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Témoignages en exclusivité
La Voix plonge dans le monde des harragate
Publié dans La Voix de l'Oranie le 15 - 10 - 2009

Si, dans les mentalités, le mot Harraga était associé à une œuvre d'une jeunesse masculine jouissant d'une bonne condition physique mais désespérée à un point de s'embarquer pour un voyage qui pourrait finir dans l'au-delà, cette aventure incertaine semble séduire de plus en plus la gent féminine qui s'est libérée de ses pulsions naturelles de toute contrainte sociale, en parcourant ainsi un destin qu'elle a certainement cherché, mais pas choisi.
Cette problématique qui fait désormais partie d'une réalité incontestable est illustrée par les données révélées par un responsable du commandement des gardes-côtes à Oran et qui fait savoir que, depuis septembre dernier à ce jour, une dizaine de filles de différentes tranches sociales dont certaines des mineures et d'autres enceintes ont été arrêtées pour tentative d'émigration illégale. La plupart d'entre elles ont été interceptées, par les unités marines des gardes-côtes, en compagnie de Harraga garçons au large des eaux territoriales, tentant de joindre l'autre côté de la Méditerranée.
Enceinte, elle tente la harga pour fuir la misère
Lorsqu'une femme mariée, âgée de 26 ans, enceinte à son troisième mois, décide la "harga" en prenant place dans une embarcation de fortune, l'on ne peut que mourir d'envie de connaître son histoire et les circonstances qui l'ont poussée à un tel choix.
Elle s'appelle Mama, le 12 juillet dernier elle a été interceptée à bord d'un canot pneumatique à 12 miles du Nord-Ouest de l'île Plane située près de la plage de Bousfer, en compagnie de 16 candidats à l'émigration clandestine. Avec ces jeunes, elle partageait le même rêve et certainement les mêmes espoirs. Ce jour-là, elle s'était faite belle et porté le meilleur de sa garde-robe. Bref, il fallait bien se préparer pour affronter la magnifique vie tant espérée. Approchée, dans un premier temps, elle s'abstiendra de nous parler pour nous livrer les détails de son aventure. Mais, quelques minutes après, elle changera d'avis. «J'en ai marre de cette vie, je veux partir pour respirer, bouger… Ici la misère m'étouffe et elle risque de me tuer. Je n'ai rien réussi à faire, je n'ai pas de toit qui m'héberge moi et ma petite famille, pas de travail. Le minimum pour une vie décente, je ne le trouve pas. A cela s'ajoutent la misère, les passe-droits, la bureaucratie et l'injustice. Nous sommes des étrangers dans notre propre pays. Je ne rêve même pas d'une villa ou d'une voiture de luxe ou d'autres commodités. Tout ce que je veux, c'est de pouvoir élever mon enfant dans des conditions décentes. Je veux que mon enfant puisse naître et grandir dans les bras de son papa qui a réussi, depuis quelques semaines, à rejoindre l'Espagne» dira-t-elle, avant de poursuivre : «Mon époux a décidé de partir une semaine après notre expulsion de la maison vétuste qu'on louait à Sidi El Houari. Avant mon mariage, je rêvais d'être une épouse idéale s'occupant de son foyer, de son enfant et de son mari. Hélas, j'ai fini par comprendre que, dans notre pays, même les rêves modestes n'étaient pas forcément réalisables. Juste après le mariage, notre vie s'est transformée en un vrai cauchemar. La cherté de la vie, l'absence d'une maison et d'un revenu décent qui nous permet de subvenir à nos besoins élémentaires ont vidé mon mariage de sa substance et nous ont plongés dans la tourmente des problèmes sociaux. Les choses se sont compliquées davantage pour ma famille après que mon époux a été renvoyé de son boulot et mis à la rue. Nous avons traversé des jours et des nuits extrêmement difficiles, surtout après notre expulsion du logement faute de paiement de loyer. Ellah Ghaleb, nous n'avions plus les moyens de nous acquitter des frais de loyer. Pis encore, parfois nous n'avions pas de quoi manger. C'est dans ces circonstances que mon époux décidera de se sauver en nous laissant derrière lui. C'est pour cette raison que je ne veux absolument rien de nos responsables, excepté qu'ils nous laissent tranquilles. Nous ne croyons plus à leurs promesses mensongères».
