On parle d?un sommet extraordinaire de la Ligue arabe, ce vendredi ? Doha, dont la tenue n?a pas ?t? confirm?e. Mais les pays arabes peuvent faire beaucoup plus que se r?unir et condamner les attaques isra?liennes contre Gaza. Le discours de la r?signation et de la d?moralisation collective, qui a fait souvent ?crire ? des journalistes arabes que ?la Ligue arabe mena?ait de? se r?unir? ? chaque agression isra?lienne contre un pays arabe et g?n?ralement contre les Palestiniens, ne doit pas occulter que les pays arabes disposent de plusieurs cartes en main qu?ils peuvent faire jouer pour influer sur la situation inacceptable au Proche-Orient. Diplomatiquement, l?action premi?re de condamner n?est pas aussi accessoire qu?on le dit et on se demande d?ailleurs ce que serait alors la situation si, en plus du rapport de force d?favorable aux Arabes, ceux-ci se mettaient aussi ? se taire ou ? se faire les complices des crimes de l?Etat h?breu. De m?me, les manifestations populaires, les d?clarations des responsables politiques et les ?crits de presse ne sont pas du pur folklore quand ils sont m?ticuleusement lus par les chancelleries, les capitales et les milieux d?cideurs dans le monde qui tiennent compte des opinions arabes aussi bien dans leurs politiques que dans leurs analyses prospectives. Enfin, les actions de solidarit? avec les Palestiniens sont n?cessaires, quels que soient leur efficacit? et leur niveau d?organisation, parce que si elles ne changent en rien la d?termination de l?ennemi, elles renforcent n?anmoins celle des habitants de Gaza qui n?ont que trop souffert de l?isolement et de la solitude. C?est ainsi que l?affaire des bateaux humanitaires devait ramener la question palestinienne ? la Une des m?dias du monde, notamment apr?s que des organisations arabes activant en Europe aient r?ussi ? ?embarquer? des parlementaires europ?ens dans plusieurs bateaux, mettant ainsi les forces navales isra?liennes devant leurs responsabilit?s. Quant au sommet arabe et ? la r?union des ministres arabes des Affaires ?trang?res devant avoir lieu demain au Caire, ils ont pour fonction politique d?affirmer l?unit? de la voix arabe, quoi qu?elle ait ? d?cider. Et cela n?est pas un d?tail. Ce n?est pas parce que le rapport de force de l?heure est profitable aux Isra?liens (et ? leurs alli?s tacites ou d?clar?s) qu?il faut donc abandonner toute r?sistance et voir dans la soumission un acte d?intelligence politique. Dieu merci, les dirigeants du mouvement national alg?rien ne l?ont pas fait en Mai 1945 quand la France coloniale assassinait en quelques jours plus de 45.000 de leurs fr?res et s?urs ? S?tif, Kherrata et Guelma! Pour revenir au sommet arabe, les pays qui y seront pr?sents (9 sur 22 seulement ont donn? leur accord jusque-l?), devront plancher sur deux points principaux qui seront ? l?ordre du jour. Le premier a trait ? l?arr?t des attaques isra?liennes, le second ? la relance rapide d?une seconde tr?ve entre le Hamas et Isra?l. Ces deux points sont difficiles ? atteindre, non pas ? cause de la sup?riorit? militaire pr?tendue d?Isra?l dans la r?gion (qui n?est en v?rit? que celle des Etats-Unis), mais parce que Tel-Aviv lie les deux points, ? savoir que les attaques continueront tant que le Hamas ne sera pas bout? au large de Gaza, pour reprendre les propos des responsables isra?liens coupables de la boucherie toujours en cours. Avant ce sommet, les ministres des Affaires ?trang?res arabes se r?uniront demain au Caire, comme annonc? par le secr?taire g?n?ral de la Ligue arabe, Amr Moussa. Il a indiqu? que la r?union tranchera entre deux propositions, soit celle de la Syrie, Bachar Al-Assad ?tant le pr?sident en exercice de la Ligue arabe, soit celle du Qatar qui tient ? abriter le sommet extraordinaire. Aucun d?tail n?est connu quant ? ces propositions, mais si elles sugg?rent des m?canismes diff?rents, elles ne divergent pas des deux points pr?cit?s. On parle de r?serves de l?Egypte quant ? la tenue de ce sommet qui, s?il se tient en dehors du Caire et sans qu?elle y joue un r?le ?vident, la mettra en dehors de l??quation palestinienne pour longtemps. L?Egypte avait jusque-l? mandat de la Ligue arabe pour mener la m?diation entre le Hamas et le Fatah dans l?espoir d?une r?conciliation nationale, mais elle a but? sur l?intransigeance du Hamas qui tenait ? deux conditions pr?alables : l?ouverture sans conditions du passage de Rafah et une action du Caire vers Tel-Aviv pour la lev?e du blocus terrestre et maritime. Les autres pays arabes pourraient gagner l?adh?sion de l?Egypte, m?me si certains responsables ont indiqu? par le pass? ne pas vouloir d?une R?publique islamiste ? leurs fronti?res, en relan?ant son mandant de m?diateur et en levant les ambigu?t?s de certaines campagnes d?intox qui accusent, sans doute faussement, l?Egypte d?avoir eu vent des attaques isra?liennes. Cette unification des rangs est strat?gique et doit se faire pour ?viter certaines exploitations politiques, comme celle incompr?hensiblement commise par le leader du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui a r?agi en s?en prenant au Caire plut?t qu?? Isra?l dont il conna?t pourtant mieux que personne les faiblesses. Entre-temps, beaucoup de contacts ont ?t? men?s par des responsables arabes avec des capitales occidentales, celle du Quartette notamment. Il faut indiquer, ? ce titre, que beaucoup de pays arabes disposent de contacts diplomatiques privil?gi?s, chacun avec sa propre sph?re g?opolitique ou de partenariat ?conomique. Les multiples projets en commun, autant dans le domaine ?nerg?tique ou financier, la coop?ration ? tous les niveaux et les int?r?ts des entreprises ?trang?res dans les pays arabes, voil? autant de ponts qu?il est possible d?utiliser, sans compter l?importante ?migration arabe en Europe. Et, enfin, cette immigration arabe aux Etats-Unis qui, bien qu?inf?rieure en nombre ? celle sioniste, peut tellement faire en mati?re de lobbying en direction des s?nateurs et des repr?sentants du Congr?s am?ricain, pour peu qu?il y ait une meilleure ma?trise du jeu politique d?mocratique am?ricain et une volont? de mettre les moyens au service de candidats locaux toujours plus ambitieux et aux campagnes de plus en plus co?teuses ! Enfin, il y a bien un point urgent pouvant ?tre ?voqu? unanimement par les Arabes ? titre de pression imm?diate sur Isra?l et son cercle d?alli?s directs : la menace de retrait de la proposition arabe de 2002 faite ? Madrid de reconna?tre Isra?l en contrepartie d?un Etat palestinien ayant Al Qods pour capitale, mais ? laquelle Tel-Aviv ne r?pond toujours pas. Ou alors si : par une violence in?dite dans l?histoire contre des civils sans la moindre d?fense.