Ain Cherara n'est pas ce décor en carton, dressé pour quelques semaines, juste pour les besoins du tournage d'un film d'avant-guerre. Elle est une réalité criarde, injectée dans la nature si malmenée. Une ‘'gangrène'' amère d'une ‘'bidonvilisation'' sans nom, à quelques kilomètres de la ‘'Perle de la Méditerranée ‘', avec son lot de mal vie au quotidien, ses maux sociaux et ses multiples tares. Un hameau, coincé sur une colline Le douar d'Ain Cherara n'est pas aussi loin de la ville de Mostaganem, il est situé juste à 07 kilomètres de son chef-lieu, une nouvelle cité urbaine le cache des regards. Ce bourg de la mal vie est coincé en amont, sur une colline de la localité d'Ouréah, et depend territorialement de la commune de Mazagran qui semble l'oublier, et ne point s'occuper de lui et des doléances de ses habitants, depuis si longtemps. Selon ces derniers, les autorités locales ne sont là et ne se pointent que forcées, après la survenue de la chute d'une baraque, causant des blessures à ses malheureux occupants ou la ‘'fermeture'' de la route qui mène vers Hassi Mameche, provoquée par la colère et la protestation de tant d'autres citoyens, si peinés de ne voir rien changer depuis tant d'années. 60 familles, quotidiennement en lutte pour survivre Le bidonville est composé d'une soixantaine de familles au seuil de la pauvreté, venant de tous les coins de la wilaya, pour de tant de raisons. Quelques unes, chassées pour des problèmes familiaux, se sont retrouvées coincées en ce lieu de la totale désolation. D'autres ne savaient où aller par manque d'abris, ont fini par s'établir au douar, en attendant mieux. Malheureusement, le lieu ne se prête pas à l'usage d'habitation, de par son relief si accidenté et l'absence totale des commodités d'une existence décente. Tout manque affreusement, et les malheureux habitants sont contraints de s'adapter en menant une lutte quotidienne pour survivre et déployer de multiples efforts pour résister et tenir toujours dans l'attente de jours meilleurs qui paraissent si tarder a venir. Un éclairage public défaillant, et des pistes impraticables Le hameau reste desservi par une unique piste forte boueuse en cet hiver si pluvieux. Elle demeure encore traversée par des ruissèlements d'eaux, provenant de la source et des conduites défectueuses anarchiques alimentant les chaumières. Quant à l'éclairage public qui illumine si mal le douar, il reste à son tour, défaillant et sujet à de fréquentes pannes, dues à l'humidification permanente du sol, qui a failli provoquer l'électrocution de tant de personnes, selon les déclarations d'un habitant. Le reste des pistes menant vers les foyers, ont fini par devenir impraticables, de par la présence des eaux stagnantes, et contraignent les citoyens à de longs pour accéder à leurs taudis. ‘'Survivre en ce lieu de tous les risque est devenu un combat difficile a mener, et seul un brin d'espoir continue de nous pousser à résister, et nous retenir'' déclare une femme au seuil de sa porte brinquebalante. Des ordures assiègent le douar Le douar se distingue malheureusement par de multiples tares, dont la plus ‘'voyante'' reste l'amoncellement des ordures qui l'assiègent de partout. La collecte ne s'effectue plus dans le coin, deux bacs d'ordures, désespérément vides, ont été déposés si loin du lieu, et ne se visitent plus. Le piquage de multiples canalisations ‘'aériennes'' et sans le respect des normes d'usage, expose davantage les malheureux citoyens au risque des maladies à transmission hydrique. L'insalubrité régnante au bidonville reste une véritable et dangereuse source de la propagation de diverses autres maladies, menaçant la santé de cette population, livrée désormais à elle-même. D'autres maux sociaux ont pris également naissance en ce lieu, alimentés par une misère sociale qui n'ose pas dire son nom. Des petits écoliers, condamnés à la marche Le plus chagrinant au douar, est cette longue marche journalière de ces dizaines de petits écoliers, condamnés à la faire pour se rendre aux lieux d'étude. Ces derniers, ne bénéficiant du transport scolaire, quittent les toits familiaux dans le noir, grelotant de froid, en se faufilant sur des sentiers sinueux que les chèvres évitent de prendre. Malheureusement, la distance qui les sépare de l'école est assez longue (plus de kilomètres) et les expose à tous les dangers de la route, dont les accidents de la circulation et les chiens qui errent dans les parages. Quant à leurs parents, ils demeurent si inquiets et ne cessent de réclamer leur transport par l'un des bus scolaires qui desservent les lieux. Selon un vieux, l'un de ces élèves a failli dernièrement être écrasé par un camion, conduit par un chauffard, dans un virage de la route, menant vers Hassi Maméche. Ce gamin a évité de prendre le raccourci vers le douar et a préféré marcher le long de la route, parce qu'il pleuvait et le sentier était impraticable. Chaque foyer cache une histoire si triste Vivant depuis plus d'une quinzaine d'années au douar, une dame, mère de trois enfants, déclare que deux de ses fils ont quitté le lieu, l'un ,est un ‘'harag'' chanceux qui a pu gagner l'autre rive et n'est jamais revenu,il l'appelle de temps à autre. Le second n'a pu avoir cette chance, il est porté disparu et elle a fini par ne plus l'attendre. Quant au troisième, il est devenu fou et souffre de graves troubles psychiques, il ne quitte plus le foyer. Un autre habitant affirme à son tour, qu'il a perdu deux de ses enfants, des filles que la maladie a emporté. Elles souffraient de troubles respiratoires sévères et sont mortes, suite à des complications et surtout à un habitat où le froid régnait en permanence, et la toiture devenait à la moindre goutte, une veritable passoire, transformant les pièces en piscine. La ‘'bidonvilisation ‘'et ses malheurs, a-t-elle une fin ? La bidonvilisation, cette veritable pathologie urbaine ne cesse de se distinguer par la poussée sauvage d'habitats surpeuplés où les conditions de vie sont malsaines, voire dangereuses, de par la précarité des logements, la pauvreté et l'exclusion sociale de certaines couches, contraintes d'y vivre, faute de mieux. Aujourd'hui, il apparaît si légitime de s'interroger sur leur origine, d'analyser sa poussée, et proposer des solutions en vue de l'atténuer et surtout en finir avec ses métastases qui enlaidissent le tissu urbain.