Une mineure qui fuit la maltraitance de ses frères
L'une des filles arrêtées pour émigration illégale, Chahra âgée de 17ans que nous avons trouvée terrorisée à l'idée d'être emprisonnée. «Je ne veux pas aller en prison, ça ne leur suffit pas la grande prison dans laquelle on vit depuis des années. Pourquoi sommes-nous ici ? Nous ne sommes ni des voleurs ni des criminels. Tout ce qu'on voulait, c'est aspirer à une vie meilleure en tentant notre chance ailleurs. Ce qu'on voulait, c'est fuir l'injustice et la mal-vie. Je veux vivre tant que je suis jeune», clame-t-elle à qui voulait l'entendre. Avant de poursuivre : «Franchement, je suis désespérée et ne vois pas les choses s'améliorer. Bien au contraire, j'ai l'intime conviction que les choses vont empirer. C'est pour cette raison que je ne ménagerai aucun effort pour partir d'ici. Ce qui m'encourage, c'est surtout le traitement spécial que réservent les autorités espagnoles aux mineurs. Là-bas, on se soucie des droits de l'homme et on s'occupe des enfants et des mineurs. Je suis sûre que je trouverai ce que je cherche là-bas en Espagne et je pourrai vivre mieux qu'ici. Quoi qu'on pense de moi, quoi que l'on dise, rien ne me dissuadera» ajoutera-t-elle.
Même désespoir et même colère contre la société et le poids des traditions qu'on trouve chez Fella, une étudiante de troisième année en langues étrangère. Elle a été arrêtée en compagnie de sa copine et de 33 candidats à l'émigration clandestine, le 29 juin dernier. L'embarcation, à bord de laquelle ils étaient tous, a été interceptée par les éléments des gardes-côtes. Approchée au sujet de son arrestation, elle dira : «Mes frères chômeurs me pourrissent la vie. Ils se comportent envers moi avec une méchanceté et une répression barbares. Ils ont tenté à maintes reprises de m'interdire de continuer mes études à l'université. Ils préfèrent que je bosse pour leur apporter de l'argent pendant qu'ils passent, eux, leur journée à ne rien faire. Chose que je refuse catégoriquement. Alors, j'ai décidé de quitter et le domicile familial et le pays pour en finir une bonne fois pour toutes avec ce cauchemar».
On l'appelait «El Bayra», elle décide de se trouver un époux ailleurs
L'histoire de Zohra, une coiffeuse âgée de 34 ans, originaire d'El Amria, est différente de celles de Chahra, Fella et Mama. Elle dit vouloir partir pour chercher un époux de l'autre côté de la mer. Elle a été interpellée en compagnie de Faïza et six autres Harraga au large, la nuit de l'Aïd El-Fitr de l'année dernière. «Je suis partie d'ici dans l'espoir de me trouver un conjoint ailleurs. J'en avais marre d'être tout le temps traitée d'El Bayra par mes proches et mes voisins. Je suis devenue complexée à un point où je ne sortais plus de chez moi. Alors, dès que ma copine Faïza m'a proposé l'idée d'une harga, je n'ai pas hésité une seconde à répondre favorable. Je préfère mourir que d'être traitée d'El Bayra !»
