Décidément, le passeport biométrique -chantier phare de Zerhouni- continue de susciter des résistances, notamment de la part de cercles conservateurs islamistes qui le jugent en opposition avec leurs convictions religieuses. Récemment, encore, la polémique est sortie du cadre algéro-algérien pour devenir objet d'intérêt des imams saoudiens. Et pour cause, Cheikh Abd El Aziz Al Cheikh, mufti de l'Arabie saoudite, recommande aux hommes de ne pas se raser la barbe et aux femmes de ne pas enlever le hidjab. Le Cheikh s'est permis cette ingérence au nom de la liberté citoyenne, alors que la photo sur le passeport biométrique doit être sans barbe pour les hommes et sans hidjab pour les femmes. Se référant au Saint Coran, le mufti affirme qu'il «est interdit à tout musulman d'obliger son frère à obéir à des lois que la religion considère comme un péché», recommandant aux hommes «gardez vos barbes telles qu'elles sont et sauvegardez-les» et aux femmes «n'enlevez pas vos voiles, c'est un péché», promettant la Géhenne pour ceux et celles qui se soumettent à la rigueur de la loi. Il s'agit, là et incontestablement, d'un cas d'ingérence dans les affaires internes d'un pays souverain. Une ingérence d'autant plus inadmissible qu'il s'agit d'un mufti, c'est-à-dire une autorité officielle. Une «fetwa» mal venue, expression d'un islam wahabite, rigoriste qui est en contradiction sur plusieurs questions avec le rite malékite, en vigueur dans les pays du Maghreb. Pour mémoire, la chaîne Al Djazeera, qui ne rate pas une occasion de tirer à boulets rouge sur l'Algérie, était la première à partir en croisade contre le passeport biométrique en déformant délibérément les propos du ministre de l'Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni, le contraignant à apporter des précisions. Faut-il s'étonner, dès lors, de l'attitude des autorités religieuses saoudiennes, coutumières d'«intrusion» dans les affaires internes de notre pays? L'année dernière, l'ambassade d'Arabie Saoudite en Algérie a procédé à la distribution, par le biais de son personnel et du mouvement associatif algérien, de milliers d'exemplaires du Saint Coran, une action interdite par la législation algérienne. Les Wahhabites saoudiens restent fidèles à leur ligne qui consiste à s'ériger référents de l'Islam, ce qui les a poussés à soutenir financièrement et idéologiquement le terrorisme dans les années quatre-vingt dix. Il reste à espérer que les autorités algériennes répondent au mufti saoudien.