Vous rencontrez un vieil ami que vous avez perdu de vue depuis longtemps ou bien c'est votre enfant rejoint pour la première fois les bancs de l'école et vous vous dites que le « le temps passe si vite ». Quand vous terminez tard votre partie de dominos ou de rami, c'est « le temps passe vite ». Mesuré en années, votre temps gambade et galope. En saisons, il passe plus vite. C'est déjà l'été, c'est déjà l'hiver. A Réflexion, nous fêtons notre deuxième anniversaire. Déjà, me diriez-vous ! De mon temps, on fêtait un tel événement à la fantasia et au baroud, comme on fêterait la ouaâda de Sidi Harrat à Zemmora, la circoncision du dernier, la naissance du premier mâle ou le retour d'un exilé. J'irais même jusqu'à dire qu'un tel événement se fêterait comme un jour d'indépendance. Indépendance il y a à Réflexion et si vous avez suivi mon regard, vous l'aurez compris. Qu'est Réflexion ? Un quotidien. Un quotidien au sens propre du terme. Avant qu'il ne sorte des rotatives ou qu'il en sorte tout chaud, c'est pour vous un quotidien. Pour nous, il ne l'est plus dès qu'il quitte nos doigts. Il était quotidien sous nos doigts et puis après, c'est notre enfant du jour. Oui chaque jour, nous fabriquons un enfant. Ici, le temps se mesure en journées. Pas besoin de calendrier ni d'horloge. Nous mesurons le temps en chant de coq et en muezzin de la prière du maghreb, le coucher de soleil pour les autres. Avec le chant de coq, c'est le délégué aux kiosques, soit moi-même, qui vérifie que notre canard est sur les étals. Avec le coucher du soleil, le maghreb, c'est M. Amara qui lance son « on boucle ». Et puis vient le temps du chef. Le chef, c'est Belkacem Belhamidèche, qui met sa touche sur la une et la 24. Et c'est quand ça patine que tout le monde se dit que « le temps passe si vite ». Et pourtant, il ne passe qu'à « la vitesse du temps ». Il passe à une heure à l'heure ou si voulez à un jour par journée. En bref, une seconde à la seconde. Enfin, vous l'aurez compris, à Réflexion, nous ne connaissons pas les siècles, les années, les mois et les semaines. Nous ne vivons que des jours. Nous vivons au quotidien la vie d'un quotidien. Et chaque jour, c'est une nouvelle aventure qui mène au kiosque avec le chant d'un coq anonyme comme nous tous au journal. Des pseudonymes anonymes. De mai à juillet 2010, quelqu'un sur les hauteurs d'El Arsa, à Mostaganem, posa sa joue sur sa main droite et réfléchit. Samia le regardait chaque jour, pitoyable statue du Penseur d'Auguste Rodin, dans sa réflexion. Elle attendait l'eurêka d'Archimède ou le « pourtant, elle tourne » de Galilée. Mais, le bonhomme s'en alla perdu dans sa réflexion et créa Réflexion. La réflexion à « comment concrétiser un rêve ?» devint une réalité un certain 26 juillet 2008. Depuis, M. Belhamideche Belkacem, a perdu toute réflexion pour Réflexion. Il vit son rêve sans pour autant abandonner sa bicoque sur les hauteurs d'El Arsa telle la baignoire d'Archimède. Embûches, abandon, hypocrisie, forfaitures et trahisons font légion au niveau de tous les journaux du monde. A Mostaganem, comme ailleurs, l'Algérien a évolué. La « matière » a gagné du terrain. Les gardiens de trésors terrestres font de l'excès. A qui s'affiche le mieux. Les gens vivent dans un temps nouveau. Le premier quotidien du Dahra risquait de couler du jour au lendemain. Le fondateur, directeur de l'information, trésorier, journaliste, publicitaire et DG, M. Belhamideche croyait avoir terminé son aventure. Comme la chasse et la pêche, Réflexion est devenu une passion. Une passion que le meneur a su faire partager avec d'autres. Ces autres, des jeunes et des vieux qui ne demandaient pas la lune. Juste de quoi payer l'imprimerie. Personne à bâbord. Rien à tribord. Le bateau risquait-il de couler ? Au nom de Mostaganem que vous aimez. Au nom de l'Algérie profonde que vous chérissez. Au nom des damnés de la terre. Au nom des pauvres et des démunis. Au nom d'Allah. Au nom de l'avenir de vos enfants. Rien à faire. Tel le prophète Salah au milieu des Thamūd, M. Belkacem se retrouva seul. Seul, mais surtout pas abandonné. Amara Mohamed, Belderrar Mohamed, Réda, Siham, Djamila, Samia, Khadidja,Fatima , Benyahia Abdelkader, Gana Othmane, Mohamed Bentahar ,Bendaouadji Noureddine et d'autres encore ont posé mille et une fois leurs joues sur leurs poings pour réfléchir comme a réfléchi le chef. Et l'on se rappelle qu'une jeune demoiselle a même pleuré. C'est que… Réflexion n'a pas paru. Deux fois, peut-être. Les causes en étaient les mensonges, les promesses non tenues, la cupidité, la convoitise, la rapacité et la soif de la vie des autres. Oui, la vie des autres. Ils voulaient vivre la vie de Belhamidèche. Incroyable. Ils voulaient vivre son aventure, son journal. Et pourtant, il disaient bien, en clair et codage, que