Qu'est ce qui peut menacer ou fragiliser la puissance d'un Etat, d'une Nation. Des dangers exogènes à l'instar d'une agression venant d'une puissance étrangère, chose qui s'avère de nos jours quasiment improbable sinon assez rare selon des schémas traditionnels éculés. Ou est-ce plutôt des périls endogènes tels que le terrorisme dont la virulence s'est avérée ces dernières décennies extrêmement menaçante pour tous les états à fortiori que l'émergence et la propagation pandémique de ce fléau a été malheureusement aidée par les multiples potentialités qu'offre la mondialisation avec l'extrême porosité des frontières ainsi que la capacité du terrorisme à tisser des relations collusoires avec le crime organisé, le narcotrafic et la contrebande de toutes sortes, devenant ainsi transnational avec des techniques modernes de transfert de fonds; de blanchiment d'argent...formant un pouvoir parallèle qui, lorsqu'il ne réussit pas à influer avec ses alliances contrenature donc de manière moins ostensiblement agressive sur les politiques d'un pays, il arrive cependant à développer des menaces larvées subjectives ou concrètes, aux aguets et disposé à ressurgir lors des moindres faiblesses politiques analogues à celles que connaissent les Etats arabes. Ou est-ce aussi des troubles internes causés par des divisions ethniques comme il nous est donné de voir dans de nombreux pays africains où le plus souvent tout vole en éclats ; régimes politiques naufragés et peuples décimés. Mais le péril endogène le plus insidieux car inquantifiable, sournois et impliquant l'autorité même qui est chargée de le combattre, demeure sans nul doute la Corruption avec ses dommages directs et collatéraux. Les coups corrosifs portés par la corruption non pas celle que le citoyen lambda assimile de prime abord à l'argent chaque fois que l'on évoque cette tare mais plutôt celle qui devient avec le temps consubstantielle à l'exercice même du pouvoir et finit par éroder définitivement la confiance, le respect et la dévotion du citoyen à l'égard de sa patrie, de sa nation, de ses institutions. En 1999, à son arrivée au pouvoir, abasourdi par le piteux état dans lequel se vautraient les institutions, le président Abdelaziz Bouteflika lors d'une conférence de presse à Rimini affirma sans ambages : «Depuis que je suis au pouvoir, je suis arrivé à la conclusion que l'Etat algérien était bien pourri.» Certains diront que la réflexion du président est un énième truisme de mauvais goût, car cette pourriture proéminente, l'Algérie l'exhibait depuis déjà bien longtemps sans vergogne comme un furoncle que l'on ne pouvait plus dissimuler aux consciences meurtries et scandalisées. Seulement voilà, au-delà de ces anathèmes sempiternels et ponctuels, quels héros nationaux que l'amertume n'avait pas encore réduit au mutisme et à l'abdication auraient pu prévoir et éviter le soulèvement d'Octobre88 ainsi que les radicalismes meurtriers et génocidaires subséquents. Toujours à Rimini, Le président ajoutait «Je ne connais pas de pays au monde où la crise morale a débouché sur un si grand nombre de perversités et où l'Etat national a, à ce point vacillé.» Crise morale/Perversités/Etat vacillant ; Voilà un triptyque classique, une réaction en chaîne tellement puissante qu'elle conduisit lentement mais sûrement même la très puissante Rome vers un déclin inexorable. Rome était une civilisation, même sa chute avait quelque chose de grandiose. Mais nous, dont les turpitudes démesurées et blasphématoires nous ont rendus si insignifiants, qui se lamentera sur notre sort, valeureux citoyens. La corruption, ce péril endogène amenuise les potentialités d'une défense nationale et d'une sécurité nationale qui en étant les faces d'une même médaille sont appelées, lorsque la nation se transforme en fétu de paille, à investir, en s'appropriant légitimement des prérogatives illimitées, tous les secteurs qui sont le corps et l'âme de notre pays. Treize longues années passèrent après l'investiture de notre Président résolu à en découdre avec cet Hydre qui menaçait tout le monde, et en 2003 le Chef du Gouvernement, Monsieur Ahmed OUYAHIA, S.G du R.N.D à cette époque conclura également lors d'une conférence à l'Université d'été qui s'est tenue à Oran «Le pays est menacé