Censé être la manifestation phare de la Culture en Algérie, le 14ème SILA, que le président de la République a inauguré, hier, risque de connaître le même sort que ses prédécesseurs. En procédant à son inauguration officielle, mardi, le président de la République aura donné une impulsion nouvelle à cet événement culturel qui semble éprouver d'énormes difficultés pour atteindre son objectif qui est de faire du livre le compagnon fidèle de l'Algérien. Si l'objectif est noble, il reste que l'aspect commercial a étendu ses tentacules et étouffé l'aspect intellectuel. «Je pars à Alger avec l'intention de faire des achats sélectifs et précis», déclare Amine B., un étudiant en médecine de 23 ans qui avoue trouver l'essentiel de sa documentation sur le Net. «Chaque année, nous partons en groupe pour faire des achats de ce genre» ajoutera-t-il, en reconnaissant qu'il en profite pour approvisionner des camarades qui ne peuvent pas faire le voyage, «moyennant une petite commission». M.M., romancier et habitué du SILA, avoue que «Le Salon est une bonne chose, mais peu de gens viennent pour enrichir leurs bibliothèques personnelles. Les temps sont durs et ceux qui visitent le SILA viennent pour faire des achats utiles». Cet aveu est confirmé par Anis, un libraire de la périphérie d'Oran qui reconnaît qu'il part avec un objectif précis, celui de trouver des nouveautés ou des titres pour satisfaire une clientèle spécifique (le livre religieux). F., propriétaire d'une maison d'édition à Oran, dira pour sa part que «le livre ne fait vivre ni son auteur ni son éditeur. Une preuve, j'ai mis, à deux reprises, la clé sous le paillasson. D'ailleurs, comptez combien de maisons d'édition existent dans la seconde ville du pays». Un autre propriétaire de maison d'édition, à Oran, reconnaît qu'il travaille à perte mais qu'il se rattrape sur le manuel scolaire. Le livre religieux sera la hantise des organisateurs qui ont la charge de veiller, à juste titre, sur la santé morale des lecteurs quand on sait que l'essentiel des 120.000 titres présentés sont en arabe et/ou à connotation religieuse. Le livre religieux tient, d'habitude, une place importante dans ce type de salon qui draine des milliers de visiteurs attirés par les prix abordables. Les ouvrages qui "font l'apologie du terrorisme, ne correspondant pas à nos valeurs ou portant atteinte à nos institutions", en sont exclus, a indiqué mardi le directeur du livre au ministère de la Culture Rachid Hadj Nacer. Rappelons que le 14ème SILA est dédié au philosophe français Francis Jeanson, décédé en août à 87 ans, qui anima un réseau de soutien (qui porta son nom) durant la Guerre de libération nationale. Plus de 340 éditeurs, représentant 25 pays, participent à ce salon jusqu'au 6 novembre.