Trois affaires au cœur de la vaste enquête anti-corruption : l'une pour des permis de construire illégaux, l'autre pour des malversations liées aux projets immobiliers de l'office du logement subventionné, la troisième pour blanchiment d'argent et transfert illicite d'or avec l'Iran. Parmi les personnes écrouées ce samedi 21 décembre figure le directeur général de la banque publique Halkbank, Süleyman Aslan, chez qui on a trouvé 4,5 millions de dollars en petites coupures. La Turquie a renvoyé 25 autres haut responsables de la police, après une première vague d'une cinquantaine de limogeages dans le cadre d'un scandale de corruption qui agite la Turquie, ont rapporté les médias dimanche. Vingt-quatre personnes ont été inculpées à ce jour, y compris les fils de ministre de l'Intérieur Muammer Guler et du ministre de l'Economie Zafer Caglayan, ainsi que le PDG de la banque publique Halkbank, Suleyman Aslan. « La Halkbank a joué un rôle important dans les relations entre la Turquie et l'Iran, et elle continuera ». Ces mots de l'ambassadeur iranien en Turquie, Ali Reza Bikdeli, datent de la fin novembre et illustrent bien le rôle de premier plan de la Halkbank dans le commerce entre les deux pays. Un commerce en violation de l'embargo dont la République islamique est frappée, qui est dénoncé depuis quelque temps déjà par les Etats-Unis ainsi qu'Israël. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le chef du gouvernement dénonce des manœuvres et un complot de l'étranger. Le principe en est simple : le pétrole et le gaz achetés à la Turquie sont payés sur des comptes à la Halkbank, mais comme cet argent ne peut être transféré en Iran depuis les restrictions imposées par les Etats-Unis et l'Union européenne en 2010 et surtout 2012, il sert à acheter de l'or, exporté ensuite vers Téhéran. L'Inde a la réputation d'utiliser les mêmes comptes pour le paiement de ses achats d'hydrocarbures iraniens. Des échanges qui se montent à plusieurs dizaines de milliards de dollars chaque année. Le principal responsable de ces transactions serait l'homme d'affaires iranien naturalisé turc, Reza Zarrab, l'un des suspects écroués samedi matin qui aurait corrompu de nombreux hauts fonctionnaires pour maquiller son trafic. Erdogan dénonce un complot Les fils des ministres turcs de l'intérieur et de l'économie ont été inculpés et placés en détention préventive par des juges d'Istanbul, tôt samedi 21 décembre, dans le cadre d'un scandale de corruption qui divise les islamo-conservateurs au pouvoir et éclabousse le premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, à quatre mois des élections municipales. M. Erdogan a riposté quelques heures plus tard en dénonçant un complot venu de Turquie et de l'étranger destiné à faire tomber son gouvernement. « Tout ceci est un sale complot contre la volonté nationale », a vitupéré le premier ministre devant des milliers de fidèles à Samsun (nord). « Nous allons mettre un terme à ce vilain jeu, de la même façon que nous avons mis un terme [aux manifestations de] Gezi » qui ont secoué le pays en juin, a-t-il menacé. Durant ces manifestations populaires qui dénoncaient son autoritarisme, M. Erdogan avait déjà dénoncé un complot de l'étranger. Très remonté, M. Erdogan en a profité pour menacer d'expulsion les diplomates étrangers « engagés dans des actions de provocation », dans une mise en garde voilée à l'adresse de l'ambassadeur des Etats-Unis. Selon des médias pro-gouvernementaux, Francis Ricciardone aurait évoqué devant des collègues européens le rôle de la banque publique turque Halk Bankasi dans des ventes illégales d'or à l'Iran, au cœur du scandale politico-financier en cours.