Le rideau est tombé, lundi en soirée, au Théâtre de verdure Chekroun-Hasni d'Oran, sur la 2e édition du Festival de la chanson oranaise. Un public nombreux a assisté au gala de clôture et a, exceptionnellement, patienté jusqu'à une heure tardive de la nuit. La soirée aura été marquée par une série de maladresses et une profusion de récompenses symboliques remises à de nombreux artistes ou leurs représentants, à savoir Ahmed Sabeur, M'hamed Benzerga, Abdelkader Ould Laïd, Abdellilah Missoum, Karim Houari, Bensmir Kaddour, Maati Mohamed, Bouzid Hadj, Saïd Bouarfa, Hadj Tahar Fergani, Dib Layachi, Samir Staïfi, Abdelkader Bendaamèche, Djahida et Cheikh Zine Boudaoud. On enregistrera aussi beaucoup d'improvisation et un chapelet de bévues à l'actif d'une animatrice trop encline à forcer sur la pommade en direction des officiels et à faire de la réclame gratuite pour son habilleuse. En dépit de son âge avancé, le maître du malouf Hadj Tahar Fergani sera amené à gravir péniblement les marches qui mènent à la scène pour chanter d'une voix, affectée par l'âge, «Billah ya hammam» que l'orchestre avait du mal à suivre. Blaoui Houari sera convié à mimer en play-back la direction de la chorale et la star de la soirée Houari Benchenet versera dans la facilité en clôturant son récital par une chanson sportive vantant un exploit suranné des Verts qui excitera les jeunes aficionados. Si l'organisation du festival a prouvé ses limites, la chanson oranaise, quant à elle, semble avoir recouvré sa crédibilité. A la fin de la soirée, les avis étaient unanimes pour prédire son nouvel essor. «La chanson oranaise ne mourra pas grâce aux nombreux jeunes talents qui pratiquent ce genre musical authentique et à la faveur des chyoukhs. Nous nous efforçons à nous montrer dignes de porter le flambeau de ceux qui nous ont précédés à l'instar des maîtres Ahmed Wahby, Blaoui, Benzerga, Baroudi, Benchenet», confiera Belazreg Abdelkader, originaire de Relizane et heureux lauréat au concours de la meilleure voix, un des trois prix décernés par le jury de cette édition du festival. Les deux autres prix: meilleure composition musicale et meilleures paroles, iront respectivement à Aliouane Miloud et Miloud Abdelkader. Pour sa part, Abdellaoui El-Hadj, président du Jury, estimera que «la chanson oranaise est vouée à un bel avenir et va rapidement reconquérir ses lettres de noblesse». Le chercheur et musicologue Abdelkader Bendaamèche abonde dans le même sens. «Chasser le naturel, il revient au galop. Ce qui a de la valeur ne peut se perdre. Ce festival est une institution qui a montré quelque chose qui va se développer et aller vers les jeunes générations qui ont connu et ont été séduits par d'autres genres. Il ne faut pas leur en vouloir. On peut faire la musique qu'on veut mais on est tenu de préserver l'authenticité, tout en veillant à l'ouverture.» «La chanson oranaise, poursuit-il, est intimement liée à certaines figures telles que Ahmed Wahby ou Blaoui Houari dont l'œuvre artistique recelait les germes du renouveau. D'ailleurs, c'est Blaoui Houari qui a été derrière les deux petits génies qu'ont été M'hamed Benzerga et Ahmed Sabeur. Leur mélodie était moderne par rapport à Khaldi ou Hamada. Un vide artistique conjoncturel et une médiatisation aidant, ce souffle de modernité devait profiter à un autre genre de musique qui s'est installé pendant des années. Aujourd'hui, les choses sont en train de revenir d'elles-mêmes et ce n'est pas dû uniquement à l'action de l'Etat. L'état est le catalyseur, il met les moyens.» Toujours selon Abdelkader Bendaamache, la chanson oranaise est en passe de se réconcilier avec son public et, aujourd'hui, cet événement en est la preuve. Les anciennes mélodies sont toujours là et on ne peut pas les oublier.» «Quitte à me répéter, conclut-il, je dirais: chasser le naturel, il revient au galop. On ne peut pas effacer la mémoire.»