et se trouve dans une période semblable aux débuts des années 90. Hier c'était le terrorisme, aujourd'hui c'est la rencontre de l'argent sale avec la voracité du pouvoir qui menace notre patrie.» Ainsi, même en 2003, ce fut le retour à la case départ sans le Terrorisme, mais avec en prime comme toujours un Etat vacillant et une patrie menacée. Une décennie noire, une barbarie innommable et deux autres décades non moins pitoyables en termes de gabegie n'ont pas réussi à apaiser l'insatiable cupidité de ces algériens, nos frères qui s'évertuent à détruire et l'Etat et la Patrie. Au début des années 2000, des journées d'études parlementaires organisées par la Commission de la Défense Nationale du Conseil de la Nation donnèrent lieu à une série de débats très fructueux auxquels participèrent des personnalités civiles et militaires et qui portèrent entre autres sur un sujet extrêmement sensible : «Le concept de la défense nationale», ce que l'on pourrait retenir de ces débats académiques c'est d'abord les différentes acceptions que peut revêtir ce concept, multiplicité de sens qu'un modeste citoyen profane comme moi ait pu dégager à savoir que «La défense nationale n'est pas seulement la défense militaire» . Dans la mesure où «elle associe la défense civile, la défense économique, l'action diplomatique et la défense militaire» (1) Et c'est ensuite la place et le rôle du citoyen que les conférenciers ont mis de manière exhaustive en exergue, des axiomes irréfragables qui constituent le leitmotiv de toute société et institutions soucieuses des intérêts supérieurs de la Nation : «La citoyenneté devient le cadre et la substance, l'exprimant et l'exprimé de la défense, car ici comme ailleurs, la défense c'est essentiellement l'esprit de défense et que ce dernier suppose des citoyens éduqués, formés, solidaires, conscients des menaces et des risques qui pèsent sur leur sécurité, souhaitant vivre ensemble et déterminés à se défendre et à défendre les valeurs qui les réunissent et qu'ils partagent. Aucune défense n'est possible ni crédible sans l'adhésion consciente des populations concernées» (2) «si vis pacem, para pacem.» Si tu veux la paix, prépare la paix. Le conférencier ne semble pas si bien dire .La préparation de la Citoyenneté par le biais d'une bonne gouvernance, juste et éclairée nous évitera assurément à avoir en face de nous comme ennemi notre propre progéniture. Est-ce un tableau complètement idyllique, une utopie de voir un jour le citoyen bardé de cette panoplie de vertus afin de relever les charges prométhéennes qui l'attendent. Qui se chargera et avec quels moyens, de modeler cet humanoïde des temps futurs. Cet impératif catégorique sur lequel nous crachons tous les jours causera assurément notre perte. Cette citoyenneté tant recherchée aujourd'hui et qui recèle intrinsèquement le souci permanent et quasi sacré du bien d'autrui et la quête de l'intérêt général. Ce contrat social idéal qui est à la base de toutes les paix sociales et stabilités politiques possibles, ces concepts et ces valeurs qui n'ont jamais été étrangers à notre culture ont été immédiatement posés par l'Islam comme condition sine qua non à la foi, et c'est par ces actes et ces comportements qui traduisent une haute philosophie de l'altérité et de ce qu'il convient aujourd'hui d'appréhender comme concitoyenneté, que se trouve entériné et validé notre statut de musulman croyant. Vivons-nous réellement selon ces dogmes ? Un hadith du prophète rapporte «Aucun d'entre vous ne croira vraiment, à moins qu'il n'aime pour son frère ce qu'il aime Pour lui-même.» Dans son impératif catégorique, le Philosophe Kant, souligne cette impérieuse nécessité de s'assujettir à un devoir qu'il considère aussi comme étant sacré :«Agis de telle sorte que tu traites l'humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen»(3) Si nous n'arrivons pas à donner corps de manière permanente et visible à toutes les valeurs prônées unanimement par la République, par l'Islam, par toutes les philosophies du monde, si nous n'arrivons pas à nous identifier à ces archétypes où gouvernants et gouvernés déploient tous leurs efforts pour vivre en bonne intelligence, en symbiose. Dans ce cas, avec qui et au moyen de quoi pourrait-on édifier cette défense nationale censée fabriquer un futur serein ? Il est plus qu'urgent que le citoyen ait les moyens intellectuels, moraux et juridiques à même de lui permettre de s'investir lucidement dans un processus constant de défense nationale avec tout ce que ces attitudes et aptitudes englobent comme champs de présence, de mobilisation et d'intervention par le truchement de démarches protéiformes qui servent une seule et même cause. En Août 2002, le Président Abdelaziz BOUTEFLIKA interpelle des congressistes par ces propos : «L'Affaiblissement du sens civique est l'un des facteurs à l'origine de la crise nationale.»