La presse algérienne pluraliste a vingt et un ans. Aujourd'hui, pas moins de 40 quotidiens paraissent en arabe et en français. Présentée comme étant l'une des plus libres du monde arabe, souvent saluée, pour son courage face à un environnement hostile, la presse algérienne a constitué également un alibi pour un système qui n'admettait aucun changement véritable. Aujourd'hui les choses semblent amorcer un autre virage. L'annonce par le président de la République de la dépénaliser le délit de presse, même si elle a été jugée « tardive », a été accueillie avec « optimisme » par des professionnels de la presse, des universitaires spécialisés dans les sciences de l'information et des spécialistes du droit. L'abrogation éventuelle de l'article 144 bis du Code pénal prévoyant des peines d'emprisonnement pour le délit de presse, « vient en réponse à une revendication de l'ensemble de la famille de la presse ». Dans le sillage de l'Etat d'urgence, les autorités ont renforcé en 2001, à travers l'amendement apporté au code pénal, la coercition à l'encontre de la presse et des journalistes. La corporation de la presse s'était élevée depuis contre les articles 144 et 144 bis du code pénal qui sanctionnent les délits de presse y compris par l'emprisonnement pouvant aller jusqu'à cinq (05) années d'emprisonnement ferme. Revendication unanime de la corporation mais aussi de l'ensemble des démocrates, la nécessaire dépénalisation du délit de presse se pose aujourd'hui plus que jamais avec acuité. Tout autant que l'élaboration urgente et concertée d'un statut professionnel pour les journalistes. Fidèles au combat mené par leurs aînés, pour les libertés de la presse et d'expression, fidèles aussi aux sacrifices extrêmes payés par d'autres pour que vive l'idéal démocratique, les journalistes algériens appellent les pouvoirs publics à accélérer les réformes, à engager une concertation à grande échelle afin que chacune des parties concernées apporte sa contribution dans l'élaboration de la nouvelle loi sur l'information, et appellent aussi à la levée du monopole de l'Etat sur les médias audiovisuels. La dépénalisation du délit de presse, un pas supplémentaire vers la promotion de la liberté d'expression dans notre pays. La dépénalisation du délit de presse annoncée par le premier magistrat du pays lors de son dernier discours adressé à la nation semble convaincre les spécialistes. Ces derniers estiment que la ‘'démarche de pénaliser le délit de presse constitue un pas supplémentaire vers la promotion de la liberté d'expression dans notre pays''. Le chef de l'Etat, à travers son initiative, semble lui-même convaincu de la justesse de la démarche et tout aussi convaincu qu'un Etat démocratique ne peut se concrétiser sans un champ médiatique libre, loin de toute contrainte ou autre pression. Aujourd'hui, il nous est permis d'afficher un certain optimisme du fait que le délit de presse, en vigueur depuis 2001, sera, en effet, dépénalisé. La volonté du chef de l'Etat, à vouloir entamer les réformes dans les meilleurs délais, nécessite l'implication de tous les acteurs directs et indirects, qui sont tenus d'apporter des éclairages à tous les niveaux de manière de permettre une concertation à une plus large échelle. « La loi sur l'information, elle, introduira les repères d'une charte déontologique et complètera la législation actuelle, notamment à travers la dépénalisation du délit de presse », avait clairement indiqué le chef de l'Etat dans son discours du 15 avril. Dans ce contexte, le Centre algérien de défense de la liberté de la presse (CALP), la Fédération internationale des journalistes (FIJ), le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) et Reporters sans frontières (RSF) plaident, en effet, pour l'abrogation des dispositions relatives à la diffamation pénale, parce qu'ils estiment qu'elles contreviennent aux normes internationales sur la liberté d'expression. Des initiatives ont été lancées par les professionnels des médias depuis le début de l'année en cours pour demander de meilleures conditions d'exercice de