Les chefs d'état-major des armées d'Algérie, de Mauritanie, du Niger et du Mali se réunissent depuis hier, et pour deux jours, au siège de la 6ème région militaire à Tamanrasset pour mettre au point un plan anti Al-Qaida au Sahara et au Sahel. Cette importante réunion annoncée via un communiqué du ministère de la défense est déjà un grand acquis à mettre à l'actif de l'Algérie qui a pu convaincre ses voisins du sud de faire cause commune contre la criminalité transfrontalière et le terrorisme. Les chefs d'état-major des quatre pays examinent «les voies et moyens de consolider la coopération autour d'une lutte commune contre la criminalité qui sévit au niveau des bandes frontalières et, plus particulièrement, le terrorisme», souligne le communiqué. Au plan stratégique, cette réunion de coordination traduit les «efforts soutenus» consentis par les hautes instances des pays participants, relatifs au «renforcement des relations de coopération militaire et sécuritaire», précise encore le communiqué. L'heure est donc à la mobilisation dans la région ouverte aux quatre vents et où les terroristes, les bandits et les trafiquants de drogue circulent en toute impunité. Point positif, les partenaires du Sud sont désormais décidés à jouer le jeu. Le Mali, le Niger et la Mauritanie, qui partagent des frontières communes avec l'Algérie, devront apporter leur appui pour mettre hors d'état de nuire les éléments d'Al-Qaïda. Il n'est plus question de laisser se commettre des assassinats et des rapts d'étrangers au nez et à la barbe des autorités de ces pays. Plusieurs ressortissants étrangers ont été en effet tués ou enlevés au Mali et au Niger ces derniers mois par la nébuleuse Al-Qaïda. Le dernier attentat kamikaze contre l'ambassade de France en Mauritanie, samedi dernier, est venu rappeler que les terroristes jouissent d'une certaine liberté d'action. Un acte terroriste d'autant plus inquiétant que le ministre mauritanien de l'Intérieur, Mohamed Ould R'Zeizim, avait révélé l'existence d'un «camp d'entraînement» au Sahara. La vocation de la réunion de Tamanrasset pourrait s'interpréter comme une mobilisation suite à une alerte rouge. L'Algérie se propose ainsi de piloter une coordination de ces quatre pays pour mener à bien la mission de «nettoyage» de la région sahélo-saharienne. Ceci d'autant plus que les contextes politiques dans ces pays se prêtent à un engagement franc dès lors que l'élection présidentielle en Mauritanie s'est déroulée normalement et que le Niger de Tandja a lui aussi «plié» son référendum sur la constitution. Quand au président du Mali, Mamadou Tomani Touré, soupçonné d'être un soutien «passif» aux éléments d'Al-Qaïda, il semble revenir à de meilleurs sentiments. La preuve? Il s'est engagé en marge du sommet de l'Union africaine dans un front commun contre Al-Qaïda avec l'Algérie et la Libye. En contrepartie, le Mali devait recevoir une aide militaire et logistique notamment de l'Algérie. Ainsi, une source militaire malienne avait annoncé dernièrement «une importante aide militaire algérienne». Cette aide s'inscrit justement dans le cadre de la coopération sur ce plan entre les armées des deux pays. «Cette aide est variée, elle comprend du carburant pour nos troupes, des sacs de couchage pour les opérations spéciales, et même de l'armement», précise cette source qui n'a pas donné plus de détails, mais qui a confirmé qu'une partie du matériel est déjà arrivée. Pour l'Algérie, c'est le prix à payer pour amener le Mali à jouer son rôle dans la lutte. D'ailleurs, elle a renforcé sa coopération multisectorielle avec le Mali suite à la dernière visite à Alger du ministre de la Défense de ce pays. Au-delà de la lutte contre les terroristes, le trafic de drogue et les réseaux de passeurs d'immigrants clandestins, l'Algérie est le médiateur clé dans la gestion de la question touarègue. Les accords d'Alger, ont permis à une bonne partie des troupes qui avaient rejoint le dissident Ibrahim Ag Bahangaà Kidal de déposer les armes. Ces aides militaires, ajoutées aux bons offices diplomatiques d'Alger, sont dictées par le souci d'éviter l'infiltration des groupes armés sur le territoire algérien que pourrait favoriser l'instabilité du Nord du Mali. Ainsi, après avoir amené la Lybie de Mouammar Kadhafi à s'engager dans un front commun avec le Mali contre le terrorisme, l'Algérie vient de gagner une autre bataille en réunissant les chefs d'état-major des quatre pays du Sahel autour de la table. C'est là un acquis incontestable pour la lutte et bien sûr, un avertissement lancé à la nébuleuse Al-Qaïda que l'ère des compromissions est révolue. C'est cela la signification de cette réunion de Tamanrasset.