(4) Mais encore faudrait-il rappeler que cet affaiblissement du sens civique avant d'être une cause, il a été une conséquence. Le Président ne manquera pas en l'occurrence de préciser aussi : «Il est superflu de demander aux citoyens le respect de la loi alors que ceux qui sont chargés de l'imposer et de l'appliquer s'abstiennent de s'y conformer.»(5) Loi, normes, repères, valeurs, comment peut-on, en l'absence totale et scandaleuse de parangon institutionnel valide, faire intérioriser ces fondamentaux à l'ensemble du corps social de manière à ce qu'ils soient des vecteurs de progrès et de stabilité. «La culture de la défense nationale à laquelle appelle Bouteflika doit prendre en compte aussi bien les ravages causés par le signal désespérément antipatriotique d'un harraga en perdition que les crimes économiques qui dans les deux cas, affaiblissent la notion même de souveraineté nationale»(6) l'auteur de cet édito publié au journal Liberté revient sur ces priorités inhérentes au concept de Défense/Sécurité nationale. Le journaliste schématise la nouvelle doctrine de la défense nationale prônée par BOUTEFLIKA qui avait déclaré à l'occasion du 53ème anniversaire du déclenchement de la lutte armée : «Il est important que soit engagée une réflexion approfondie sur notre conception de la défense autour de laquelle devrait se dégager un consensus aussi large que possible.»(7) «Pour tous les exclus et les défavorisés, et ils sont de plus en plus nombreux, cet Etat là n'est pas perçu comme le leur.»(8) C'est comme ça que feu M'Hamed BOUKHOBZA imaginait la relation entre notre lumpenprolétariat, notre plèbe, nos citoyens et l'Etat. C'était il y a plus de vingt ans. Il n'y avait pas encore de terrorisme, de harraga, le pays était surendetté et le pétrole se prostituait mais il y avait beaucoup d'espoir. Aujourd'hui le terrorisme est derrière nous, les harraga devant nous, le pétrole a reconquis ses titres de noblesse pour un temps, nos dettes épongées, l'argent coule à flots, les margoulins continuent à s'enrichir et à fragiliser la Nation et l'Etat et le sort du peuple où du moins cette citoyenneté rentable, pivot de la défense nationale et censée se substituer à la rente se trouve encore une fois remis aux calendes grecques. Qu'est-ce que la définition d'un péril, d'un complot menaçant la sécurité nationale et qui interpelle la mobilisation de tous pour la défense nationale ? Est-ce une association, une ligue, une coalition de gens malintentionnés et avec l'inébranlable résolution préméditée de saper la souveraineté nationale ? Pas forcément ! Pourquoi ne serait- pas plutôt et tout simplement la répétition même aléatoire mais infinie, désinvolte et toujours insuffisamment impunie d'actes attentatoires à la souveraineté d'un Etat d'une Nation. D'un Etat qui donne l'impression de choisir une forme mystérieuse, un mélange complaisant d'abdication, de résignation et d'accoutumance à un mal qu'il a lui-même largement contribué à engendrer. De toutes les manières ce peuple n'a jamais compris comment fonctionnaient les institutions de son pays, tributaires d'un prodigieux magma qui les travaille de l'intérieur de sorte que tout ce que le citoyen détecte à la surface n'est que symptomatique, la manifestation d'épiphénomènes incapables de rendre compte de la réalité, de l'identité du/des Pouvoir(s). «Le vrai problème du pouvoir en Algérie est avec lui-même, car tout ce qui peut apparaitre n'est pas la réalité, parce que celle-ci est dans les coulisses.» (9) avait un jour balancé l'ambassadeur de la G.B Andrew Henderson .Maladresse diplomatique, vérité générale ou intox, peu importe. Les richesses non renouvelables d'un pays peuvent-elles être stratégiques de sorte de représenter parfois un tantinet soit peu une question de défense et de sécurité nationales. Que restera-t-il à défendre ou à sécuriser s'il ne nous restait plus rien à bouffer ? «En effet, les différents scandales financiers à répétition atteignent une ampleur rarement égalée ces dernières années en Algérie qui touchent l'ensemble des secteurs publics et privés dépassent souvent l'entendement humain du fait de leur ampleur.»