leur métier. Revendication unanime de la corporation mais aussi de l'ensemble des démocrates. En effet, la dépénalisation du délit de presse a été instamment réclamée par la corporation qui souhaitait la révision ou l'abrogation des dispositions du code pénal relatives à la presse jugées «répressives». Les journalistes des secteurs public et privé, qui avaient lancé récemment une initiative appelée « Initiative nationale pour la dignité de la presse », réclament notamment l'activation de la loi sur l'information de 1990 et la création du haut conseil de l'information. Le canevas des revendications arrêté, dans le cadre de cette initiative, vise aussi la dépénalisation du délit de presse, la réactivation du Conseil de l'éthique et de la déontologie, ainsi que l'ouverture d'un débat officiel avec la presse algérienne. A fait ce que revendique la corporation de la presse aujourd'hui, n'est que légitime du fait que ces revendications ne sont que des droits acquis en 1990 et arrachés en 2001. Et depuis cette date, les spécialistes et l'opinion publique n'ont cessé de se poser des questions, sur l'indépendance des journalistes en Algérie ? Sur les contraintes auxquelles est confrontée la presse algérienne ? Comment est née la presse pluraliste en Algérie ? L'histoire de la presse pluraliste est récente. Elle a commencé avec le gouvernement de Mouloud Hamrouche qui, en 1990, a supprimé le monopole de l'Etat sur les médias. Pour aider au démarrage de la presse privée, il a offert aux journalistes du secteur public trois ans de salaire. Outre les avantages bancaires et des exonérations d'impôts, les professionnels de la presse ont bénéficié de locaux publics opérationnels. C'est ainsi que naissent les quotidiens El-Watan, le Soir d'Algérie et El-Khabar. Première publication privée ‘'Le Jeune Indépendant'', un hebdomadaire qui a paru en mars 1990. A la même période, les journaux partisans font aussi leur apparition. El-Mounqid, un hebdomadaire en langue arabe qui appartenait au FIS dissous et qui a atteint des tirages de 500 000 exemplaires. Le RCD lançait l'Avenir et Assalu, un journal en langue bèrbère. Le FFS reprend ‘'Libre Algérie'', un journal fondé à Paris. Alger républicain, reparaît sur la surface. Le MDA fait paraître ‘'El-Badil'' tandis qu'Echaâb et El-Moudjahid quotidiens étatiques continuaient de rouler à ce moment là pour le parti au pouvoir qu'était le FLN. En un temps record, les journaux dits ‘'indépendants'' fidélisent un large lectorat grâce à leur critique des hommes politiques et à leur dénonciation à la corruption. Mais tout çà n'a pas fait vibrer d'un iota le système en place. Une fois, Mouloud Hamrouche remercié, les marges de manœuvres de la presse commençaient à diminuer. Après l'éjection de Mouloud Hamrouche, la situation commençait à se compliquer davantage pour la presse et n'a guère évoluée. Le successeur de Hamrouche qui n'est autre que Sid Ahmed Ghozali, commença par suspendre l'édition arabophone de ‘'Parcours Maghrébins'', un hebdomadaire du secteur public. La situation se compliquait davantage, notamment après l'arrêt du processus électoral de 1992. Et depuis, la situation s'empirait notamment avec les restrictions liées à l'instauration de l'Etat d'urgence, qui ont vu l'introduction par Ali Benflis en 2001, alors chef du gouvernement, de la pénalisation du délit de presse. A quoi ressemble la presse écrite algérienne à l'heure actuelle ? Près de cinquante ans après la déclaration de l'indépendance de 1962, la question mérite d'être posée. En effet, depuis cette date, l'Algérie a été secouée par un certain nombre d'événements politiques, économiques et sociaux extrêmement marquants qui ont poussé les autorités à faire avancer le pays dans la voie de la démocratisation. Dans ce contexte, la presse a été également amenée à évoluer de façon significative, à l'image de la société algérienne dans son ensemble, jusqu'à cette fatidique année de 2001, où la presse a été déclarée ‘'Persona Non grata'' et les journalistes poursuivis en justice pour le fameux délit ‘'Diffamation pénale''.