cors, durillon ou corne talonnière), retirez la avec une pierre ponce ; évitez les ciseaux, lames ou tout objet contondant, ainsi que les produits coricides. 4. Coupez régulièrement les ongles, à angle droit légèrement arrondi, pas trop courts, avec des ciseaux à bouts ronds ou mieux limez avec une lime en carton. 5. Changez de chaussettes tous les jours et préférez le coton et la laine aux matières synthétiques. Choisissez des chaussettes avec des coutures discrètes, non agressives. 6. Faites chaque jour des mouvements d'assouplissement des pieds. 7. Avant d'enfiler les chaussures, vérifiez toujours qu'aucun objet ne soit malencontreusement tombé dedans (gravier, aiguille, punaise…) 8. Portez des chaussures fermées, à lacets, à bout large, en bon état, de préférence avec un dessus en cuir souple et une semelle relativement rigide. Changez de chaussures un jour sur deux. 9. A la maison, portez des chaussons confortables fermés. 10. Ne jamais marcher pieds nus, couper les ongles à angle vif, prendre des bains de pieds avec de l'eau chaude, consulter un pédicure sans prévenir que vous êtes diabétique, porter de façon prolongée des chaussures neuves. En plus, la nourriture doit être saine et là je ne m'étalerai pas, car c'est tout un chapitre et très long encore. Si la pratique d'une activité physique est régulière l'insulinorésistance musculaire s'affaiblit et le diabète devient facile à équilibrer. Donc à vos baskets. Réflexion : Y a-t-il quelqu'espoir de voir le diabète vaincu comme le fut la variole ou la diphtérie? Dr Bouchareb : Oui, bien sûr. Sauf qu'il ne faut pas prêter l'oreille aux charlatans qui vous font croire que l'on guérit du diabète. Des chercheurs s'attèlent à vaincre le fléau. Actuellement, il est dit que la greffe partielle ou totale du pancréas est la meilleure solution pour vaincre le diabète. Des centaines de greffes ont été réalisées et le résultat se juge sur le long terme. Le grand espoir, c'est de se servir des cellules du patient et les transformer pour qu'elles muent en bêta-langerhansiennes qui seront injectées au patient. Rien n'est impossible. Réflexion : Un dernier mot. Dr Bouchareb : Le diabète doit être vaincu, c'est le fléau sanitaire du XXIème siècle et les patients ne devront pas perdre espoir. Inchallah.