(10) On a beaucoup plus à craindre de ces algériens qui spolient, pillent et dévalisent les biens du peuple que d'une force susceptible de violer nos frontières et tenter de menacer notre intégrité nationale. Les seules intrusions non moins dépourvues d'un danger redoutable et qui violent nos frontières demeurent les quantités astronomiques et exponentielles de Cannabis qui inondent notre société afin de finir par détruire ce qui reste encore de vigoureux chez une jeunesse immunodéprimée. Voilà presque un demi-siècle que notre pays a recouvré son indépendance, les seules menaces qui se sont toujours appesanties sur ses frêles épaules sont toujours venues d'une manière ou d'une autre de l'intérieur. Certainement lorsque nous dormions à poings fermés, nos centurions et notre garde prétorienne veillaient au grain pour nous protéger contre nos nombreux ennemis d'ailleurs. Mais qu'advient-il alors de ces forces vives de la nation, de ces vigies de la patrie lorsqu'on se met à piller et à dépecer sereinement l'Etat et le peuple en plein jour. Des centaines d'élus embastillés, des dizaines de Walis, Chefs de Daïras, magistrats révoqués. Des centaines d'agences financières auto cambriolées (BADR-BNA-CPA-BCIA-CNEP-POSTE), une évasion fiscale abyssale, une économie informelle prodigieuse, portions congrues de l'iceberg. Phénomène inédit, on a même vu carrément des coalitions de fonctionnaires impliqués dans des affaires sabreuses de malversation, de véritables gangs nichés au sein de structures étatiques. En parlant de préjudice causé au trésor, à la douane ou au peuple, il faut impérativement cesser de l'évaluer en termes de Dinars, d'Euros et de Dollars. Les sommes sont faramineuses. L'énorme préjudice restera pour toujours l'irréversible destruction de cette Citoyenneté tant convoitée, préjudice indéfiniment entretenu pour garder la société algérienne dans une forme d'aliénation et de sujétion qui l'empêche de se muer, et le questionnement qui va suivre restera toujours d'actualité : «L'Algérie est- elle une société ou une juxtaposition d'espaces domestiques en concurrence pour les biens de subsistance.»(11) Voilà plus de deux milles ans Cicéron avait évoqué l'essentiel, la substance d'une certaine identité de ce peuple qui devait construire la république, il en disait : «La chose publique est la chose du peuple; un peuple n'est pas toute agrégation d'hommes formée de quelque manière que ce soit : mais seulement une réunion cimentée par un pacte de justice et une communauté d'intérêts..»(12) Cet énorme préjudice, disais-je donc en parlant de la Corruption cause beaucoup de tort à la cohésion sociale par son puissant effet débilitant car «Ces scandales jouent comme facteur à la fois de démobilisation des citoyens par une névrose collective du fait que ces montants détournés sont la propriété de toute la collectivité nationale»(13) En septembre 2006, la Présidente de Transparency International, Mme Huguette LABELLE invitée aux Débats d'El-Watan sur la Corruption , rappelle au sujet de ce fléau ce que tout le monde savait déjà :«Ce fléau alimente la pauvreté et la violence, détruit la fibre nationale de la société et transforme les valeurs saines en valeurs immorales. Son coût est tellement élevé qu'il est impossible de le quantifier.» Et à titre prémonitoire cette même dame, probablement au fait de nos réticences à combattre ce fléau et de notre voluptueuse inclination à institutionnaliser l'opacité, prit le soin d'ajouter que : «Les revenus de l'Etat doivent être connus du grand public et les citoyens sont en droit d'exiger la clarté et la transparence des dépenses dans chaque secteur d'activités. De même que l'argent du pétrole ne doit pas être confiné dans des fonds spéciaux.» A cette époque nul ne put