«J'ai tenté deux fois l'aventure pour me faire soigner mais j'ai fini par être expulsée et mon époux m'a répudiée»
On l'appelle (Souhila la Kamikaze), en référence au record des tentatives de harga qu'elle détient. Contrairement, aux Harragate précédentes, Souhila a réussi à joindre l'Espagne, à deux reprises en l'espace de deux semaines seulement. Une performance certainement rare. Mais elle a été confrontée à la diplomatie algérienne en Espagne. «C'est le consul qui a détruit entièrement ma vie. Il n'a ménagé aucun effort pour que je sois expulsée du territoire espagnol et renvoyée au pays, moi et ma petite famille. Pourtant, je suis partie en Espagne pour me faire soigner. Depuis quelque temps, j'ai contracté une maladie
ophtalmologique étrange que les médecins n'ont pas réussi à identifier. Plus grave encore, je souffre d'un cancer au niveau de mon appareil génital, selon les rapports des différents médecins qui m'ont examinée» relate Souhila avec un ton plein d'amertume, avant de poursuivre : «Actuellement, je suis sans abri et sans domicile fixe. Mon époux m'a répudiée, à vrai dire il m'a laissé tomber. Il n'a pas supporté les conditions misérables dans lesquelles nous vivons. Depuis, je galère dans les rues de la ville. Je n'ai pas de quoi manger, je n'ai pas où dormir. Je ne vois aucune lueur d'espoir. J'ai adressé des correspondances à toutes les autorités pour trouver une sortie de cette vie infernale mais, hélas, mon cas ne semble intéresser aucun de nos responsables. Je frôle le suicide»
El-Hadja Rahma, une harraga de 65 ans
C'est incontestablement la personnalité la plus connue dans la commune d'Aïn El-Türck, depuis février 2008. Selon l'un de ses proches, «Rahma est une veuve sans enfant. Elle voulait coûte que coûte rejoindre ses frères et sœurs résidant en France, elle n'a pas hésité alors à tenter l'aventure en compagnie de 11 jeunes. Elle vivait avec son père, après la mort de son époux, il y a 3 ans de cela. Elle a déposé, six fois, son dossier de demande de visa pour rejoindre les autres membres de sa famille, mais sans succès. On l'a même arnaquée de 18 millions de centimes pour, soi-disant, obtenir le visa. Ils l'ont complètement ruinée. Elle avait un petit commerce d'alimentation générale qu'elle a hérité et qui a déclaré faillite. Sa situation sociale se dégradait de plus en plus, jusqu'au jour où l'un de ses voisins appelé Bahri frappe à sa porte pour lui proposer de s'associer à lui dans une aventure de harga. Sans aucune hésitation, elle acceptera de tenter le coup avec un groupe de jeunes du quartier, tous désespérés de ne pouvoir obtenir le visa. Le mardi 5 février, elle a contacté par téléphone son beau-fils qui est père de famille et vivait, lui aussi, dans des conditions extrêmement difficiles.
Ce dernier tentera par tous les moyens de la dissuader de participer à cette aventure incertaine, mais Rahma était décidée et avait préparé déjà tout jusqu'au dernier détail. Alors, elle s'embarquera le jour suivant avec des jeunes du quartier qui ont beaucoup apprécié sa présence avec eux. Ils ont pris le départ depuis une plage située à quelques mètres du domicile de Hadja Rahma. Les jeunes Harraga avec lesquels elle est partie lui ont embrassé le front et l'ont considérée comme leur porte chance. Elle était l'amiral de cette embarcation. Son beau-fils et les autres membres de sa famille sont restés inquiets jusqu'à ce que le téléphone sonne, le jour suivant.. C'était Hadja Rahma qui les informait de son arrivée, saine et sauve, avec ses co-aventuriers à Alméria en Espagne »
Le corps d'une fille repêché et deux autres portées disparues
Nous apprenons d'une source responsable que les investigations sont toujours en cours, en vue de localiser les deux filles, Chahra et Rachida, portées toutes les deux disparues. Elles ont toutes pris le départ en compagnie d'un groupe de jeunes harraga, depuis les côtes de la wilaya de Mostaganem. Selon des informations non confirmées parvenues aux instances habilitées, les deux filles recherchées seraient écrouées dans l'une des prisons du Maroc. L'on saura, par ailleurs, que le corps d'une fille non identifiée et dont l'âge ne dépasserait pas les 25 ans, a été rejeté par la mer près de la plage de Cap Blanc relevant de la commune d'El Karma.


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