son aventure se limitait au premier numéro. Il était arrivé à son port d'attache. Fin ! L'écran est noir. Comme un interprète d'une belle mélodie à qui l'on crie bis ou un boxeur à qui l'on chuchote des encouragements, le personnel du journal, loin de penser à son salaire réfléchissait au chant du coq et au lecteur matinal pointant au kiosque. La Réflexion à Réflexion battait son plein de jour comme de nuit. Et puis… Le temps passe, les bonnes gens restent. A Réflexion, j'ai vu des Hommes et des Femmes. Oui avec majuscules. Des gens qui font une symphonie avec de bons mots pour que l'on rétablisse des Algériens dans leurs droits. Pour que cessent l'avanie, l'humiliation et la vexation. Pour un minimum de bien-être à la gueusaille. Et aussi pour un rappel du devoir et de la citoyenneté. Réflexion est en Algérie le premier journal sans journalistes. Peut-être même dans le monde. On lui reproche son mauvais français. Et pourtant des mal lotis, des sdf, des mal payés, des malades, des femmes battues, des brimés ont été satisfaits grâce au s qui manque à un pluriel et à l'imparfait du subjonctif qui a perdu deux s à la frappe. Cherchons bon correcteur, vous dis-je, en passant. Cinquante-six plaintes contre une seule personne, c'est peu vous dire. M. Belhamidèche et son personnel vivent dans le bénéfice de la vie. Ils ne s'attendaient point à cet accueil, le vôtre bien sûr, amies lectrices et amis lecteurs, qui nous suivez. Les plaintes prouvent que le journal est compris. Bien compris et mal accueilli. Ces débutants en journalisme sont devenus aujourd'hui des professionnels de la plume. Ils ont appris sur le tas, stimulés par le fondateur de Réflexion. Ils sont chercheurs, professeurs d'université ou lycéens. Salariés ou bénévoles. Célibataires ou pères de famille. Leurs diplômes : doctorat, magister, licence, DEA ou simple agent de saisie… Ils ont étudié en Algérie ou à l'étranger. Certains sont de grands sportifs. D'autres ont piloté des avions. Certains pratiquent la plongée sous-marine. Une chose leur est commune : ils lisent beaucoup et se soucient peu des difficultés et pièges de la vie. L'enfant Réflexion est aujourd'hui adolescent. Il apprend toujours. Il a de la chance d'avoir des parrains comme M. Amara Mohamed, qui n'a pas abandonné une seule seconde ce « Préfet d'Alicante », comme il aime appeler M. Belhamideche qui, un jour pour l'anecdote, provoqua une réunion pour annoncer une baisse des salaires ce qui fit bien rigoler le personnel. Il a beaucoup ri lui aussi, car il ne s'attendait pas à une telle réaction. C'est en famille que l'on vit un journal. Ses hauts et ses bas sont nos hauts et nos bas. Un homme a trop cru en bon amoureux de la profession de journaliste et comme l'honnêteté paie bien, le voilà récompensé. Comblé même. Son bon père, le lui avait dit : « Mon fils, tu es bien entouré. » Oui, M. Belhamidèche est bien entouré. Les vieux savent et sentent. Ils savent reconnaitre le bon grain de l'ivraie. Le patriarche avait raison. Comment vit Réflexion ? Il vit comme vous et moi. Il vit ses bons et ses mauvais jours. Je ne suis pas superstitieux, mais je voudrais que le logo du journal soit un pneu avec à l'intérieur un fer à cheval dans lequel trônera la main de Fatma avec son œil, son scorpion et son serpent glissant entre des doigts. Enfin tous les « pare-œil » possibles. C'est vous dire à quel point, notre quotidien est envié. Imaginez qu'il est même poursuivi sur le net. Attaques fréquentes contre notre site, disparitions de données sur wikipedia.org concernant le journal et M. Belhamidèche. Effacement des données sur le même site sur le directeur parmi les personnalités de Mostaganem. La boîte e-mail déborde de spams, d'articles et informations erronées. Tentative de vol dans les locaux. Etc... Etc… De grands « et cætera ». Rien que ça. Peu importe que Réflexion disparaisse. Qu'il s'en aille. C'était notre vie à nous. Nous consolerons-nous ? On meurt et puis c'est tout. Il était notre air. Notre cœur qui bat. Quand il s'en ira, nous reviendrons à notre vie normale. Nous retournerons d'où nous sommes venus. Nous redeviendrons comme vous. Et Belhamidèche, Amara, Bentahar, Belderrar, Gana, Hadj, Samia, Soumia, Khadidja, Djamila vivrons leurs vies en comptant les années et non plus les journées. Et peut-être apprendront-ils à lire un autre quotidien. Un cauchemar. Même si c'était vrai, nous recommencerions avec notre capitaine et son second. Ce n'était pas l'histoire d'un journal, c'était simplement un temps qui s'est arrêté. Oui le temps s'est arrêté, car M. Amara m'appelle pour le boucage du 602ème numéro de ce lundi 26 juillet 2010, celui que vous tenez entre vos mains et qui comme toujours a été enfanté dans la douleur. Réflexion est toujours là contre vents et marées. Bon vent, les amis.