imaginer que la supra étatique Sonatrach allait rejoindre le Club des Terminators. Ce même scandale qui a fait remettre sur la table la fameuse problématique de la Transparence Budgétaire et le contrôle des marchés publics. En 1999, le Président BOUTEFLIKA, dans l'une de ses nombreuses diatribes et après avoir fustigé le laxisme affiché par le corps de la Gendarmerie et la corruption qui rongeait les douanes algériennes, avait lancé un appel au peuple lui demandant de dénoncer tout ce qui pouvait porter atteinte à l'économie nationale. Il augurait insciemment cet avènement hypothétique d'une culture de la Défense nationale. Escomptant énormément sur le sursaut d'une conscience citoyenne collective. Il avait ajouté «Je changerai tout au nom du peuple - L'Etat doit avoir des lois claires et des institutions transparentes.» Une Décennie après, les atteintes à l'économie nationale ont redoublé de virulence. Le laxisme et la duplicité ont été remplacés par l'immobilisme que l'on reproche aux institutions de contrôle financier et budgétaire telles que le Parlement, la Cour des Comptes, l'IGF , Quant à la transparence, elle demeure le nœud gordien de toute cette tragédie ;quelle soit budgétaire, ce que les parlementaires n'arrêtaient pas de revendiquer corps et âme ou quelle soit de toute autre nature , son absence démontrait le mépris opposé à une citoyenneté que personne ne considère comme mature, éveillée, digne et doté de ce fabuleux pouvoir légitime de réclamer des comptes et de participer à la gestion de la cité selon les vœux des anciens et conformément à toutes les constitutions du monde libre. Enfin pour ce qui est des autres instruments juridiques et structures chargées de juguler la corruption on est virtuellement parmi les pays les mieux lotis, avec des lois, des Observatoires, des Offices. Depuis toujours la question récurrente de l'auto saisine se trouve au cœur de tous ces débats. Comment peut-on envisager une culture de Défense nationale avec une absence de pugnacité, voire de démissions parfois flagrantes qui se dérobent et finissent ensevelies grâce à ce fameux joker que l'on nomme «présomption d'innocence». La société algérienne a tellement été intoxiquée, abusée, désorientée, gavée à tort ou a raison par une herméneutique du type «chasse aux sorcières, Guerre des clans, règlement de compte» si bien que cette suspicion pathologique généralisée discrédite ou déprécie d'une part toute action hautement patriotique engagée par l'Etat lui-même et dissuade l'ensemble d'un corps social suspicieux à faire front contre la régression. Pourquoi rester dubitatif quant à l'intervention de structures telles que la D.R.S ou le C.T.R.I lorsque les intérêts supérieurs de la nation sont en jeu ; la présomption d'innocence est justement là pour protéger les innocents comme elle le fait partout dans le monde à toutes fins utiles. L'ex-ministre Abdelaziz RAHABI, en évoquant l'affaire Khalifa, la B.C.I.A, Le B.R.C, estime ces derniers scandales comme «les plus gros depuis la main basse de l'armée de l'occupation de Napoléon III sur le trésor de la régence d'Alger» (14). Drôle de comparaison, outrageusement pertinente, car elle nous fait rappeler un adage arabe : «L'Ignorant ou l'Insensé cause beaucoup plus de tort à sa propre personne que ne pourrai le faire son pire ennemi». Et en l'occurrence, il me revient à l'esprit un verset du Coran : «Et ne confiez pas aux dénués d'esprits vos biens dont Allah a fait votre subsistance..»(15) Le tyran n'est extérieur ni l'autre. Il est en chacun sous la forme du désir qui nous promet, si nous le faisions Roi, de faire de nous son ministre favori. La corruption fera sourdre dans le cœur de chaque citoyen beaucoup de ressentiment, ferment d'un genre de Fitna qui est pire que toutes autres formes de menace ou belligérance, cette subversion détruit par un processus d'implosion tout ce qui concourt à faire l'armature d'un peuple, d'une société, d'une nation. Une démission, une lassitude et un désintéressement profond à l'égard du bien public s'installent chez le citoyen. «Le caractère endémique de la corruption qui mine l'Algérie est devenue un obstacle au développement politique et économique du pays. - Le fait que ses causes les plus évidentes soient situées