Filmé en train d'entrer dans son palais-bunker de Tripoli, Kadhafi, passé en quelques jours du statut de bouffon international à celui de boucher de l'année, avait –avant sa longue intervention sur la télé de son pas, traité -dans une rapide allocution- de «chiens» les journalistes qui l'avaient donné partant. Pis encore, la télévision d'Etat continuait de nier les massacres, alors que des avions de chasse et des chars bombardent les manifestants regroupés dans les rues de la capitale, en faisant un lourd bilan: 500 morts selon des sources. Ainsi donc, le fils du sanglant dictateur, Seif al-Islam, aura tenu les promesses de «rivières de sang» qu'il annonçait à la télévision il y a quelques jours. La fin de Kadhafi? Il faut dire que les tous les signes concourent à la description d'un régime en crise. Benghazi, la seconde ville de Libye, est aux mains des manifestants, et de leurs chants joyeux de slogans hostiles au régime. La situation à Tripoli, la capitale, est chaotique, avec des immeubles en feu et une police qui se cache. D'importantes unités militaires désertent, tandis que des dignitaires tribaux et des membres de l'élite, qui lui étaient autrefois fidèles, condamnent aujourd'hui le régime. Ainsi, la Libye s'enfonce. Des centaines de personnes sont mortes lors des raids du régime contre les manifestants. Le compte exact est difficile à établir, tant le régime a imposé un blackout médiatique, et a essayé de limiter les communications mobiles et internet. Mais il est clair que ce régime ne prévoit pas d'y aller avec le dos de la cuillère. C'est d'ailleurs ce qui ressortait du discours, hier, de Kadhafi. Reste à savoir si la famille Kadhafi pourra s'assurer du soutien de tribus importantes, et des dignitaires militaires qui n'ont pas encore rejoint l'opposition. Toujours est-il, les désertions, pour le moment, sont un signe qui encourage à penser proche la chute de Kadhafi. Kadhafi annonce qu'il restera «chef de la révolution» Kadhafi devait en fin d'après-midi faire une apparition à la télévision pour réaffirmer qu'il restait au pouvoir, non sans proférer comme son fils d'autres menaces en tentant par moment de titiller la fibre sensible du peuple. «Des appareils qui ont survolé tous les palais. Pourquoi? Parce que Kadhafi a été président de la République. C'est parce que Kadhafi a un passé de lutte pour la Libération».Le colonel devait ensuite exhiber «la main étrangère» pour expliquer ce qui se passe dans son pays. «Ils cherchent à copier ce qui s'est passé en Tunisie, incitant vos enfants à aller combattre. Mais de la sorte, nous allons nous entretuer de fait», dira-t-il en invitant le peuple libyen à «constituer de nouveaux comités populaires». Les pressions diplomatiques se multiplient Alors que la répression du mouvement populaire continue en Libye, les condamnations internationales se multiplient à l'égard du régime de Mouammar Kadhafi. Face à l'aggravation de la situation, le Conseil de sécurité de l'ONU s'est réuni, hier, pour discuter de la crise libyenne.Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, cité par son porte-parole, a appelé le colonel Kadhafi à faire cesser les violences contre les manifestants et à respecter ‘les libertés fondamentales et des droits de l'homme, y compris le droit de réunion et à l'information'. De son côté, le haut commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Navi Pillay, a exigé mardi l'ouverture d'une ‘enquête internationale indépendante' sur les violences en Libye, n'hésitant pas à évoquer la possibilité de ‘crimes contre l'humanité'. Même l'Iran a condamné, par la voie de Ramin Mehmanparast, porte-parole du ministère des affaires étrangères iranien, ces “violences inacceptables” et le “massacre d'innocents” en Libye, demandant à la communauté internationale d'intervenir pour y mettre fin. “La République islamique d'Iran considère que la révolte du peuple libyen et ses demandes justes sont dans la continuation du réveil islamique dans la région et suit avec inquiétude l'évolution dans ce pays”, a poursuivi le porte-parole.