au sommet de l'Etat ne favorise pas non plus un comportement citoyen.» (16) Ca peut paraitre paradoxal et d'un ridicule mortel, qu'en plus de toutes les mosquées qui pullulent à chaque pâté de maison, on s'apprête avec orgueil à construire la plus grande et fastueuse mosquée du monde dans l'un des pays les plus corrompus au monde. Est-il possible et concevable que l'on puisse revendiquer son appartenance à une grande nation qui puise sa gloire dans la plate forme de la Soummam et les paroles d'Allah mais en s'accommodant indécemment d'antagonismes aussi burlesques. C'est hélas une étape certes avilissante mais tout à fait naturelle qui succède immédiatement à une phase que l'on appelle «Le dernier degré de la Foi», une abdication citoyenne. Les citoyens ont toujours survécu, pour réclamer leurs droits, dans une servitude psychologique; contraints à quémander, négocier, soudoyer. Cela finit par devenir une simple question de survie, une sélection des espèces où la notion du bien et du mal devient abscons, caduque. Dès lors, ce pragmatisme décadent submerge et dissout toutes les éthiques imaginables. «Li-Dharurati Ahkam» Nécessité fait loi, Normes, dogmes, valeurs sont alors revus et corrigés. Dans un Hadith du Prophète, il est fortement recommandé au croyant confronté à un tort qui menace la collectivité, d'intervenir afin d'y apporter des corrections en usant de ses mains, ensuite de sa langue et en dernier lieu avec des prières en son fort intérieur comme manifestation la moins téméraire de la foi L'ordonnance du bien et l'interdiction du mal; préceptes qui sont les fondements de l'identité arabo-musulmane ne sont finalement que l'incarnation/réincarnation parfaite du civisme de la citoyenneté et d'une défense nationale auxquels se substituent de nouveaux crédos tels que «Takhti Rassi oua Tfout» et «Tag Aâla men Tag» Je ne sais pas si les Algériens se rappellent d'un certain Omar Ibn El-Khettab. Il parait qu'une délégation venue s'enquérir de cet Islam naissant et menaçant, et désireux s'entretenir avec «l'Etat ou le Pouvoir» demandèrent qu'on leur indiquât Le Palais du Gouverneur. Les musulmans s'esclaffèrent. Point de Palais à l'horizon ! Et au lieu d'un somptueux édifice bunkérisé. Les visiteurs furent acheminés à l'extérieur de la ville. On pouvait voir de loin sous un palmier, le corps d'un homme affalé, dans un sommeil profond avec sa main sous la tête en guise d'oreiller. « C'est lui l'Etat, leur avait-on rétorqué, en désignant le Calife Omar, plongé dans un long sommeil sous un arbre aux fins fonds du désert » Et c'est à ce moment, chose que tous les dirigeants doivent méditer, que l'on pût entendre l'une des plus belles leçons en matière de grandeur et de gouvernance. «Tu as gouverné, tu as été juste, tu as pacifié, tu as donc pu dormir.» Cet homme, ce Khalife ne souffrait assurément ni de stress, diabète, hypertension, prostate ou autre saloperie de ce genre, Il n'avait non plus ni de Chambellan, valets ou garde rapproché. Bref ! Il avait pris le soin de sécuriser l'Etat et la Communauté. «Sivis pacem, para pacem», Si nous voulons la paix, préparons la paix. Références: (1)-(2) Conférences données par le Lieutenant Djamel Eddine BOUGHAIA .communications intitulées «Le Concept de la Défense Nationale.» «Les Fondements de la politique de défense de l'Algérie», (3)-KANT - Fondements de la Métaphysique des Mœurs (4)-(5) Discours-du Président Abdelaziz BOUTEFLIKA lors du Congrès de l'Association Solidarité Nationale Estudiantine -Annaba-2002 (6)-Mounir.B - Journal Liberté - Editorial du 06//11/2007 (7)Message du du Président A.Bouteflika - Editorial publié dans la revue El-Djeich-Novembre 2007 (8)-M'Hamed BOUKHOBZA - Octobre 88 : évolution ou rupture (9) Salima Tlemçani «Les conseils de l'ambassadeur du Royaume-Uni» El Watan, 9 février 2008 (10)-Abderrahmane MEBTOUL/Mohamed Tayebi, Le Quotidien d'Oran - 23/08/2007 (11)-Lahouari ADDI - Le Quotidien d'Oran Lundi 10/09/2007 (12)-Cicéron - De republica (LivreI) (13) -Abderrahmane MEBTOUL/Mohamed Tayebi, Le Quotidien d'Oran - 23/08/2007 (14)-Abdelaziz RAHABI El-Watan du Jeudi 21/01/201O (15)-Coran, Sourate En-Nissa-Verset 4 (16)-Cécile JOLLY, Les cercles vicieux de la corruption en Algérie. Revue internationale et Stratégique.2001/3, N°4